mardi 10 avril 2012

DIMANCHE DE PAQUES

« Si le Christ n’a pas été relevé, vide alors est notre proclamation, vide aussi votre foi » : cette affirmation de l’apôtre Paul aux chrétiens de Corinthe nous montre que la résurrection du Seigneur est le fondement de toute notre foi et de notre vie dans le Christ. Pour préparer cette homélie j’ai relu dans les Evangiles tous les récits de Pâques. Si la résurrection est tellement importante pour nous, il est très intéressant de voir quel est le témoignage des Evangiles sur cet événement unique dans l’histoire de notre humanité. Il y a bien sûr des différences et des ressemblances entre les 4 Evangiles et l’on constate que Matthieu et Marc suivent une même tradition alors que Luc et Jean mettent l’accent sur d’autres aspects du mystère pascal. Un premier fait que nous risquons de passer sous silence est le suivant : aucun Evangile ne nous décrit le moment de la résurrection. Tous nous parlent de ce qui s’est passé après cet instant et pendant les 40 jours qui ont séparé Pâques de l’Ascension. L’événement en lui-même échappe donc aux yeux des hommes. Il reste enveloppé dans son caractère totalement transcendant, insaisissable pour nous. Par sa résurrection le Seigneur Jésus, nouvel Adam, inaugure une création nouvelle. De même qu’il n’y a eu, c’est évident, aucun témoin humain de l’instant où Dieu a commencé à créer l’univers et tout ce qu’il contient, de la même manière aucun témoin n’a vu Jésus sortir vivant du tombeau. Les saintes femmes, dont Marie de Magdala, sont les premières à se rendre au tombeau de bon matin le dimanche. Non pas parce qu’elles espèrent voir Jésus vivant… Elles viennent pour achever la toilette funéraire du cadavre avec des aromates, elles viennent embaumer le corps dans un dernier acte de fidélité et d’amour envers leur Maître. Et quand Marie Madeleine découvre le tombeau ouvert et vide, son premier réflexe est de penser que l’on a enlevé le corps du Seigneur. Si le tombeau est vide les femmes y rencontrent des êtres que les Evangiles nomment tour à tour l’ange du Seigneur, un jeune homme, deux hommes. La résurrection du Seigneur se manifeste donc d’abord en négatif par le signe du tombeau vide, par une absence : celle du corps torturé de Jésus devenu cadavre dans l’obscurité de la mort. Ces personnages rencontrés dans la tombe rassurent les femmes : « Soyez sans crainte ». Ils sont les premiers à leur délivrer le message de Pâques : « Il n’est pas ici, il s’est relevé. Pourquoi cherchez-vous le Vivant parmi les morts ? » Si Jésus n’est plus ici, alors il faut changer de lieu pour le trouver : c’est en Galilée que les messagers envoient les femmes, « c’est là que vous le verrez », et auprès des disciples pour qu’elles leur annoncent la nouvelle. Les Evangiles soulignent que les disciples ont refusé de croire, ils étaient loin d’être des illuminés crédules. Et même après avoir vu Jésus ils demeuraient dans le doute… Saint Jean nous les montre retourner à leur travail de pêcheurs en Galilée comme si rien ne s’était passé ! Un seul fait exception : l’apôtre Jean pour lequel la vision du tombeau vide suffit : « Il vit et il crut ». Après la découverte du tombeau vide le Seigneur ressuscité s’est manifesté à Marie Madeleine et aux apôtres ainsi qu’aux disciples d’Emmaüs. Dans la plupart des cas ils ne reconnaissent pas Jésus immédiatement : « leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître ». Et Marie prend même le ressuscité pour un jardinier ! Jésus ressuscité est donc à la fois le même et à la fois autre dans son apparence physique. Etant glorifié dans son corps il a la possibilité de se montrer à ses disciples « sous une forme différente ». Il se manifeste dans la pièce où sont enfermés les disciples alors que les portes sont fermées et sans frapper à la porte ! En même temps il n’est pas un pur esprit et pour en convaincre ses disciples il mange un morceau de poisson grillé. Si le moment de la résurrection a échappé aux regards humains, on peut dire de la même manière que le Ressuscité échappe à ce qui est de l’ordre de la seule expérience humaine. Un corps glorifié ne peut rentrer dans les cases de notre analyse rationnelle et de notre perception habituelle. D’ailleurs lorsque Marie Madeleine se saisit du corps ressuscité de son Seigneur pour lui signifier tout son attachement il lui répond : « Cesse de me toucher ». Et lorsque les disciples d’Emmaüs reconnaissent enfin la présence de Jésus au moment où il rompt le pain, il disparaît de devant eux. Jésus ressuscité se manifeste librement pour susciter la foi de ses disciples mais il refuse de se laisser posséder par eux. Jésus ressuscité, vrai Dieu et vrai homme, est transcendant, donc insaisissable. Les récits de Pâques nous montrent clairement pourquoi il se manifeste aux disciples : pour les envoyer en mission dans le monde entier : Allez ! Et à Pierre il répète : Suis-moi ! C’est en étant témoins de Jésus mort et ressuscité qu’ils le rencontreront dans leur vie. Jésus leur donne sa paix et son Esprit. Il se manifeste à eux non pas pour leur donner une présence sensible et permanente mais pour susciter leur foi : « Heureux ceux qui croient sans voir ». Parce qu’il est le Fils de Dieu Jésus Ressuscité est toujours à la fois présent et absent, ici et ailleurs. La foi ne nous permet pas de mettre la main sur lui mais nous invite à le rencontrer dans la Galilée de nos vies, là où il nous précède toujours. A la fin de l’Evangile selon saint Matthieu il nous fait cette merveilleuse promesse : « Moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde ».

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