dimanche 13 août 2023

19ème dimanche du temps ordinaire / année A

 


19ème dimanche du TO/A

13/08/2023

1 Rois 19, 9-13

Dans l’Evangile de ce dimanche saint Matthieu nous montre Jésus en prière dans la solitude et le silence de la nuit : Quand il les eut renvoyées, il gravit la montagne, à l’écart, pour prier. Le soir venu, il était là, seul. Dans la première lecture Elie se trouve lui aussi sur une montagne, dans la solitude, pour y passer la nuit. Le premier livre des Rois nous présente la confrontation entre le prophète Elie et le roi Akab et sa femme Jézabel. Elie ne supporte pas qu’Israël soit tombé dans l’idolâtrie. Il provoque un défi religieux entre lui et les 450 prophètes de Baal sur le mont Carmel. Il en sort victorieux et égorge les 450 prophètes ! Autant dire que dans son zèle religieux pour le Dieu unique il a oublié le commandement du même Dieu qui interdit de tuer son prochain ! A l’issue de ce défi la foi d’Elie nous apparaît comme celle d’un fanatique religieux prêt à tuer tous ceux qui ne pensent pas comme lui. C’est alors qu’il est contraint de s’enfuir au désert pour échapper à la colère de Jézabel. Là il tombe dans une profonde dépression : Quant à lui, il marcha toute une journée dans le désert. Il vint s’asseoir à l’ombre d’un buisson, et demanda la mort en disant : « Maintenant, Seigneur, c’en est trop ! Reprends ma vie : je ne vaux pas mieux que mes pères. » Mais Dieu envoie son ange pour le réconforter et au terme d’une marche de 40 jours et 40 nuits il parvient à la montagne de Dieu, l’Horeb. Là il entend l’appel de Dieu : Que fais-tu ici, Elie ? Appel qui se répètera après l’expérience spirituelle que le prophète va faire sur la montagne. A cette question de Dieu il répond ainsi : J’éprouve une ardeur jalouse pour toi, Seigneur, Dieu de l’univers. Les fils d’Israël ont abandonné ton Alliance, renversé tes autels, et tué tes prophètes par l’épée ; moi, je suis le seul à être resté et ils cherchent à prendre ma vie. Ardeur jalouse, indignation, passion furieuse, zèle jaloux selon les différentes traductions. Sur la montagne Dieu va transformer la foi fanatique de son prophète en lui faisant faire l’expérience spirituelle de sa présence. Le Dieu qu’Elie prétend défendre (comme si le Dieu tout puissant avait besoin qu’on le défende !), y compris par la violence, ne se trouve pas dans la violence des éléments naturels (ouragan, tremblement de terre, feu) mais bien dans le murmure d’une brise légère. La traduction de la bible Bayard donne un bruit de fin silence. La transformation d’Elie s’opère dans et par le silence. Dans toutes les règles monastiques le silence tient une place importante car il favorise la rencontre avec Dieu dans la prière. Cette expérience spirituelle n’est pas réservée aux moines et aux moniales. Tout chrétien à la suite d’Elie et de Jésus est appelé à faire l’expérience de la présence de Dieu dans le murmure d’une brise légère.

Au festival d’Avignon j’ai vu un très beau spectacle du russe Ivan Viripaev, OVNI. Dans cette pièce de théâtre des personnes racontent comment une expérience spirituelle a pu bouleverser leur vie. L’une d’elle, Artiom Goussev, partage son expérience, tellement proche de celle d’Elie. Voici des extraits de son témoignage :

Et tout d’un coup un tel silence inexplicablement infini s’est installé à l’intérieur de moi. Je n’ai jamais, jamais ni avant, ni après, plus jamais entendu, si on peut s’exprimer ainsi, ni vu et ni entendu un tel silence… C’était un tel silence qu’en dehors de lui il n’y avait rien… J’ai commencé à être tellement bien. Je ne peux même pas vous expliquer à quel point j’ai commencé à être bien… Un silence dans lequel j’étais très très bien. Parce que moi-même j’étais ce silence. Tout s’est comme qui dirait tu en moi… Et j’ai alors compris que tout notre problème réside dans le fait que nous faisons en permanence du bruit… Nous parlons, nous débattons, nous réfléchissons, nous avons un tas de pensées dans la tête, et il y a du bruit tout le temps, et nous sommes tout le temps dans ce bruit. Et jamais, nous ne restons dans le silence… Nous ne l’avons jamais entendu, ce silence… Ce silence est dans tout, il existe dans tout, et en nous il existe aussi, seulement nous ne pouvons pas y accéder à cause de ce bruit permanent… J’ai passé une dizaine de minutes dans ce silence. Et pour la seule fois dans ma vie je me suis vraiment reposé… Et là maintenant je pense que si chaque jour nous nous trouvions dans ce silence ne serait-ce qu’une minute, le monde serait complètement différent. Tout pourrait réellement changer. A propos, désormais, je médite tous les matins, je reste assis comme ça une vingtaine de minutes et j’écoute le silence.[1]



[1] Ivan Viripaev, Théâtre 2013-2020, pages 22.23


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