jeudi 26 mai 2022

Ascension du Seigneur 2022

 


26/05/2022

Luc 24, 46-53

L’Ascension du Seigneur Jésus est une source de grande joie pour les disciples. L’entrée de Jésus dans le sanctuaire du Ciel les pousse à la prière dans le sanctuaire de la terre, celui de Jérusalem : ils étaient sans cesse dans le Temple à bénir Dieu. La séparation physique entre Jésus et ses disciples ne provoque pas leur tristesse, leur désarroi, ou encore un sentiment d’abandon. C’est même tout le contraire qui se produit dans leur cœur. Nous voyons comment Jésus ressuscité les prépare à cette séparation dans la première lecture comme dans l’Evangile. L’essentiel de cette préparation consiste en la promesse du don de l’Esprit Saint. L’Esprit d’amour est une force, une puissance venue d’en haut. Jésus absent physiquement, la présence de l’Esprit Saint sera donnée à la première Eglise pour lui faire découvrir la nouvelle présence de Jésus ressuscité. C’est grâce à l’Esprit Saint que les disciples pourront faire l’expérience d’une nouvelle relation avec le Seigneur ressuscité et monté au Ciel. Avant son Ascension Jésus lie la promesse de l’Esprit de Pentecôte à la mission de ses disciples qu’il résume par un mot, celui de témoins.

Vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre.

Il est significatif que le témoignage des premiers chrétiens ne se limite pas à Israël. C’est un témoignage sans frontières et universel, véritablement catholique. Dans le mystère de son Ascension, Jésus se donne à voir comme le Sauveur de tous les peuples. De par son incarnation sa mission se limitait à un territoire particulier et à un peuple particulier. Son Ascension ne lui enlève pas son humanité, mais elle lui permet une présence universelle du sein de la gloire de la Trinité. A cette présence universelle du Ressuscité, correspond une Eglise universelle et une mission universelle. Tout cela se réalise par la puissance de l’Esprit Saint répandu sur l’humanité. L’Ascension fait ainsi éclater les cadres étroits dans lesquels les disciples s’étaient enfermés : Seigneur, est-ce maintenant le temps où tu vas rétablir le royaume pour Israël ? L’entrée de Jésus dans le sanctuaire du Ciel empêche une conception étriquée de la religion et de la foi. Il n’est pas un Messie politique au service de la cause de son peuple. Il est bien le Sauveur de tous, l’Emmanuel, Dieu désormais présent à tout homme en ce monde. L’apôtre Paul a parfaitement saisi les conséquences de l’Ascension et de la Pentecôte en les appliquant au sacrement du baptême : Tous, dans le Christ Jésus, vous êtes fils de Dieu par la foi. En effet, vous tous que le baptême a unis au Christ, vous avez revêtu le Christ ; il n’y a plus ni juif ni grec, il n’y a plus ni esclave ni homme libre, il n’y a plus l’homme et la femme, car tous, vous ne faites plus qu’un dans le Christ Jésus. Ce message de Paul aux Galates est repris dans la lettre aux Colossiens : Ainsi, il n’y a plus le païen et le Juif, le circoncis et l’incirconcis, il n’y a plus le barbare ou le primitif, l’esclave et l’homme libre ; mais il y a le Christ : il est tout, et en tous.

Le Christ monté au ciel et donateur avec le Père de l’Esprit Saint offre à l’humanité une unité nouvelle, une communion spirituelle qui doit s’étendre bien au-delà de la communauté des baptisés et des limites de l’Eglise visible pour atteindre jusqu’aux extrémités de la terre, jusqu’aux périphéries de l’humanité dont le Pape François nous parle si souvent.

N’ayez pas peur d’aller, et de porter le Christ en tout milieu, jusqu’aux périphéries existentielles, également à celui qui semble plus loin, plus indifférent.


dimanche 22 mai 2022

Sixième dimanche de Pâques / année C

 

22/05/2022

Jean 14, 23-29

Je m’en vais, et je reviens vers vous.

Ces paroles de Jésus à ses disciples peuvent être comprises de deux manières. Soit elles s’appliquent à la mort et à la résurrection de Jésus, soit elles désignent son Ascension et son retour en gloire.

Le Seigneur prépare ses disciples à son Ascension. Il leur indique le chemin de la fidélité alors qu’ils ne pourront plus le voir :

Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole ; mon Père l’aimera, nous viendrons vers lui et, chez lui, nous nous ferons une demeure.

Il s’agit donc pour les disciples de garder la parole du Christ, c’est-à-dire de lui être fidèle, de la mettre en pratique. Cette fidélité active du disciple qui recherche toujours la volonté de Dieu est récompensée par une nouvelle forme de présence : non plus celle de Jésus dans la chair ou de Jésus ressuscité mais sa présence spirituelle en nous avec le Père. L’amour fidèle du disciple appelle en lui cette présence de Dieu. C’est cette présence divine qui est inaugurée par le sacrement de baptême donné au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Après l’Ascension et pendant tout le temps de l’histoire de l’Eglise, c’est l’Esprit Saint qui fait vivre en nous la parole de Jésus. Bien sûr nous avons accès à cette parole quand nous le voulons en ouvrant les Evangiles et en lisant les témoignages qui y ont été consignés en vue de notre foi. Il ne suffit pas cependant de lire les Evangiles. Nous avons besoin de l’aide et des lumières de l’Esprit de Dieu pour que la parole de Jésus soit vraiment vivante en nous : Le Défenseur, l’Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit.

De la même manière que le Verbe, Jésus Parole de Dieu, s’est fait chair dans le sein de Marie, ainsi la parole de Jésus peut devenir chair en chacun de nous si nous l’accueillons dans l’Esprit Saint. Le chrétien peut devenir de cette manière un Evangile vivant par le témoignage de sa vie. Saint Paul pouvait affirmer aux chrétiens de Corinthe :

De toute évidence, vous êtes cette lettre du Christ, produite par notre ministère, écrite non pas avec de l’encre, mais avec l’Esprit du Dieu vivant, non pas, comme la Loi, sur des tables de pierre, mais sur des tables de chair, sur vos cœurs.

Enfin nous retrouvons dans l’Evangile de ce dimanche le grand don de Pâques, celui de la paix du Christ :

Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix ; ce n’est pas à la manière du monde que je vous la donne.

Jésus précise bien que la paix qu’il nous donne est différente de celle donnée par le monde. La paix construite par les hommes peut être en effet le résultat d’un compromis égoïste, d’une logique du donnant-donnant, d’une entente fondée non pas sur la justice et la vérité mais bien souvent sur les intérêts, l’ambition, le profit et la dissimulation. Cette paix est par définition fragile et superficielle. Seul un cœur prêt à se convertir, c’est-à-dire à se remettre en question à la lumière de la parole du Christ, est capable de recevoir la paix qui vient du Seigneur. Cela demande de notre part beaucoup d’humilité et surtout la volonté de ne pas se résigner, le désir de progresser dans notre communion avec Dieu et entre nous dans l’Eglise comme dans la société. Chaque fois que nous choisissons l’amour, la justice et la vérité, nous sommes véritablement artisans de paix.

dimanche 15 mai 2022

Cinquième dimanche de Pâques / année C

 

15/05/2022

Jean 13, 31-35

Jésus vient de se livrer par anticipation lors du dernier repas avec ses disciples. Le lendemain Pilate le livrera pour qu’il soit crucifié comme le roi des Juifs. C’est dans ce contexte unique de sa vie terrestre que le Seigneur fait le don à ses disciples du commandement de l’amour. Le moment est solennel et intense, c’est celui de la glorification du Fils par le Père en passant par les souffrances de la Passion. D’où l’importance de ce testament spirituel : Je vous donne un commandement nouveau : c’est de vous aimer les uns les autres. Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres. A la nouveauté du mystère pascal et particulièrement de la résurrection correspond la nouveauté du commandement de l’amour fraternel. L’amour est une notion vague et imprécise, sujette à des compréhensions bien différentes… D’où la précision apportée par Jésus : comme je vous ai aimés. En méditant les Evangiles nous nous imprégnons de cet amour à la manière de Jésus, donc à la manière de Dieu. Il est un don gratuit, sans limites, offert à tous y compris aux ennemis. L’amour de Jésus est toujours miséricordieux car il comporte cette capacité infinie à pardonner, cette volonté inébranlable de réconciliation. Cet amour prend soin des corps et des âmes. Jésus est bien notre Maître dans le difficile exercice de l’amour fraternel. Saint Paul a traduit de manière concrète cet amour du Christ que nous devons faire vivre dans nos relations mutuelles. C’est dans le chapitre 12 de sa lettre aux Romains que Paul nous permet de sortir d’une vision vague et imprécise de l’amour. Ce merveilleux texte vaut mieux que tous les sermons que je pourrais faire. C’est la raison pour laquelle je tiens à le proclamer lentement pour que nous le goutions ensemble :

Que votre amour soit sans hypocrisie. Fuyez le mal avec horreur, attachez-vous au bien. Soyez unis les uns aux autres par l’affection fraternelle, rivalisez de respect les uns pour les autres... Partagez avec les fidèles qui sont dans le besoin… Bénissez ceux qui vous persécutent ; souhaitez-leur du bien, et non pas du mal. Soyez joyeux avec ceux qui sont dans la joie, pleurez avec ceux qui pleurent. Soyez bien d’accord les uns avec les autres ; n’ayez pas le goût des grandeurs, mais laissez-vous attirer par ce qui est humble. Ne vous fiez pas à votre propre jugement. Ne rendez à personne le mal pour le mal, appliquez-vous à bien agir aux yeux de tous les hommes. Autant que possible, pour ce qui dépend de vous, vivez en paix avec tous les hommes… Si ton ennemi a faim, donne-lui à manger ; s’il a soif, donne-lui à boire… Ne te laisse pas vaincre par le mal, mais sois vainqueur du mal par le bien.

En ce dimanche où le pape François propose comme modèle de sainteté Charles de Foucauld qui a voulu vivre humblement en se faisant le frère universel, accueillons aussi ses paroles à propos de la douceur de l’amour : La douceur en pensées, paroles et actions…Rien d’amer, rien de violent, rien de dur… Etre du miel, un air léger et embaumé, du velours, quelque chose de tendre, de rafraîchissant, de consolant, de suave, pour tous les hommes : c’est un des devoirs imposés par la charité envers les hommes.

À ceci, tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l’amour les uns pour les autres.

 

 

dimanche 1 mai 2022

Troisième dimanche de Pâques / année C

 

1er mai 2022

Jean 21, 1-19

En ce dimanche du temps de Pâques l’Evangile nous fait le récit de la dernière manifestation du Ressuscité aux disciples avant l’Ascension. Nous ne sommes plus à Jérusalem comme au soir de Pâques mais en Galilée sur le bord du lac de Tibériade. Les disciples dont Pierre et Jean semblent avoir repris leurs occupations habituelles de pêcheurs, comme si leur compagnonnage avec Jésus n’avait été qu’une parenthèse dans leur vie. On a l’impression d’un retour à la case départ. C’est précisément là, en Galilée, dans leur activité de pêcheurs que Jésus va les rejoindre à nouveau pour les rappeler à leur mission d’apôtres. Chez saint Luc l’événement de la pêche miraculeuse se situe avant Pâques alors que l’évangéliste Jean en fait le contexte de l’ultime rencontre avec le Ressuscité.

Au lever du jour, Jésus se tenait sur le rivage, mais les disciples ne savaient pas que c’était lui.

Nous remarquons dans les Evangiles de Pâques cette constante : dans un premier temps les disciples ne reconnaissent pas Jésus : Marie de Magdala, les disciples d’Emmaüs.  Dans chacune de ces rencontres inattendues ils ont besoin d’un signe, comme d’un déclic, pour pouvoir le reconnaître. Pour Marie de Magdala c’est tout simplement d’être appelée par son nom, pour Thomas c’est de voir les traces de la Passion sur le corps de cet inconnu qui se manifeste à lui, pour les disciples d’Emmaüs c’est le geste de la fraction du pain. Dans notre Evangile c’est la pêche miraculeuse et surabondante qui joue le rôle de ce déclic permettant la reconnaissance du Seigneur dans l’inconnu assis au bord du lac. Et comme souvent c’est Jean qui, le premier, reçoit cette illumination intérieure de la foi grâce au signe : Alors, le disciple que Jésus aimait dit à Pierre : « C’est le Seigneur ! » C’est Jean qui entraîne Pierre vers le Seigneur. Déjà dans le récit de Luc la pêche miraculeuse était liée à l’appel de ces hommes, pêcheurs de profession. Jésus dit à Simon : « Sois sans crainte, désormais ce sont des hommes que tu prendras. » Nous retrouvons cet appel de Simon-Pierre mais d’une manière solennelle, à trois reprises comme en écho au triple reniement du temps de la Passion. La vocation de Pierre est celle du pasteur à l’image de Jésus bon pasteur. Ce qui est spécifique au récit de Jean c’est l’insistance sur l’amour du pasteur pour le Christ. L’amour du Seigneur ressuscité est la condition du service que l’apôtre sera amené à exercer dans la première Eglise, et cela jusqu’au don suprême de sa vie dans le martyre. Dans sa première lettre Pierre a bien retenu la leçon donnée par son maître au bord du lac. Il met en avant la charité du pasteur à l’égard des brebis, y compris de celles qui sont en dehors du bercail de l’Eglise : Soyez prêts à tout moment à présenter une défense devant quiconque vous demande de rendre raison de l’espérance qui est en vous ; mais faites-le avec douceur et respect. En s’adressant aux responsables de l’Eglise il leur rappelle enfin la règle de la charité pastorale, signe des véritables ministres du Christ : Soyez les pasteurs du troupeau de Dieu qui se trouve chez vous ; veillez sur lui, non par contrainte mais de plein gré, selon Dieu ; non par cupidité mais par dévouement ; non pas en commandant en maîtres à ceux qui vous sont confiés, mais en devenant les modèles du troupeau.