Saints
Pierre et Paul 2024
Dans son étude consacrée au
phénomène de société qu’est devenu le tatouage[1],
le père Bertrand Monnier développe une réflexion intéressante sur le charisme
propre aux deux apôtres que nous fêtons en ce dimanche :
Dans l’histoire de l’Eglise
chrétienne, deux grandes tendances se sont ouvertes dès les premières années du
christianisme avec les deux piliers que sont saint Pierre et saint Paul. […]
Les deux piliers de l’Eglise chrétienne déploient deux dynamiques
complémentaires : une dynamique structurelle (Pierre) et une dynamique
missionnaire (Paul). Saint Pierre assure la construction d’une Eglise, avec un
héritage bien particulier qui est devenu une tradition… Tout cela est organisé
pour accompagner les communautés chrétiennes de manière efficace tant sur le
plan matériel que spirituel. Et, conjointement à cela, la dynamique missionnaire
de saint Paul a pour but d’annoncer la foi chrétienne à ceux qui ne la
connaissent pas encore (ou qui ne la connaissent plus). C’est une dynamique
d’aventure et d’ouverture aux autres cultures. […] Saint Pierre et saint Paul
se sont querellés à propos de la manière de devenir chrétien. Puisque Jésus
était juif, il était nécessaire pour saint Pierre que les païens se
convertissent d’abord au judaïsme avant de devenir chrétiens. Mais pour saint
Paul, il devait être possible pour les païens de devenir directement chrétiens,
sans passer par les pratiques juives. […] Dans une société où le christianisme est « exculturé »,
il est très compréhensible que la majorité des pratiquants se retrouvent dans
le courant pétrinien. Il est plus rassurant, en effet, dans ce genre de
situation, de rester « entre soi » autour de codes et de langages
déjà connus. Cependant, cette situation a engendré un grand déséquilibre à la
fin du 20ème siècle car le manque d’ouverture sur les autres
cultures contemporaines a creusé un écart entre les communautés chrétiennes et
les nouveaux courants plus actuels. Ainsi, tout ce qui procède de la culture
contemporaine est largement ignoré des communautés chrétiennes. Cet écart
culturel est la première et principale cause du déficit de vocations sacerdotales,
et le manque de prêtres a élargi plus encore le fossé culturel puisque ces
derniers n’ont pas pu faire autrement que d’assurer la mission pétrinienne en
priorité afin de répondre aux besoins rituels immédiats.
Les apôtres Pierre et Paul ont
donc reçu de Dieu deux charismes différents et complémentaires, tous les deux
nécessaires pour que l’Eglise et les chrétiens puissent accomplir leur mission
dans le monde d’aujourd’hui, tellement différent de celui de la première Eglise
où la grande majorité des citoyens de l’Empire romain étaient religieux,
polythéistes ou monothéistes. Quand les deux apôtres exhortent les chrétiens à
vivre l’Evangile dans le concret de la vie ils se rejoignent. Et c’est cette
harmonie de pensée que je voudrais mettre en valeur en guise d’ouverture. Je
vous recommande la méditation du chapitre 12 de la lettre aux Romains, un chef
d’œuvre de l’apôtre Paul. En voici un très beau passage que je cite ici de
manière développée :
Que
votre amour soit sans hypocrisie. Fuyez le mal avec horreur, attachez-vous au
bien. Soyez unis les uns aux autres par l’affection fraternelle, rivalisez de
respect les uns pour les autres. Ne ralentissez pas votre élan, restez dans la
ferveur de l’Esprit, servez le Seigneur, ayez la joie de l’espérance, tenez bon
dans l’épreuve, soyez assidus à la prière. Partagez avec les fidèles qui sont
dans le besoin, pratiquez l’hospitalité avec empressement. Bénissez ceux qui
vous persécutent ; souhaitez-leur du bien, et non pas du mal. Soyez joyeux avec
ceux qui sont dans la joie, pleurez avec ceux qui pleurent. Soyez bien d’accord
les uns avec les autres ; n’ayez pas le goût des grandeurs, mais laissez-vous
attirer par ce qui est humble. Ne vous fiez pas à votre propre jugement. Ne
rendez à personne le mal pour le mal, appliquez-vous à bien agir aux yeux de
tous les hommes. Autant que possible, pour ce qui dépend de vous, vivez en paix
avec tous les hommes. Bien-aimés, ne vous faites pas justice vous-mêmes. […]
Mais
si ton ennemi a faim, donne-lui à manger ; s’il a soif, donne-lui à boire. […]
Ne te laisse pas vaincre par le mal, mais sois vainqueur du mal par le bien.
A
cette exhortation de Paul répond de manière parfaite celle de Pierre dans sa
première lettre :
Vous tous, enfin, vivez en parfait accord, dans la sympathie,
l’amour fraternel, la compassion et l’esprit d’humilité. Ne rendez pas le mal
pour le mal, ni l’insulte pour l’insulte ; au contraire, invoquez sur les
autres la bénédiction, car c’est à cela que vous avez été appelés, afin de
recevoir en héritage cette bénédiction. […] Honorez dans vos cœurs la sainteté
du Seigneur, le Christ. Soyez prêts à tout moment à présenter une défense
devant quiconque vous demande de rendre raison de l’espérance qui est en vous ;
mais faites-le avec douceur et respect. Ayez une conscience droite, afin que
vos adversaires soient pris de honte sur le point même où ils disent du mal de
vous pour la bonne conduite que vous avez dans le Christ. (chapitre 3)
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