lundi 18 juin 2007

11ème dimanche du temps ordinaire

11ème dimanche du TO/C
17 juin 07
Luc 7,36-8,3 (page 1065)

Pendant les trois années de son ministère public, le Seigneur Jésus a participé à de nombreux repas. Saint Luc nous rapporte au chapitre 5 de son Evangile le repas chez Lévi. Le collecteur d’impôts a entendu l’appel du Maître et l’a immédiatement suivi pour être son disciple. Ce repas avec les collecteurs d’impôts va susciter une vive réaction de la part des pharisiens et des maîtres de la Loi : « Comment pouvez-vous manger et boire avec les collecteurs de l’impôt et les pécheurs ? » Au regard de la loi juive, l’attitude de Jésus est proprement scandaleuse, car on ne mélange pas les torchons et les serviettes, le pur et l’impur. Manger avec quelqu’un, c’est en quelque sorte communier avec lui. Si Jésus mange avec les pécheurs et les publicains, il se rend impur car il approuve alors leur vie et leur attitude… Nous connaissons bien la réponse du Seigneur : « Les biens portants n’ont pas besoin du médecin, il est pour les malades. Ce ne sont pas les justes que je viens appeler à la conversion, mais les pécheurs ». Deux logiques s’affrontent ici : celle de la Parole de Dieu faite chair en Jésus, celle de l’incarnation d’une part, et d’autre part celle de la pureté légale. Les repas sont pour Jésus des lieux d’évangélisation. Lui qui a rappelé au Tentateur que l’homme ne vit pas seulement de pain, il mange, certes, parce qu’il est vraiment homme et qu’il en a besoin pour vivre. Il mange aussi pour, au cours de ces repas, partager aux hommes le pain de la Parole de Dieu. Juste avant notre Evangile de ce dimanche, ce débat sur les repas du Christ revient. Et c’est le Seigneur lui-même qui y fait allusion : « Rappelez-vous Jean : il ne mangeait pas de pain, il ne buvait pas de vin, et quand il est venu on a dit : ‘Il a un démon’. Et puis vient le Fils de l’homme qui mange et qui boit, et l’on dit : ‘Voilà un mangeur et un buveur de vin, un ami des collecteurs de l’impôt et des pécheurs !’ » Toujours dans la logique de l’incarnation, le Seigneur choisira, au cours du dernier repas, le pain et le vin pour en faire les signes sacramentels de sa présence parmi nous, les moyens de notre communion avec lui. Et notons bien que le repas sacré du jeudi saint est étroitement lié au pardon des péchés : « Buvez-en tous ; ceci est mon sang, le sang de l’alliance, qui est versé pour une multitude, pour le pardon des péchés . » Ce qui nous conduit directement à l’évangile de cette liturgie.
Jésus n’a pas mangé que chez les pécheurs et les publicains… Dans notre page évangélique, il accepte l’invitation de Simon le pharisien. Et chez saint Luc nous avons deux autres épisodes où nous voyons Jésus manger à la table des pharisiens. Jésus est vraiment venu pour tous, sans aucune exception, et il le montre par son attitude très ouverte et très libre. Tous, d’une manière ou d’une autre, nous sommes malades du péché, même le pharisien Simon qui s’estime juste. C’est le premier enseignement de notre Evangile, éclairé par la deuxième lecture. Et c’est l’apparition inattendue de la femme, son attitude envers Jésus, qui va révéler le péché de Simon. Sa réflexion intérieure en dit long sur le chemin qu’il a encore à parcourir pour passer de la justice de la loi à la miséricorde du Seigneur : « Si cet homme était prophète, il saurait qui est cette femme qui le touche, et ce qu’elle est : une pécheresse. » La religion de Simon est manichéenne : d’un côté il y a les bons, de l’autre les méchants. Son péché, c’est le jugement qui enferme une personne, une créature de Dieu dans son attitude extérieure contraire à la loi. C’est une pécheresse ! Il n’y a aucun appel possible dans ce jugement qui est déjà une condamnation. Au chapitre 6 de son évangile, Luc nous rapporte des paroles du Seigneur très importantes et que nous devons réentendre dans ce contexte : « Ne jugez pas et vous ne serez pas jugés. Ne condamnez pas et vous ne serez pas condamnés. Pardonnez, et l’on vous pardonnera. Donnez, et l’on vous donnera. […] Car on utilisera pour vous la même mesure que vous utilisez. » Ces derniers jours, j’ai lu la biographie d’un prêtre suisse, un grand auteur spirituel, Maurice Zundel. Ceux qui l’on fréquenté s’accordent tous pour dire que jamais ils ne l’ont entendu émettre une parole de médisance ou de jugement sur son prochain. C’est là le signe certain de sa sainteté de vie ! Nous ressemblons bien souvent à Simon, car c’est notre pente naturelle de critiquer autrui au lieu de l’aimer. Cet amour du prochain inclue la compréhension et le pardon. Et surtout la capacité de voir d’abord ce qu’il y a de bon en chaque personne.
Le deuxième grand enseignement de cet Evangile, c’est le lien entre amour et pardon, foi et salut. Cette femme, dont nous ne connaissons pas le nom, en est l’icône vivante. « Si ses péchés, ses nombreux péchés, sont pardonnés, c’est à cause de son grand amour. Mais celui à qui on pardonne peu montre peu d’amour. » Entre l’amour et le pardon, c’est un peu l’histoire de la poule et de l’œuf… On ne sait jamais ce qui vient en premier. Une chose est certaine : pour faire intérieurement l’expérience de l’amour de Dieu et de l’amour pour Dieu, nous devons faire l’expérience de sa miséricorde et de son pardon. De ce point de vue là, la femme pécheresse est plus avancée que Simon le pharisien. Même les grands saints qui ne commettaient que des péchés très véniels ont reconnu leurs péchés, c’est-à-dire leur besoin d’être sauvés. Nous avons, nous aussi, à entendre dans notre vie ces paroles de Jésus : « Ta foi t’a sauvé. Va en paix ! » Nous les entendons chaque fois que nous nous confessons avec une véritable contrition, contrition représentée par les larmes de la femme. Nous les entendons chaque fois que nous nous engageons à réparer nos fautes par le don de nous-mêmes, réparation représentée par le vase précieux plein de parfum, répandu sur les pieds du Seigneur.
Amen

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