vendredi 27 avril 2007

3ème dimanche de Pâques

3ème dimanche de Pâques / C
22 avril 07
Jean 21, 1-19 (page 546)

La page évangélique de ce dimanche est magnifique. Jean nous rapporte la troisième manifestation du Ressuscité à ses disciples : nous ne sommes pas à Jérusalem mais au bord du lac de Tibériade, bien plus au nord, en Galilée. Souvenons-nous du message adressé par un jeune homme aux saintes femmes dans le tombeau vide : « Allez dire à ses disciples, et à Pierre, qu’il vous précède en Galilée ; là vous le verrez comme il vous l’a dit. » Matthieu parle d’une montagne alors que Jean situe ces retrouvailles au bord du lac. Tout avait commencé en Galilée, la première prédication du Christ, l’appel des premiers disciples, et voilà que tout s’accomplit dans cette même province. L’évènement de la Résurrection n’efface pas l’histoire, ce qui a été vécu et partagé entre le Seigneur et ses disciples. La Pâque de Jésus accomplit au contraire tout leur compagnonnage avec le Christ. En Galilée le Ressuscité retrouve ses disciples pour un nouveau départ, pour une nouvelle aventure : celle de la foi et de la mission. A partir de l’Ascension il ne sera plus visible à leurs yeux de chair. Ce que les Evangiles synoptiques placent pendant la vie publique de Jésus, la pêche miraculeuse , Jean le situe après Pâque. Cette pêche surabondante permet à Jean de reconnaître cet homme qui les rejoint au bord du lac : « C’est le Seigneur ! » Jean est toujours le premier à croire, et il entraîne Pierre à sa suite. Ce dernier toujours aussi impulsif se jette à l’eau pour rejoindre le Seigneur à la nage. La suite du récit est touchante de simplicité et d’humanité : voilà Jésus qui invite ses apôtres à partager un repas. Nous savons bien qu’un corps entré dans la gloire comme celui du Ressuscité n’a plus besoin de nourriture pour vivre. Et pourtant Jésus se plie à ce rituel humain pour rejoindre ses disciples, sans paroles, mais en partageant avec eux, gratuitement, un moment de convivialité. « Aucun des disciples n’osait lui demander : ‘Qui es-tu ?’ Ils savaient que c’était le Seigneur. » La pêche miraculeuse et le repas au bord du lac ont permis chez eux la reconnaissance de la foi. La suite de l’Evangile va nous conduire de la profession de foi à la déclaration d’amour.
Ce dialogue entre le Seigneur et Simon, fils de Jean, est très beau. Ce que Matthieu plaçait pendant la vie publique de Jésus , Jean le situe, une fois encore, après le mystère pascal. Pour Matthieu c’est la foi de Pierre qui est importante. Pour Jean c’est son amour pour le Seigneur. Jésus Ressuscité donne véritablement à Simon-Pierre sa vocation, c’est-à-dire le sens de sa vie. S’il le fait en lui posant trois questions, ce n’est pas pour le culpabiliser en lui rappelant son triple manque de foi, son triple reniement. C’est plutôt pour lui signifier que sa mission de chef de l’Eglise ne repose pas sur ses mérites mais sur la miséricorde et le pardon de son Maître et Seigneur. C’est aussi pour permettre à Pierre de réparer par l’amour ce que le manque de foi avait brisé. Les trois questions ont l’air quasiment identiques.
Seule la première comporte la précision : « Plus que ceux-ci ». Ce qui signifie que dans l’Eglise la responsabilité et le ministère doivent aller de pair avec la ferveur de l’amour : ce qui compte avant toutes choses pour un apôtre c’est son attachement sincère au Christ. Le « plus que ceux-ci » n’est pas un appel à la comparaison avec les autres mais un appel à la perfection de l’amour. D’ailleurs Pierre le comprend bien. Il ne répond pas : « Je t’aime plus que tous les autres ». Ce qui serait de l’orgueil. Sa propre expérience lui a servi de leçon. Il se souvient avoir dit à Jésus, avant l’épreuve de la Passion : « Même si tous doutent de toi et chutent, moi non ! » L’humilité est indispensable pour exercer un service dans l’Eglise : « Oui, Seigneur, je t’aime, tu le sais ».
Ceux qui ont la chance de pouvoir lire notre Evangile dans le texte grec savent que le verbe « aimer » en français traduit des expressions différentes en grec. Pour les deux premières questions, Jésus utilise le verbe « aimer » dans le sens d’ « Agapè ». Il s’agit ici de l’amour divin, l’amour même de Dieu, qui est d’abord don, gratuité. Pierre, m’aimes-tu de cet amour divin ? Pierre est devenu humble, et il répond en disant : Je t’aime, Seigneur, d’un amour d’amitié (« Philia »). A cette humilité de Pierre, Jésus répond en se mettant à son niveau lors de sa troisième question : « Simon, fils de Jean, est-ce que tu m’aimes d’un amour d’amitié ? » Et Pierre renouvelle l’expression de son amour pour le Seigneur, certes imparfaite, mais sincère et forte.
La prophétie de Jésus sur la mort de son apôtre nous montre que cet amour proclamé au bord du lac ne cessera de grandir. En gouvernant la première Eglise selon l’Esprit du Ressuscité, Pierre grandira dans sa vie de foi, d’espérance et de charité. Le Seigneur s’était contenté de son amour d’amitié pour lui faire confiance, pour lui confier une très grande mission. A la fin, au moment du martyre, cet amour d’amitié sera pleinement un amour « Agapè ». En donnant sa vie pour la foi et pour l’Eglise, Pierre, l’humble pécheur du lac, imitera l’amour même du Christ. Non pas par ses forces humaines, mais par la grâce et la vie de Jésus ressuscité en lui.
Amen

lundi 16 avril 2007

Deuxième dimanche de Pâques

Deuxième dimanche de Pâques / C
15 avril 07 (page 494)
Jean 20, 19-31

Il est toujours enrichissant de lire et de méditer la Parole de Dieu dans son contexte. Ce qui implique de ne pas isoler le texte évangélique qui nous est proposé par la liturgie dominicale…
L’Evangile de ce dimanche appartient au chapitre 20 de l’Evangile selon saint Jean. Dimanche dernier, nous avons entendu le commencement de ce chapitre. Marie de Magdala se rend au tombeau à l’aube, et annonce aux apôtres Pierre et Jean son étrange découverte : la pierre qui fermait l’entrée du tombeau a été enlevée… Puis c’est la manifestation du Ressuscité à Marie Madeleine. C’est bien la pécheresse convertie, Marie Madeleine, qui est au centre du récit pascal du quatrième Evangile. De l’aube nous passons au crépuscule du même jour, puis une semaine plus tard avec la présence de Thomas. Il y a un contraste évident entre la situation du matin et celle du soir. Marie constate que la pierre qui fermait le tombeau a été enlevée… Jésus constate que ses apôtres se sont enfermés par peur des Juifs. Ils ont verrouillé les portes du lieu où ils se trouvaient. Le tombeau de Jésus est bel et bien vide, ouvert. Et voilà que ses apôtres s’enterrent en quelque sorte, emmurés par la peur. Le ressuscité est sorti vivant du tombeau ; ses disciples s’emmurent en refusant d’affronter la vie extérieure. Le matin, Jean voit et croit. Le signe du tombeau ouvert et des linges funéraires suffit à ouvrir son cœur à l’intelligence des Ecritures. Marie Madeleine est aussi une femme de foi. Et voilà que l’absence de Thomas va introduire l’incrédulité au sein du récit de Pâques. Huit jours plus tard, le ressuscité se manifeste à nouveau dans le « tombeau de ses apôtres », car les portes sont toujours verrouillées… Ils sont toujours dans la crainte malgré la manifestation du Ressuscité et le don de l’Esprit. Le Vivant revient pour son apôtre Thomas et se manifeste à lui dans sa miséricorde et dans sa délicatesse. Pour Jean le signe du tombeau vide et des linges suffisait. Pour Thomas il en faut davantage : lui veut voir et toucher avant de croire. « Cesse d’être incrédule, sois croyant » ; « Heureux ceux qui croient sans avoir vu » : telles sont les paroles fortes qui résonnent dans la maison des apôtres, paralysés par la peur.
Et cela nous amène à lire cette page évangélique dans un contexte encore plus large. Remontons, dans le même Evangile, au chapitre 14. Les paroles du Christ sont, dans tout ce chapitre, un appel à la foi et à la confiance, une préparation au mystère pascal : « Que votre cœur ne se trouble pas : croyez en Dieu et croyez aussi en moi. […] Ne restez pas dans le trouble et dans la crainte. » Les apôtres semblent avoir tout oublié. Ils n’ont pas profité de cette préparation spirituelle que Jésus leur avait donnée avant sa Passion et sa mort en croix. Le Maître et Seigneur leur avait alors promis de ne pas les laisser orphelins, de leur envoyer l’Esprit Saint. Il leur avait même déjà donné, comme par avance, le don de Pâques pour que leurs coeurs ne se troublent pas dans le scandale de la Passion : « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix. Je ne vous la donne pas comme le monde la donne. Vous avez appris ce que je vous ai dit, que je m’en vais et je reviens vers vous. »
Le soir de Pâques, le Seigneur renouvelle ce don merveilleux de la paix spirituelle : « La paix soit avec vous ! » En ce dimanche de la divine miséricorde, relevons comment le Seigneur associe au don de l’Esprit le pouvoir de remettre les péchés. Ce pouvoir spirituel est apostolique. Et la rémission des péchés semble être comme le premier fruit, le fruit essentiel, de la victoire de Pâques. Le ministère de la réconciliation est central dans la mission de l’Eglise. Satan nous trompe et nous met dans l’illusion : c’est lorsque tu pèches que tu es vraiment libre ! C’est lorsque tu te rends indépendant de Dieu, que tu exerces ta liberté ! L’enfermement des apôtres dans leur cénacle est probablement le signe de leur péché qui est d’abord un manque de confiance en Dieu, un manque de foi. S’ils avaient été vraiment libres, ils n’auraient pas eu peur des Juifs. C’est l’Esprit qui, peu à peu, va les éduquer dans cette liberté spirituelle. Elle ira pour la plupart d’entre eux jusqu’au martyre, manifestation suprême de la liberté chrétienne.
Je conclurai en revenant sur l’absence de Thomas, le soir de Pâques. On ne nous dit pas pourquoi il était absent. En tout cas il n’était pas enfermé avec ses frères dans la maison. C’est peut-être le signe que Thomas était le seul apôtre qui n’avait pas peur ! Il ne donne pas sa foi facilement, mais il est probablement plus courageux que les autres. Bref il n’a pas que des défauts. Thomas l’incrédule ne serait-il pas aussi Thomas l’audacieux ?
Dans le corps du Christ, nous sommes des membres différents les uns des autres. Dans le souffle de l’Esprit, essayons de voir toujours en premier ce qui ouvre un chemin de liberté. Rendons grâce, sans jalousie ni rivalité, pour les dons et les talents de nos frères dans la foi, pour la variété de ces mêmes dons ! Evitons d’enfermer, d’emmurer nos frères dans le tombeau de leurs défauts et de leurs péchés. Soyons miséricordieux comme Jésus est miséricordieux pour chacun d’entre nous. Respectons le rythme de nos frères, acceptons avec patience ce que nous considérons comme leurs lenteurs. Et surtout redisons au ressuscité notre acte de foi :
« Jésus, j’ai confiance en toi ! »
Amen

dimanche 8 avril 2007

Dimanche de Pâques

Pâques
8 avril 07 (page 433)
Jean 20, 1-9

« Et voici que Dieu a ressuscité Jésus le troisième jour. Il lui a donné de se montrer, non pas à tout le peuple, mais seulement aux témoins que Dieu avait choisis d’avance, à nous qui avons mangé et bu avec lui après sa résurrection d’entre les morts. » Nous venons d’entendre ces paroles de Pierre dans la première lecture. Cependant, pour la fête des fêtes, Pâques, l’Eglise n’a pas choisi comme Evangile une manifestation du Ressuscité à ses disciples… Chaque année nous entendons l’Evangile du tombeau ouvert et vide en saint Jean.
Alors que la nuit se transforme lentement en jour, Marie Madeleine se rend au tombeau. Contrairement aux Evangiles de Marc et de Luc, Jean ne nous dit pas le but de sa visite. Il est suivi sur ce point par Matthieu. Les deux autres évangélistes sont clairs. Ecoutons la version de Marc : « Une fois terminé le sabbat, Marie de Magdala, Marie, mère de Jacques, et Salomé achetèrent des parfums afin d’embaumer le corps. » Dans le quatrième Evangile nous ne savons donc pas ce qui pousse Marie Madeleine à se rendre au tombeau de si bonne heure. A propos de Marie, relevons deux choses : c’est une femme et une ancienne pécheresse. Et c’est elle qui, la première, va constater que la grosse pierre qui ferme l’entrée du tombeau a été roulée : bref le tombeau est ouvert ! C’est curieux mais Jean ne nous dit pas que Marie a été voir l’intérieur du sépulcre. Elle retourne immédiatement en arrière pour annoncer la nouvelle à deux Apôtres : Pierre, et l’autre disciple, celui que Jésus aimait : « On a enlevé le Seigneur de son tombeau, et nous ne savons pas où on l’a mis. » Marie parle de Jésus comme Seigneur, elle lui donne ainsi le titre divin. Elle n’annonce pas du tout la résurrection aux apôtres, elle parle tout simplement d’un enlèvement, d’un vol de cadavre.
Et voilà que Pierre et Jean se mettent, eux aussi, à courir, mais dans l’autre sens, pour constater ce que Marie vient de leur annoncer. Après le signe du tombeau ouvert, Jean, le plus rapide, découvre le signe des linges funéraires. Jean a couru plus vite certainement parce que son amour pour Jésus était le plus fort. Il est le disciple aimé du Seigneur. « Cependant il n’entre pas. » Il laisse la préséance à Pierre, celui que Jésus a choisi pour être le chef de son Eglise. Pierre, lui aussi, voit les linges, et c’est alors que l’autre disciple entre dans le sépulcre vide. Et là c’est comme un espèce d’éclair, une illumination subite : « Il vit et il crut. » Le signe du linceul ouvre à Jean l’univers de la foi en la Résurrection. Et à ce deuxième signe s’en ajoute un troisième, celui de l’Ecriture, selon laquelle « il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts. » En fait la Parole de Dieu était le premier signe, mais il a fallu les deux autres pour que tout s’illumine d’un seul coup. Si la résurrection du Seigneur est un objet de foi, j’y reviendrai, la Bible ne prend tout son sens que dans la foi au Seigneur Jésus. C’est ce que Paul affirme aux Corinthiens :
« Les pensées des Israélites se sont endurcies. Car jusqu’au jour d’aujourd’hui, lors de la lecture de l’ancienne Alliance, le même voile demeure sans qu’il y ait dévoilement, parce que c’est en Christ qu’il est aboli. Mais jusqu’à ce jour, chaque fois qu’on lit Moïse, un voile est posé sur leur cœur. C’est quand on se tourne vers le Seigneur que le voile est enlevé. »
Je conclurai en insistant sur le fait suivant : il n’y a pas de preuves et il n’y aura jamais de preuves de la Résurrection du Seigneur. L’Evangile de cette liturgie montre tous les signes que Dieu a destiné aux premiers témoins de Pâques : le tombeau vide, les linges funéraires soigneusement rangés, et la Sainte Ecriture elle-même. Au matin de Pâques, Marie, Pierre et Jean ne découvrent pas la plénitude de la vie ou une manifestation éclatante du Ressuscité. Ils découvrent plutôt une absence, un vide. Oui, le tombeau est bien vide, donc inutile. Jean, pour le moment, n’a pas vu le Seigneur ressuscité. Ce n’est qu’après que viendront les manifestations du ressuscité aux saintes femmes et aux apôtres. Il n’a vu que des signes, et pourtant il croit.
Nous aussi nous croyons en la résurrection du Seigneur, non pas comme en un simple symbole, mais comme en une réalité. Le crucifié, enseveli au tombeau, est vraiment ressuscité d’entre les morts par la puissance du Père et l’amour de l’Esprit. Pâques n’est pas une allégorie, un mythe ou une légende qui nous consolerait de notre condition mortelle et finie… Pâques est véritablement le centre et le pivot de notre histoire humaine. Jésus, le Vivant, se révèle à nous dans l’Apocalypse comme le commencement et la fin, l’Alpha et l’Oméga. Avec saint Paul, nous savons que si le Christ n’est pas ressuscité, alors notre foi est vaine : c’est-à-dire inutile et vide. « Si c’est pour cette vie seulement que nous avons mis notre espoir dans le Christ, nous sommes les plus misérables de tous les hommes. » Oui, nous sommes bien à plaindre dans ce cas-là ! Nous n’avons plus les signes du tombeau ouvert et des linges. Notre foi de Pâques s’appuie donc sur un double témoignage : celui des Ecritures et celui des Apôtres, toujours vivant dans notre Eglise. Depuis 2000 ans, la foi pascale a véritablement déplacé des montagnes. L’histoire de l’Eglise est d’abord une histoire de sainteté, même si elle a traversé des zones d’ombre. Les saints sont les meilleurs témoins de la force du ressuscité à l’œuvre dans notre existence et dans l’histoire de notre humanité. Si vraiment nous croyons en Jésus ressuscité, alors nous pouvons être certains que Dieu fera des merveilles dans notre vie et pour la vie éternelle.
Amen

mercredi 4 avril 2007

Dimanche des rameaux et de la Passion

Dimanche des Rameaux et de la Passion / année C
Premier avril 2007 (page 302)

Cette année nous avons entendu le récit de l’entrée triomphale de Jésus à Jérusalem dans la version qu’en donne saint Luc. Le troisième évangéliste est original à bien des égards. Lui se contente de parler des manteaux et ne mentionne pas les rameaux ! Avec saint Luc nous devrions donc parler du dimanche des Manteaux ou des vêtements pour suivre la traduction liturgique… Mais le plus important n’est pas là. Ecoutons plutôt la foule des disciples : « Déjà Jésus arrivait à la descente du mont des Oliviers, quand toute la foule des disciples, remplie de joie, se mit à louer Dieu à pleine voix pour tous les miracles qu’ils avaient vus : ‘Béni soit celui qui vient, lui, notre Roi, au nom du Seigneur. Paix dans le ciel et gloire au plus haut des cieux !’ » La louange des disciples nous rappelle le chant du Sanctus qui clôt la Préface et ouvre la Prière eucharistique. Mais comment ne pas penser ici au récit de la Nativité ? Le jour de l’entrée triomphale du Christ dans la ville sainte, les disciples reprennent presque mot à mot le chant des anges dans la nuit de la Nativité : « Gloire à Dieu dans les cieux, et sur la terre paix aux hommes, car il les prend en grâce » . Le contexte de la Nativité est aussi celui de la joie pour tout le peuple. De la nuit de Bethléem à l’entrée triomphale dans Jérusalem, la louange divine passe des anges à la foule des disciples… Car si eux se taisent, « les pierres crieront » ! La paix proclamée passe de la terre au ciel. Relevons le motif de cette louange divine : « pour tout les miracles qu’ils avaient vus ». Jean précise même que c’est à cause de la réanimation de Lazare que la foule acclame Jésus comme son Roi. Dans la deuxième lecture, ce magnifique passage de la lettre de Paul aux Philippiens, nous retrouvons ces réalités du ciel et de la terre : « C’est pourquoi Dieu a élevé Jésus au-dessus de tout ; il lui a conféré le Nom qui surpasse tous les noms, afin qu’au Nom de Jésus, aux cieux, sur terre et dans l’abîme, tout être vivant tombe à genoux, et que toute langue proclame : ‘Jésus Christ est le Seigneur’, pour la gloire de Dieu le Père. » Cet homme qui entre à Jérusalem sur un petit âne n’est pas seulement le Roi d’Israël, il est le Sauveur, il est le Fils de Dieu : vraiment homme et vraiment Dieu ! Le paradoxe est que pour comprendre cela il faudra l’abaissement volontaire de la Passion et de la mort en croix. Luc a une expression qui pourrait presque nous choquer à la fin de son récit de la Passion : « Et tous les gens qui s’étaient rassemblés pour ce spectacle, voyant ce qui était arrivé, s’en retournaient en se frappant la poitrine. » La Passion serait-elle un spectacle ? Les personnes qui étendaient leurs vêtements sur le chemin louaient Dieu dans la joie « pour tous les miracles qu’ils avaient vus ». Ils confessaient en Jésus leur Roi. Et si la Passion était le plus grand miracle du Christ ? Le plus spectaculaire, justement ? Celui de son abaissement volontaire, de sa victoire définitive sur le mal et notre péché… Un Dieu qui consent à mourir pour nous offrir la vie en abondance ! Ceux qui ont contemplé le spectacle de la Passion n’honorent pas Jésus en jetant leurs manteaux à terre. Ils l’honorent en se frappant la poitrine. Le spectacle de la Passion nous conduit en effet à nous reconnaître pécheurs, et à reconnaître dans cet homme humilié, torturé, mort, bien plus qu’un Roi : le Sauveur, le Seigneur !
Que cette liturgie des Rameaux et de la Passion nous introduise dans une connaissance toujours plus vraie et plus intérieure du Christ notre Sauveur ! Puissions-nous tomber à genoux et confesser la divinité du Christ ! Ne lui offrons pas des choses extérieures, des vêtements ou des rameaux : offrons-lui plutôt notre cœur brisé et contrit. Demandons-lui de changer notre coeur de pierre en un cœur de chair. Tout au long de cette grande semaine sainte, laissons jaillir au plus profond de nous-mêmes l’Amour divin, laissons toute la place à l’Esprit du Seigneur.
Amen