dimanche 12 mai 2024

Septième dimanche de Pâques / année B

 

12/05/2024

1 Jean 4, 11-16

Celui qui proclame que Jésus est le Fils de Dieu, Dieu demeure en lui, et lui en Dieu. Et nous, nous avons reconnu l’amour que Dieu a pour nous, et nous y avons cru. Dieu est amour : qui demeure dans l’amour demeure en Dieu, et Dieu demeure en lui.

Nous sommes dans la dernière partie du temps pascal, entre l’Ascension de Jésus et le don de l’Esprit Saint au jour de Pentecôte. La deuxième lecture de ce 7ème dimanche de Pâques nous redit une vérité essentielle de la révélation chrétienne : Dieu est amour. Oui, ce Dieu invisible qui est Esprit est aussi Amour. Le Dieu révélé par la personne et la vie du Christ est Trinité, communion d’amour entre les trois personnes divines. La Pentecôte marque bien l’accomplissement de cette révélation avec le don de l’Esprit, lien d’amour entre le Père et le Fils. Dans le mystère de l’incarnation Dieu nous donne son Fils et ce don trouve sa plénitude dans le don de l’Esprit fait par le Père et le Fils. Dieu se révèle comme Trinité en se donnant à nous, en nous communiquant son amour par le Fils dans l’Esprit. Après l’Ascension la présence divine n’est plus visible à nos yeux de chair. Cette présence d’amour ne peut se vivre que dans l’intériorité de la vie spirituelle, ce qu’exprime parfaitement bien le verbe « demeurer » si cher à saint Jean, le verbe de l’inhabitation divine, inhabitation réciproque entre chacun de nous et Dieu :

Celui qui proclame que Jésus est le Fils de Dieu, Dieu demeure en lui, et lui en Dieu.

Ce verset de saint Jean nous montre la puissance de l’acte de foi en Jésus confessé comme Fils de Dieu et Sauveur. Cet acte de foi, à la manière d’un sacrement, établit entre nous et Dieu une communion de vie et d’amour, au plus intime de nous-mêmes. Et nous savons que c’est grâce à l’Esprit Saint que nous pouvons faire cet acte de foi qui attire en nous la présence divine. L’inhabitation divine ne dépend pas seulement de notre acte de foi en Jésus Fils de Dieu. Elle se réalise dans la mesure où nous mettons en pratique son commandement, celui de l’amour fraternel qui s’étend jusqu’à l’amour des ennemis et qui est donc universel et sans limites.

Qui demeure dans l’amour demeure en Dieu, et Dieu demeure en lui.

Saint Jean nous montre ainsi que nous ne pouvons jamais séparer notre foi en Jésus des œuvres de l’amour, du fruit de l’Esprit. Pour reprendre la belle formule employée par saint Paul dans sa lettre aux Galates, ce qui nous permet de demeurer en Dieu, c’est la foi qui agit par la charité. La foi parce que personne n’a jamais vu Dieu si ce n’est le Fils. La charité parce que Dieu est amour. Et dans ces deux domaines essentiels de notre vie chrétienne, c’est l’Esprit Saint qui est notre Maître et notre Guide.

Avec frère Roger de Taizé, invoquons l’Esprit du Père et du Fils, et demandons Lui de demeurer dans la grâce de la foi et de la charité :

Esprit Saint, qui habites chaque être humain, tu viens déposer en nous ces réalités d’Évangile si essentielles : la bonté du cœur et le pardon. Aimer et l’exprimer par notre vie, aimer avec la bonté du cœur et pardonner : là tu nous donnes de trouver une des sources de la paix et de la joie. Amen.

 

 

 

 

jeudi 9 mai 2024

Ascension du Seigneur / année B

Ascension du Seigneur 2024

La première partie du temps pascal, les 40 jours entre Pâques et l’Ascension, fonde la foi de l’Eglise dans la résurrection du Seigneur. Le Ressuscité s’est manifesté uniquement à quelques personnes, ses disciples, hommes et femmes, choisis par Dieu comme l’affirme Pierre chez Corneille : Dieu l’a ressuscité le troisième jour. Il lui a donné de se manifester, non pas à tout le peuple, mais à des témoins que Dieu avait choisis d’avance.

La grande majorité des témoins du Christ ressuscité sont ses amis, Paul étant l’exception. Il ne s’est pas manifesté à ceux qui ont voulu sa mort : les grands prêtres et Pilate. Dans la plupart des cas le Ressuscité se manifeste à des personnes qui l’ont suivi, aimé et lui ont fait confiance. Aucun esprit de revanche dans le cœur du Christ qui l’aurait poussé à se montrer vivant aux autorités religieuses et civiles qui l’ont condamné à mourir sur une croix. Aucune volonté d’en mettre « plein la vue » en révélant sa victoire sur la mort aux foules par de grandes manifestations glorieuses. Les manifestations du Ressuscité sont humbles, discrètes et s’adressent en priorité à des personnes, au groupe des disciples, pas à des foules.

Le mystère de l’Ascension marque la fin de ces manifestations du Ressuscité dans l’attente de l’Esprit Saint promis par Jésus. Dans la finale de son Evangile Marc en parle avec les images suivantes : Il fut enlevé au ciel et s’assit à la droite de Dieu. Dans ce mystère c’est notre humanité qui est unie à Dieu pour toujours, assumée en lui. L’Ascension confirme ce qui a commencé avec l’Incarnation. Et l’Incarnation se prolonge et s’actualise dans le mystère de l’Eglise corps du Christ et de sa mission dans le monde. L’enlèvement de Jésus au ciel signifie un nouveau mode de présence : non plus charnel et limité à un peuple et un territoire précis, mais glorieux et universel. Après son Ascension le Christ semble absent comme Dieu lui-même est invisible, mais en fait sa présence est encore plus forte et plus puissante. Ce qui lui permet de donner cette consigne missionnaire à ses disciples au moment de l’adieu qu’il leur fait : Allez dans le monde entier. Proclamez l’Évangile à toute la création. Plus aucune limite dans cet universel de la mission puisqu’il inclue toute la création comme destinataire de la Bonne Nouvelle et pas seulement l’humanité. Saint Paul le dit à sa manière dans la deuxième lecture : Et celui qui était descendu est le même qui est monté au-dessus de tous les cieux pour remplir l’univers. Le Christ ressuscité remplit donc de sa présence l’univers dans le mystère de son Ascension et le règne de Dieu son Père et Père de tous s’exerce au-dessus de tous, par tous, et en tous. L’image de Jésus qui monte au ciel est donc trompeuse car elle pourrait nous faire croire à une grande prise de distance par rapport à notre vie humaine sur cette terre. Ce que Paul nous dit du Père de tous, de notre Père qui est aux cieux, peut nous aider à surmonter cette difficulté puisque précisément ce Père qui est aux cieux est en même temps en tous, donc proche de chacune de ses créatures. A la fois transcendant et immanent.

L’exhortation par laquelle Paul ouvre le chapitre 4 de sa lettre aux Ephésiens ne nous invite pas à nous évader au ciel mais à faire fructifier sur cette terre les trésors de la grâce divine : Je vous exhorte donc à vous conduire d’une manière digne de votre vocation : ayez beaucoup d’humilité, de douceur et de patience, supportez-vous les uns les autres avec amour ; ayez soin de garder l’unité dans l’Esprit par le lien de la paix. Comme votre vocation vous a tous appelés à une seule espérance, de même il y a un seul Corps et un seul Esprit. Il y a un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu et Père de tous, au-dessus de tous, par tous, et en tous.

Et si le mystère de l’Ascension nous appelait tout en orientant notre cœur vers les réalités du Ciel, les réalités divines et spirituelles, à accueillir ce Ciel, c’est-à-dire Dieu lui-même, sur notre terre ? Et si le Ciel, c’était de garder l’unité dans l’Esprit par le lien de la paix ?

 


dimanche 5 mai 2024

Sixième dimanche de Pâques / année B

 

Jean 15, 9-17

Les paroles particulièrement fortes que nous venons de recevoir font partie du testament nouveau que Jésus donne à ses disciples la veille de sa mort. Ce passage d’Evangile nous donne accès au cœur de la révélation chrétienne dans sa beauté et sa simplicité. Le secret de Jésus, ce qui nous permet de comprendre sa personne, sa vie et sa mission, c’est l’amour de charité qui habite son cœur. Il est le médiateur de l’amour divin : Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés. Le commandement du testament nouveau, Demeurez dans mon amour, Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés, se présente sous la forme d’un don et non pas d’un devoir. C’est dans la mesure où nous recevons la grâce de l’amour divin par Jésus que nous devenons capables de demeurer dans son amour et de le transmettre. Le Seigneur nous parle de son choix, son choix qui précède toujours et suscite de notre part une réponse de foi : Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis et établis, afin que vous alliez, que vous portiez du fruit… Nous sommes donc dans le règne de la grâce et non pas sous le régime de l’obligation. La morale chrétienne est essentiellement une morale intérieure dans le sens où elle surgit du cœur qui se laisse enflammer d’amour par l’Esprit Saint. Le testament nouveau de Jésus et l’Evangile de l’amour accomplissent parfaitement la prophétie de Jérémie : Je mettrai ma Loi au plus profond d’eux-mêmes ; je l’inscrirai sur leur cœur. Je serai leur Dieu, et ils seront mon peuple. Dans son encyclique « Dieu est amour », le pape Benoît XVI décrit bien cette intériorisation de la loi divine :

La volonté de Dieu n’est plus pour moi une volonté étrangère, que les commandements m’imposent de l’extérieur, mais elle est ma propre volonté, sur la base de l’expérience que, de fait, Dieu est plus intime à moi-même que je ne le suis à moi-même (n°17).

C’est dans ce contexte du don de la loi nouvelle inscrite dans les cœurs que Jésus qualifie la relation qu’il veut avoir avec nous du nom d’amitié. C’est le seul passage des Evangiles où il appelle ses disciples ses amis.

Je ne vous appelle plus serviteurs, car le serviteur ne sait pas ce que fait son maître ; je vous appelle mes amis, car tout ce que j’ai entendu de mon Père, je vous l’ai fait connaître.

Ce verset constitue une véritable révolution dans la conception religieuse classique de la relation entre Dieu et l’homme, Dieu étant habituellement le maître et l’homme le serviteur. Jésus établit un amour d’amitié avec nous. La relation d’amitié est tout sauf hiérarchique, elle implique au contraire l’égalité entre les amis. Si nous parvenions à prendre conscience du don magnifique qui nous est fait, notre cœur serait véritablement comblé de la joie spirituelle. Ce qui nous permet d’entrer dans cette relation d’amitié avec le Christ, c’est d’aimer comme lui nous a aimés : Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous commande. Dans la relation d’amitié authentique, il est naturel de vouloir faire plaisir à l’autre, d’aller au-devant de ses désirs. Chaque fois que nous nous aimons les uns les autres, nous sommes certains de réjouir le cœur du Christ et donc celui du Père. Chaque fois que nous sommes capables de sortir de notre égoïsme pour nous tourner vers l’autre dans un mouvement de don et d’amour, nous fortifions en nous l’homme intérieur. Nous permettons au Christ de faire de nous ses amis.