dimanche 11 mars 2007

Troisième dimanche de Carême

3ème dimanche de Carême / C
11 mars 2007
Luc 13, 1-9 (page 131)

Dimanche dernier nous contemplions avec les Apôtres le plus beau des enfants de l’homme, dans le mystère de sa Transfiguration. Nous avons tous vécu des moments de grâce dans notre vie chrétienne, des moments de joie profonde et de paix intense en présence du Seigneur. Et comme Pierre, il nous est alors arrivé de dire : « Comme il est beau que nous soyons ici ! ». Nous aurions voulu transformer ces instants fugitifs en une éternité de bonheur !
L’Evangile de ce dimanche nous secoue quelque peu. Il nous rappelle à quel point notre spiritualité de chrétiens doit être incarnée. Sur notre chemin de Carême voilà que la redoutable question du mal vient nous empêcher de rêvasser ou de nous endormir. A l’époque de Jésus pas de journal télévisé, mais les nouvelles vont vite, par la voix de la parole : « Des gens vinrent rapporter à Jésus l’affaire des Galiléens… ». Le pouvoir politique de l’époque, représenté par Pilate, vient de mater durement un groupe de Galiléens. La réaction du gouverneur romain était-elle juste ou injuste ? Là n’est pas la question. Simplement nous avons affaire à un événement qui nous montre le mal à l’œuvre dans les vicissitudes de notre histoire humaine. Que de massacres, que de violence, que de tortures et de barbarie depuis que l’homme est homme ! Jésus ne fait pas une analyse politique de cet évènement, mais il essaie de l’interpréter avec la lumière qui vient de Dieu. Son interprétation théologique remet en question la doctrine très répandue chez les Juifs de la rétribution divine : Dieu récompense les justes et punit les méchants. Dès l’Ancien Testament, cette doctrine est mise à mal par des livres de sagesse comme Job et Qohélet. « Pensez-vous que ces Galiléens étaient de plus grands pécheurs que tous les autres Galiléens pour avoir subi un tel sort ? Eh bien non, je vous le dis. » Beaucoup de nos contemporains n’ont pas évolué par rapport aux Juifs du temps de Jésus. En témoigne l’expression encore fort répandue : « Qu’est-ce que j’ai fait au bon Dieu pour mériter cela ? » Instinctivement nous interprétons l’épreuve comme un châtiment divin. Et Jésus d’ajouter lui-même un autre exemple : celui des personnes tuées par la chute d’une tour. Cet exemple illustre le mal qui est à l’œuvre dans ce que nous appelons les accidents, dont beaucoup ont lieu sur la route, la plupart du temps à cause de l’inconscience des conducteurs. Mon expérience de prêtre me montre à quel point un décès considéré comme injuste éloigne beaucoup de personnes de Dieu, et cela souvent pour de longues années. Cela resurgit parfois lors des rencontres avec les futurs mariés.
Si ces manifestations du mal, souvent absurdes et aveugles, ne sont pas des châtiments de Dieu ? Comment, alors, leur donner un sens ? Ont-elles un sens ? « Si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous comme eux. » Le Seigneur nous invite à vivre nos épreuves et celles de nos proches comme des signes des temps, comme des appels à nous remettre en question, comme des piqûres nous sortant de notre anesthésie spirituelle. Une piqûre ça peut faire mal, mais son but est bien de guérir ou d’améliorer notre santé. Nous le savons bien, Dieu peut toujours tirer d’un mal un bien. Confrontés à l’épreuve, ne nous épuisons pas dans une révolte stérile, mais humblement, essayons de nous remettre en question, et de nous rapprocher ainsi de Dieu.
La petite parabole du figuier illustre ce que devrait être notre conversion. Nous bénéficions de la patience de Dieu parce que Dieu est Amour et miséricorde. Jusqu’au moment inconnu de notre mort, nous pouvons nous retourner vers le Seigneur. Simplement se retourner vers le Seigneur n’est pas une démarche purement spirituelle. Il s’agit bien ici de produire des fruits exprimant notre conversion. La foi, nous le savons, ne va pas sans les œuvres. L’Evangile de ce dimanche est un appel à un examen de conscience approfondi de notre part. Non pas dans la terreur, mais dans la certitude que Dieu veut notre bonheur et que nous avons le pouvoir exorbitant de lui faire plaisir par nos petits ou grands progrès dans la vie de foi, d’espérance et de charité. Nous pourrions, par exemple, examiner les fruits que nous portons à partir des sept péchés capitaux : l’orgueil, la gourmandise, la luxure, l’avarice, la jalousie, la colère et la paresse.
Je conclurai en citant saint Paul qui veut nous garder dans l’humilité et la prudence propres aux disciples du Christ :
« Celui qui se croit solide, qu’il fasse attention à ne pas tomber. »
Amen

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