Le mot « Trinité »
n’est pas un mot biblique. Vous ne le trouverez pas dans le Nouveau Testament.
Ce que l’on trouve dans le Nouveau Testament, c’est la mention du Père, du Fils
et de l’Esprit comme dans l’Evangile de ce dimanche : Allez ! De toutes
les nations faites des disciples : baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et
du Saint-Esprit.
Dans la seconde lettre de saint
Paul aux Corinthiens l’apôtre utilise une formule trinitaire pour conclure sa
lettre, formule reprise dans la liturgie au début de la messe : Que la
grâce du Seigneur Jésus Christ, l’amour de Dieu et la communion du Saint-Esprit
soient avec vous tous.
Ce n’est qu’après la Pentecôte
que les premiers disciples ont pu accueillir pleinement le mystère du Christ
mort et ressuscité. Le don de l’Esprit était donc nécessaire pour que leur foi
en Jésus soit affermie. Ce n’est qu’après la réflexion des grands conciles des
4ème et 5ème siècle que le mystère de Dieu Trinité a pu
être accueilli pleinement dans la première Eglise. Le mot Trinité a donc été
conçu par la Tradition en s’appuyant sur la révélation de Jésus. Ce mot affirme
en même temps les trois personnes divines (Tri-) et leur unité. A l’époque du
Christ il existait bien dans la religion romaine traditionnelle une triade,
celle de Jupiter, Junon et Minerve qui avait son temple sur le Capitole à Rome.
Mais ces trois divinités ne constituaient pas pour autant une Trinité. Il
s’agissait bien de trois dieux et pas d’un dieu unique. De la même manière la
lecture chrétienne de l’Ancien Testament a laissé entrevoir des préfigurations
de la Trinité mais c’est uniquement par le mystère de l’incarnation, par la
personne, la vie et l’enseignement de Jésus que Dieu se révèle à l’humanité
comme Trinité. En ce sens la vision trinitaire de Dieu est une nouveauté
radicale que ce soit par rapport aux triades païennes ou au monothéisme strict
du Judaïsme. C’est d’ailleurs l’un des motifs essentiels de la condamnation à
mort du Christ. C’est parce qu’il a témoigné de la relation unique qui
l’unissait à son Père que Jésus a été condamné comme un blasphémateur, un homme
qui prétendait être l’égal de Dieu. La révélation trinitaire est inséparable de
la révélation selon laquelle Dieu est Amour. Cela signifie que l’être des
personnes divines se définit par les relations qu’elles entretiennent entre
elles. Le monothéisme trinitaire met au cœur de Dieu la relation et des
relations d’amour. C’est par un don réciproque que les personnes divines
existent au sein de la Trinité. Dieu n’est pas un être solitaire, un monarque
absolu qui se complaît en lui-même et qui veut dominer. Il est essentiellement
don d’amour, tourné vers un autre, donc ouverture infinie. Le Père, le Fils et
l’Esprit tiennent leur être propre de la relation et du don dans l’échange
d’amour et de vie au sein de la Trinité. Maurice Zundel est probablement l’un
des penseurs chrétiens qui a le mieux saisi ce grand mystère de la sainte
Trinité. Je lui laisse donc la parole : L’immense majorité des
chrétiens ne sont pas des mystiques, ils ne sont pas entrés dans une union
nuptiale avec Dieu. La plupart des chrétiens ne comprennent pas cette égalité dans
l’amour, ils sont encore tributaires d’une conception juridique : ils
songent à ce qu’ils ont à donner à Dieu et ce qu’ils peuvent garder pour
eux-mêmes. Ils voient en Dieu un pouvoir dont ils dépendent, un pouvoir qui les
domine ou qui les menace, qui éventuellement pourra les sauver, mais non pas un
amour qui les sollicite sans s’imposer jamais, un amour qui s’offre toujours,
mais qui ne s’impose jamais. Ils ne voient pas que ce qui importe
essentiellement c’est le don de la personne à la personne, que le seul bien
c’est cela. Le bien, c’est le don que nous sommes. Le mal, c’est le refus que
nous devenons. Dieu ne peut que s’offrir, mais jamais il ne peut nous
contraindre, c’est pourquoi il a l’air si souvent absent, absent parce que nous
le sommes. Ce n’est jamais Dieu qui se refuse, c’est toujours l’homme : la
maison dont les volets sont clos en plein jour est encore dans la nuit. Et ce
n’est pas la faute du soleil. Le Dieu qui transparaît en Jésus-Christ est un
Dieu essentiellement nouveau. Il ne s’agit plus d’affirmer une formule, il
s’agit de la vivre, il s’agit de comprendre que ce message jaillit du fond de
l’humanité du Christ vers la nôtre et qu’il nous concerne essentiellement. Être
humble, être grand c’est la même chose.
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