dimanche 7 septembre 2014

23ème dimanche du temps ordinaire

Matthieu 18, 15-20

7/09/14

L’Evangile de ce dimanche nous parle de la présence du mal à l’intérieur de l’Eglise. L’Eglise est sainte mais elle rassemble en son sein un peuple de pécheurs en marche vers la sainteté. Les conseils de Jésus ont pour but de nous rendre solidaires les uns des autres. Nous devons nous aider à atteindre la sainteté qui est notre vocation commune. C’est dans ce contexte qu’il nous faut pratiquer la correction fraternelle. Certaines expressions peuvent nous sembler dures : Si le pécheur « refuse encore d’écouter l’Eglise, considère-le comme un païen et un publicain ». J’y reviendrai mais je voudrais dans un premier temps prendre de la hauteur pour mieux comprendre la portée de cet Evangile. En fait c’est la relation entre l’Eglise-communauté et la personne qui est au cœur de cet enseignement de Jésus. La plupart des religions ont un aspect communautaire et un aspect personnel. Cela signifie que c’est ensemble et de manière personnelle que l’on recherche Dieu, qu’on le prie, qu’on lui voue un culte. Il suffit de connaître l’histoire du christianisme pour savoir que l’accent s’est déplacé au cours des siècles. En schématisant à l’extrême on peut dire que jusqu’à la Renaissance l’aspect communautaire a prévalu. La pratique de la religion, soutenue et imposée par l’autorité civile, était une pratique sociale. Si bien qu’en théorie la grande majorité de la population était chrétienne. A partir du 16ème siècle et surtout à partir de la révolution française la religion se privatise au fur et à mesure ou pour le dire d’une manière plus positive elle s’intériorise : ce qui est mis en avant c’est la relation personnelle du croyant avec Dieu. Cela correspond bien sûr à la séparation des Eglises et de l’Etat, à ce que nous appelons la laïcité. L’un des problèmes essentiels de l’Islam aujourd’hui consiste précisément dans l’affirmation communautaire de la pratique religieuse aux dépens de la relation personnelle du croyant avec Dieu. D’où la volonté d’imposer la théocratie, c’est-à-dire un système dans lequel l’Etat et la religion se confondent sans laisser aucun espace de liberté à la conscience personnelle. Comprise ainsi la théocratie n’est en fait qu’une dictature religieuse utilisant, comme toute dictature, la violence, la contrainte et la peur pour obtenir de la population un consensus purement extérieur.
Je reviens maintenant à notre Evangile qui exige que nous le comprenions, comme toujours, en lien avec d’autres enseignements de Jésus. Il serait facile de voir une contradiction entre la pratique de la correction fraternelle et l’image de la paille et de la poutre employée dans le même Evangile :
« Ne jugez pas, pour ne pas être jugés ; de la manière dont vous jugez, vous serez jugés ; de la mesure dont vous mesurez, on vous mesurera. Quoi ! Tu regardes la paille dans l’œil de ton frère ; et la poutre qui est dans ton œil, tu ne la remarques pas ? Ou encore : Comment vas-tu dire à ton frère : “Laisse-moi enlever la paille de ton œil”, alors qu’il y a une poutre dans ton œil à toi ? Hypocrite ! Enlève d’abord la poutre de ton œil ; alors tu verras clair pour enlever la paille qui est dans l’œil de ton frère.

Ou encore de relever le contraste entre la sévérité de Jésus, demandant de considérer le pécheur refusant de se convertir comme un païen et un publicain, et sa propre attitude faite de bienveillance et de miséricorde à l’égard des pécheurs :

Comme Jésus était à table à la maison, voici que beaucoup de publicains et beaucoup de pécheurs vinrent prendre place avec lui et ses disciples. Voyant cela, les pharisiens disaient à ses disciples : « Pourquoi votre maître mange-t-il avec les publicains et les pécheurs ? » Jésus, qui avait entendu, déclara : « Ce ne sont pas les gens bien portants qui ont besoin du médecin, mais les malades. Allez apprendre ce que signifie : Je veux la miséricorde, non le sacrifice. En effet, je ne suis pas venu appeler des justes, mais des pécheurs. »

Cette mise en perspective des textes les uns avec les autres nous interdit d’emblée d’avoir une interprétation fanatique de la correction fraternelle. Aider mon prochain à devenir meilleur et à changer ne peut pas se faire sans amour ni patience, et encore moins en niant la dignité de sa conscience. Cela suppose en moi une grande humilité. Le concile Vatican II a donné une belle définition de la conscience : « Le centre le plus secret de l’homme, le sanctuaire où il est seul avec Dieu et où sa voix se fait entendre ». L’Eglise a justement pour mission d’éclairer et de former la conscience des fidèles en particulier par l’enseignement de la morale. Jésus ne précise pas de quel type de péché il s’agit. Mais on peut supposer que la correction fraternelle concerne surtout les péchés qui portent atteinte à la vie de la communauté, à sa communion et à son unité. D’où l’utilisation en cas de nécessité absolue de l’excommunication. Après avoir fait son travail de formation l’Eglise, comme le confesseur, renvoie toujours le fidèle à sa propre conscience, donc à l’usage de sa liberté qui est un don de Dieu. L’Eglise en tant que communauté comme le chrétien de manière personnelle doivent toujours se souvenir de l’exhortation de saint Paul dans sa lettre aux Romains :

Ne prenez pas pour modèle le monde présent, mais transformez-vous en renouvelant votre façon de penser pour discerner quelle est la volonté de Dieu : ce qui est bon, ce qui est capable de lui plaire, ce qui est parfait.





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