dimanche 11 décembre 2022

Troisième dimanche de l'Avent / année A

 

Desiderio desideravi, lettre apostolique du pape François (3)

11/12/2022

En ce troisième dimanche de l’Avent j’achève ma présentation de la lettre du pape François consacrée à la formation liturgique du peuple de Dieu avec le dernier chapitre intitulé ars celebrandi. Au n°48 le pape fait le lien entre l’art de célébrer et l’univers symbolique propre à la liturgie :

L’ars celebrandi, l’art de célébrer, est certainement l’une des façons de prendre soin des symboles de la liturgie et de croître dans une compréhension vitale de ceux-ci… L’ars celebrandi ne peut être réduit à la simple observation d’un système de rubriques, et il faut encore moins le considérer comme une créativité imaginative – parfois sauvage – sans règles. Le rite est en soi une norme, et la norme n’est jamais une fin en soi, mais elle est toujours au service d’une réalité supérieure qu’elle entend protéger.

Le mot art permet au pape de développer la métaphore selon laquelle les sujets de la célébration chrétienne sont comparables à des artistes. De la même manière que les chrétiens sont formés par la liturgie, ainsi le véritable artiste ne possède pas un art, mais il est possédé par lui (50). Au n°51 le pape nous met en garde contre une tentation quand on aborde l’art de célébrer :

En parlant de ce thème, nous sommes enclins à penser qu’il ne concerne que les ministres ordonnés qui exercent le service de la présidence. Mais en fait, il s’agit d’une attitude que tous les baptisés sont appelés à vivre. Je pense à tous les gestes et à toutes les paroles qui appartiennent à l’assemblée : se rassembler, marcher en procession, s’asseoir, se tenir debout, s’agenouiller, chanter, se taire, acclamer, regarder, écouter.

A propos des gestes des membres de l’assemblée eucharistique le pape montre leur importance pour notre intériorité, les gestes extérieurs du corps façonnant notre spiritualité :

Ce sont des gestes et des paroles qui mettent de l’ordre dans notre monde intérieur en nous faisant vivre certains sentiments, attitudes, comportements (51).

Au n°52 le pape François place le silence parmi les gestes rituels et en souligne l’importance :

Parmi les gestes rituels qui appartiennent à l’ensemble de l’assemblée, le silence occupe une place d’importance absolue. Bien souvent, il est expressément prescrit dans les rubriques. Toute la célébration eucharistique est immergée dans le silence qui précède son début et qui marque chaque moment de son déroulement rituel…Le silence liturgique est le symbole de la présence et de l’action de l’Esprit Saint qui anime toute l’action de la célébration. C’est pourquoi il constitue un point d’arrivée dans une séquence liturgique… Nous sommes appelés à accomplir avec un soin extrême le geste symbolique du silence. À travers lui, l’Esprit nous donne forme.

Au n°53 le pape revient sur l’importance des gestes avec l’exemple de l’agenouillement :

Aussi l’agenouillement doit être fait avec art, c’est-à-dire avec une pleine conscience de son sens symbolique et du besoin que nous avons de ce geste pour exprimer notre manière d’être en présence du Seigneur.

Si l’ars celebrandi concerne toute l’assemblée, il est également vrai que les ministres ordonnés doivent y porter une attention toute particulière (54)… Il y aurait beaucoup à dire sur l’importance et la délicatesse de la présidence de la célébration eucharistique (55). Au n°56 le pape introduit ainsi le rôle de président de l’assemblée que le prêtre assume dans la célébration :

Le prêtre vit sa participation caractéristique à la célébration en vertu du don reçu dans le sacrement de l’Ordre, et celle-ci s’exprime précisément dans la présidence. Comme tous les rôles qu’il est appelé à remplir, il ne s’agit pas en premier lieu d’un devoir qui lui est assigné par la communauté, mais plutôt d’une conséquence de l’effusion de l’Esprit Saint reçue lors de l’ordination, qui le rend apte à une telle tâche. Le prêtre aussi est formé par le fait qu’il préside l’assemblée qui célèbre.

 

Le prêtre rend présent le Seigneur ressuscité au milieu de l’assemblée réunie au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit :

 

Pour que ce service soit bien fait – et même avec art ! – il est d’une importance fondamentale que le prêtre ait tout d’abord une conscience aiguë d’être, par la miséricorde de Dieu, une présence particulière du Seigneur ressuscité. Le ministre ordonné est lui-même l’un des modes de présence du Seigneur qui rendent l’assemblée chrétienne unique, différente de toute autre assemblée (cf. Sacrosanctum Concilium, n.7). Ce fait donne une profondeur sacramentelle – au sens large – à tous les gestes et paroles de celui qui préside (57).

 

Au n°57, le pape utilise une magnifique expression pour caractériser le rôle de médiateur du prêtre dans la célébration :

 

C’est comme s’il était placé au milieu entre le cœur brûlant de l’amour de Jésus et le cœur de chaque croyant, objet de son amour. Présider l’Eucharistie, c’est être plongé dans la fournaise de l’amour de Dieu.

 

La norme liturgique ultime, la règle suprême, ne provient pas de l’extérieur, ou même de l’autorité de l’Eglise, mais bien de la réalité même du sacrement de l’eucharistie, réalité assimilée et intériorisée autant par les membres de l’assemblée que par celui qui la préside au nom du Seigneur :

La norme la plus élevée, et donc la plus exigeante, est la réalité même de la célébration eucharistique, qui sélectionne les mots, les gestes, les sentiments qui nous feront comprendre si notre usage de ceux-ci est ou non à la hauteur de la réalité qu’ils servent. Il est évident que cela ne s’improvise pas. C’est un art. Cela demande de la part du prêtre de l’application, un entretien assidu du feu de l’amour du Seigneur qu’il est venu allumer sur la terre (cf. Luc 12,49).

 

Au n°60 le pape dessine les contours de la spiritualité sacerdotale s’incarnant dans la célébration de la messe :

 

C’est la célébration elle-même qui éduque le prêtre à ce niveau et à cette qualité de présidence. Il ne s’agit pas, je le répète, d’une adhésion mentale, même si tout notre esprit ainsi que toute notre sensibilité doivent y être engagés. Ainsi, le prêtre se forme en présidant les paroles et les gestes que la liturgie met sur ses lèvres et dans ses mains.

Il n’est pas assis sur un trône car le Seigneur règne avec l’humilité de celui qui sert.

Il ne détourne pas l’attention de la centralité de l’autel, symbole du Christ, car c’est de son côté transpercé qu’il laissa couler l’eau et le sang, source des sacrements de l’Église et le centre de notre louange et de notre action de grâce

En s’approchant de l’autel pour l’offrande, le prêtre est éduqué à l’humilité et à la contrition par les paroles : « Le cœur humble et contrit, nous te supplions, Seigneur, accueille-nous : que notre sacrifice, en ce jour, trouve grâce devant toi, Seigneur notre Dieu ». 

Il ne peut pas compter sur lui-même pour le ministère qui lui est confié, car la liturgie l’invite à prier pour être purifié par le signe de l’eau, lorsqu’il dit : « Lave-moi de mes fautes, Seigneur, et purifie-moi de mon péché »…

À cette offrande, il participe par l’offrande de lui-même. Le prêtre ne peut pas raconter la Cène au Père sans y participer lui-même. Il ne peut pas dire : « Prenez, et mangez-en tous : ceci est mon Corps livré pour vous », et ne pas vivre le même désir d’offrir son propre corps, sa propre vie, pour le peuple qui lui est confié. C’est ce qui se passe dans l’exercice de son ministère.

De tout cela et de beaucoup d’autres choses, le prêtre est continuellement formé par l’action célébrative.

 

Ecoutons maintenant la conclusion que le pape donne à sa lettre :

 

De dimanche en dimanche, la parole du Seigneur ressuscité illumine notre existence, en voulant atteindre en nous la fin pour laquelle elle a été envoyée. (Cf. Isaïe 55,10-11) De dimanche en dimanche, la communion au Corps et au Sang du Christ veut faire de notre vie aussi un sacrifice agréable au Père, dans la communion fraternelle du partage, de l’hospitalité, du service. De dimanche en dimanche, l’énergie du Pain rompu nous soutient dans l’annonce de l’Évangile dans lequel se manifeste l’authenticité de notre célébration

Abandonnons nos polémiques pour écouter ensemble ce que l’Esprit dit à l’Eglise. Sauvegardons notre communion. Continuons à nous émerveiller de la beauté de la liturgie. La Pâque nous a été donnée. Laissons-nous protéger par le désir que le Seigneur continue d’avoir de manger sa Pâque avec nous. Sous le regard de Marie, Mère de l’Eglise (65).

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