vendredi 22 décembre 2006

La Nativité du Seigneur

Nativité du Seigneur
25/XII/06
Jean 1, 1-18 (page 216)

Si l’on organisait un sondage pendant le temps de Noël, j’aimerais poser aux chrétiens de notre pays la question suivante : Quelle image vous vient spontanément à l’esprit quand on vous parle de Noël ? Probablement la majorité des réponses donnerait : la crèche. D’autres pourraient répondre, bien que chrétiens, la fête familiale, les cadeaux ou le père Noël… Oui, spontanément nous associons la fête de Noël au récit de la Nativité tel que nous l’avons entendu en saint Luc lors de la messe de la nuit. Car pour une majorité de chrétiens, et c’est encore plus vrai en Provence, la messe de Noël, la « vraie », c’est celle de la nuit, et si elle est à minuit c’est encore mieux !
Nous célébrons la messe du saint jour de Noël, et l’évangéliste Luc passe le relais à son confrère théologien Jean. Nous passons de la crèche de Luc au prologue de Jean, de l’enfant Jésus emmailloté et couché dans une mangeoire au Verbe éternel de Dieu qui se fait chair. C’est bien sûr la même réalité, le même mystère que nous contemplons. Mais la tonalité de la messe du jour est bien différente de celle de la nuit. Avec Jean nous ne sommes plus dans un récit de la naissance du Sauveur mais dans une contemplation théologique du mystère de l’incarnation. Le prologue de Jean est l’un des plus beaux textes de toute la Bible, un texte d’une extraordinaire richesse théologique et spirituelle. Loin de moi l’idée de me lancer en ce saint jour dans un commentaire du prologue. Il me semble cependant que le prologue de Jean nous pose une question essentielle : Pourquoi Noël ? Pourquoi cet extraordinaire et imprévisible mystère de l’incarnation ? La liturgie de la Parole nous offre quelques éléments de réponse. Je vais tenter de les mettre en lumière pour vous aujourd’hui.

Pourquoi Noël ? Tout d’abord parce qu’en cette sainte nuit la plénitude des temps est advenue : « dans les derniers temps, dans ces jours où nous sommes. » Le mystère de Noël trace une frontière dans l’histoire de notre humanité. Désormais il y aura un avant le Christ et un après le Christ. Une naissance, c’est toujours un signe de nouveauté, d’espérance. Mais lorsque c’est le Verbe de Dieu qui se fait chair, il n’y a plus de doute à avoir sur la portée de sa naissance : avec Noël nous entrons dans une ère nouvelle de l’Alliance entre Dieu et les hommes.

Pourquoi Noël ? Pour que Dieu puisse se révéler en plénitude à notre humanité : « Il nous a parlé par ce Fils qu’il a établi héritier de toutes choses et par qui il a créé les mondes. » Le prologue de Jean affirme la même vérité : « Dieu, personne ne l’a jamais vu ; le Fils unique qui est dans le sein du Père, c’est lui qui a conduit à le connaître. » Comme toutes les œuvres de Dieu, Noël n’a pas d’autre explication que l’amour. Le Père, dans son amour, s’abaisse en son Fils, pour se mettre en quelque sorte à notre niveau. Ceux qui voyaient en Dieu un monarque absolu regardant de haut ses créatures devront réviser leur théologie. En son Verbe fait chair Dieu nous regarde face-à-face et se rend visible à nos yeux de chair, si nous acceptons de croire en lui et de lui faire confiance.

Pourquoi Noël ? Pour que nous devenions des fils et des filles de Dieu, pour que nous puissions adorer le Père en esprit et en vérité, pour que nous puissions nous adresser à Lui en disant : « Notre Père ». Si le Fils de Dieu s’est fait homme, c’est bien pour que nous, les hommes, nous puissions devenir fils de Dieu. C’est l’admirable échange du mystère de l’incarnation. Le prologue de Jean nous fait comprendre que la naissance de Jésus en appelle une autre, tout simplement parce qu’il est le Premier-né :
« Tous ceux qui l’ont reçu, ceux qui croient en son Nom, il leur a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu. Ils ne sont pas nés de la chair et du sang, ni d’une volonté charnelle, ni d’une volonté d’homme : ils sont nés de Dieu. »
Fêter la naissance de Jésus Sauveur, c’est donc fêter dans le même mouvement notre naissance à la vie de fils de Dieu. Oui, nous sommes véritablement nés de Dieu par le sacrement de baptême et par notre foi en Jésus. Notre baptême est une seconde naissance, une nouvelle naissance : une renaissance. Par notre baptême nous entrons dans cette nouvelle ère de l’histoire de notre humanité : une ère de grâce et de vérité. Nous associons habituellement le baptême au mystère de Pâques et nous avons raison. Mais dans le Christ tous les mystères sont unifiés et se renvoient les uns aux autres : Pâques est la plénitude du mystère de l’incarnation. Notre baptême, sacrement pascal comme tous les autres sacrements, prend davantage de sens si nous le considérons aussi dans la perspective du mystère de Noël. Car dans la nuit de la Nativité, Dieu ne nous donne pas seulement un Sauveur, Il nous donne son Fils unique et nous révèle par là le mystère de sa vie trinitaire. Et c’est bien par notre baptême que nous entrons à notre tour dans la vie trinitaire et que nous recevons notre filiation adoptive.
Que la contemplation du Verbe fait chair soit pour nous l’occasion de renouveler profondément notre action de grâces ! Oui, merci, ô Père, de nous faire tes fils et tes filles en Jésus ton Fils unique. Merci pour le don du baptême et de la foi catholique. Donne-nous de comprendre que notre plus grande dignité se trouve dans notre condition de chrétiens ! Que peut-il y avoir en effet de plus grand que d’être fils de Dieu ? Que peut-il y avoir de plus beau que de pouvoir t’appeler : Notre Père ? O Père, nous n’aurons pas assez de toute notre vie pour découvrir ton amour et te rendre grâce… C’est pour cela qu’en Jésus tu nous veux auprès de toi pour toujours ! Le mystère de Noël appelle en effet le mystère de Pâques.
Amen

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