dimanche 27 juillet 2008

17ème dimanche du temps ordinaire

17ème dimanche du temps ordinaire / A
27/07/08
Matthieu 13, 44-52 / page 206
Nous poursuivons en ce dimanche notre lecture du chapitre 13 de l’Evangile selon saint Matthieu, le chapitre des paraboles du Royaume des Cieux. L’Evangile de cette liturgie offre à notre méditation les trois dernières paraboles, à la fin du chapitre 13.
Celles du trésor et de la perle vont ensemble, alors que celle du filet est à part. Les deux petites paraboles du trésor et de la perle s’appliquent au Royaume de Dieu déjà présent aujourd’hui, alors que la parabole du filet concerne la fin du monde, c’est-à-dire l’accomplissement du Royaume lorsque le Christ reviendra dans sa gloire pour juger les vivants et les morts.
Je me limiterai en ce dimanche aux deux petites paraboles du trésor et de la perle qui, malgré leur similitude, présentent aussi des nuances intéressantes pour nous.
Chez Matthieu le Royaume des Cieux signifie tout simplement le Royaume de Dieu, c’est-à-dire sa présence et son action au milieu de nous par et dans le Christ. Le Royaume des Cieux signifie que Dieu vient nous sauver et nous réconcilier avec Lui. Ce Royaume est donc l’expression très concrète de son amour miséricordieux à notre égard. Le Royaume est l’accomplissement parfait des prophéties qui annonçaient une création nouvelle : l’homme peut désormais recevoir un cœur nouveau, un cœur de chair grâce au don de l’Esprit.
Voyons maintenant quel enseignement nous pouvons retirer de ces deux paraboles jumelles.
La présence de Dieu est d’abord comparée à « un trésor caché dans un champ. » Rien d’étonnant à cela puisque Dieu est le Bien suprême. Mais ce Bien n’est pas évident puisqu’il est d’ordre spirituel et non matériel, il est donc en quelque sorte caché. Déjà Isaïe avait annoncé le Dieu caché : « Vraiment tu es un Dieu qui se cache, Dieu d’Israël, Sauveur ! » Et comment ne pas penser ici à saint Paul qui reprend à plusieurs reprises dans ses lettres ce thème ? Par exemple dans la lettre aux Ephésiens lorsqu’il affirme que le plan mystérieux du salut est « caché depuis toujours en Dieu, créateur de l’univers. » L’homme de notre parabole découvre le trésor caché comme par hasard, sans le chercher, et c’est là une différence avec le négociant qui recherche des perles. Nous savons bien que du point de vue de Dieu le hasard n’existe pas. Seuls existent sa Providence et sa grâce : « quand les hommes aiment Dieu, lui-même fait tout contribuer à leur bien. » Tous les récits de conversion anciens et nouveaux témoignent de ce que le Royaume de Dieu peut surgir dans une vie de manière imprévue et subite. Oui, c’est vraiment Dieu qui, le premier, nous a aimés ! Dans notre parabole le signe du Royaume c’est la joie ! Voilà le grand trésor qui manque tant à beaucoup de nos contemporains saturés de bien matériels mais toujours insatisfaits et au fond tristes. La joie ne peut venir de notre portefeuille. Elle est un don de l’Esprit, une disposition qui nous fait reconnaître avec gratitude tout ce que nous recevons de Dieu et des autres et surtout ce que nous sommes. Il ne suffit pas d’être riche et d’être propriétaire pour être heureux… Il faut encore savoir apprécier autant les biens matériels que les biens spirituels à leur juste valeur. C’est cela qui donne la joie. La surabondance nous prive bien souvent de cette joie par laquelle nous savons apprécier tout ce dont nous sommes comblés… Le scandale du gaspillage en est une preuve évidente. Si notre homme découvre le trésor sans l’avoir cherché, il agit tout de même pour jouir de ce trésor : il vend tout ce qu’il possède ! Cela signifie que nous ne pouvons pas connaître la joie de Dieu sans renoncements et sans sacrifice. Cela nous ramène au mystère de la Croix. Si le Royaume de Dieu est réellement le Bien suprême pour nous, alors nous devons être prêts à faire les bons choix dans notre vie et à écarter tout ce qui nous sépare de ce Royaume.
Quelques mots pour terminer à propos de la parabole de la perle. Il y a un point commun avec la parabole précédente. La perle de grande valeur est un trésor et l’homme vend tout ce qu’il possède pour en jouir. Il y aussi une différence. L’homme découvrait le trésor caché dans le champ. Ici nous avons affaire à « un négociant qui recherche des perles fines. » Cette parabole met davantage l’accent sur la part de l’homme, sur la liberté humaine, dans la découverte du Royaume de Dieu présent au milieu de nous. Elle est une invitation à faire de notre vie tout entière, et ce jusqu’à notre mort, une recherche de Dieu. Même si nous sommes déjà chrétiens, n’imaginons pas pour autant être parvenus au but !

dimanche 6 juillet 2008

14ème dimanche du temps ordinaire

14ème dimanche du TO / A
6 juillet 08
Matthieu 11, 25-30 (p.56)
La première partie de ce magnifique passage évangélique, la prière de louange que Jésus adresse à son Père, se retrouve aussi chez saint Luc. Mais seul saint Matthieu nous rapporte cet appel si touchant de Notre Seigneur : « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi, je vous procurerai le repos. »
La prière de louange de Jésus, le début de l’Evangile de ce dimanche, nous révèle l’union étroite qui existe entre le Fils dans sa condition humaine et le Père. C’est donc une prière trinitaire même si l’Esprit Saint n’est pas mentionné. Dieu notre Père en envoyant son Fils bien aimé parmi nous lui confie tout : Il lui donne tout ce qui est nécessaire pour l’accomplissement de sa mission de salut. Jésus ressuscité le rappellera à ses apôtres avant leur ultime envoi en mission et avant la séparation physique de l’Ascension : « Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre. » Dans sa prière Jésus souligne que la connaissance parfaite entre le Père et le Fils est le privilège de la vie trinitaire. Nous ne pouvons connaître le Fils que par révélation. Souvenez-vous du commentaire que Jésus donne à la profession de foi de Pierre : « Ce n’est pas la chair et le sang qui te l’ont révélé, mais mon Père qui est dans les cieux. » Et de la même manière nous ne pouvons pas connaître Dieu notre Père sans passer par son Fils. C’est dire à quel point notre foi chrétienne qui a pour objet principal la connaissance du mystère de Dieu Trinité est un don, une grâce, une révélation de l’Esprit Saint… Et c’est alors que la parole de Jésus prend encore plus de relief. Car elle nous dit ce qui attire la grâce de Dieu et au contraire ce qui peut l’éloigner de nous : « Ce que tu as caché aux sages et aux savants, tu l’as révélé aux tout petits. » Nous pourrions avoir une mauvaise interprétation de ces propos merveilleux : Jésus nous encouragerait à avoir la foi du charbonnier, à être des chrétiens fidéistes, excluant leur intelligence et leur raison de l’acte de croire… Par « sages et savants » nous devons comprendre ceux qui à cause de leur grande science sont tombés dans la tentation de l’orgueil et de la superbe. Oui, Dieu demeure un Dieu caché pour les orgueilleux et les suffisants. Si nous voulons vraiment accueillir en nous la révélation du mystère trinitaire, nous devons faire partie de ces tout petits, c’est-à-dire cultiver sans cesse la vertu d’humilité et la considérer comme la vertu reine dans notre chemin de foi et dans notre union à Dieu. C’est l’occasion de rappeler ici que le vrai savant, le vrai intellectuel est humble, car il a fait l’expérience décrite par Pascal dans ses Pensées :
« Les sciences ont deux extrémités qui se touchent, la première est la pure ignorance naturelle où se trouvent tous les hommes en naissant, l’autre extrémité est celle où arrivent les grandes âmes qui, ayant parcouru tout ce que les hommes peuvent savoir, trouvent qu’ils ne savent rien et se rencontrent en cette même ignorance d’où ils étaient partis, mais c’est une ignorance savante qui se connaît. » (81 / 299)
Nous pourrions méditer longuement la seconde partie de notre Evangile, propre à Matthieu. Jésus s’identifie pleinement aux tout petits dont nous venons de parler car il vit lui-même son humanité dans la douceur et l’humilité. Jésus a un cœur compatissant, et à ce titre il donne en priorité son amour à ceux qui peinent sous le poids du fardeau. Son attitude est opposée à celle des spécialistes de la religion juive, les sages et les savants. Notre Seigneur en parlera avec clairvoyance dans le même Evangile : Les maîtres de la Loi et les Pharisiens « préparent de lourdes charges, et ils vous les mettent sur les épaules ; mais eux-mêmes ne bougeraient pas un doigt pour les remuer. » Jésus, lui, a pris librement sur ses épaules le fardeau de la Croix, et ce jusqu’à la mort. Il l’a pris non pas pour nous accabler, pour nous rendre la vie plus dure ou difficile. Non, son joug est facile à porter et son fardeau léger. Que signifie tout cela pour nous ? Jésus ne vient pas supprimer notre fardeau. Nous savons bien qu’ici-bas nous ne vivons pas au Paradis, et même si notre terre n’est pas toujours une vallée de larmes, elle est pour nous le lieu de bien des combats, de bien des difficultés… Bref les fardeaux ne manquent pas au cours d’une existence terrestre. Jésus vient les porter avec nous. Il est avec nous jusqu’à la fin des temps. Ce sont sa présence et son amour qui peuvent rendre nos fardeaux plus légers, plus supportables. Le Seigneur seul peut nous donner la force surnaturelle de son Esprit dans les épreuves. Les martyres en sont l’illustration la plus évidente. Alors comment pouvons-nous répondre à l’appel si doux de notre Maître ? « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau… » Comment pouvons-nous recevoir ce repos promis par le Seigneur au milieu même de nos épreuves ? Je vois deux moyens essentiels. Le premier est la prière. Quelle chance avons-nous de pouvoir parler à Dieu « comme un ami parle à un ami ou un serviteur à son seigneur » ! (saint Ignace de Loyola). Il y a des réalités de notre vie que nous ne pouvons parfois confier qu’au Seigneur dans la prière. Le deuxième moyen est le sacrement du pardon. Le poids de la culpabilité peut être énorme. Quelle merveille que ce sacrement par lequel le Christ Vivant vient alléger notre fardeau en nous réconciliant avec le Père ! Ce sacrement est vraiment avec la prière l’un des grands privilèges des enfants de Dieu, une consolation certaine pour tout ceux qui peinent sous le poids du fardeau.
Amen