Matthieu 25, 14-30
15/11/20
La
parabole de ce dimanche suit dans l’Evangile selon saint Matthieu celle
entendue dimanche dernier : les vierges sages et les vierges folles. Le
contexte est le même : celui de la fin des temps et de la venue du Christ
en gloire appelée parousie. A la place des vierges nous avons trois serviteurs
représentant en fait des groupes de personnes. Le maître de la parabole, c’est
Jésus.
C’est comme un homme qui partait en voyage :
il appela ses serviteurs et leur confia ses biens.
Au jour
de l’Ascension on peut dire que Jésus « est parti en voyage » et qu’à
la Pentecôte il nous a confié ses biens : l’Eglise, les sacrements et
surtout le bien le plus précieux l’Esprit Saint. Nul ne connaît la date du
retour du Christ. La parabole signale simplement :
Longtemps après, le maître de ces serviteurs
revint et il leur demanda des comptes.
Le temps
de l’Eglise, entre l’Ascension et la parousie, celui dans lequel nous vivons
notre existence humaine, est celui d’un Dieu discret, d’un Dieu qui
n’intervient pas de manière visible dans le cours de l’histoire humaine. Bien
souvent, nous qui sommes croyants, vivons ce temps comme celui de l’absence de
Dieu, comme un temps d’épreuve pour notre foi. La parabole nous enseigne que ce
« long voyage » du Seigneur n’est pas de sa part un abandon puisqu’il
nous confie ses biens. Depuis le jour de l’Ascension le Seigneur s’est en
quelque sorte retiré pour nous donner un espace de liberté. Il est présent avec
nous chaque jour, mais sa présence n’est ni écrasante ni d’ordre sensible. Le
Ressuscité monté aux cieux nous fait confiance et nous laisse libres d’agir en
nous confiant ses dons. Deux serviteurs sur trois ont fait fructifier les
talents reçus. Leur foi s’est montrée active par la charité et ses œuvres. Pour
eux le retour de leur maître est un jour de joie, ils n’ont rien à craindre de
lui car ils ont fait leur devoir malgré son absence : entre dans la joie de ton seigneur.
Par
contre le troisième serviteur n’est pas prêt lors du retour de son maître. Il
n’a pas travaillé. Il n’a pas su bien utiliser les dons de son maître. Quelle
est donc la différence essentielle entre ce serviteur mauvais, paresseux, et
les autres ? L’idée qu’il se fait de son maître :
Seigneur, je savais que tu es un homme dur :
tu moissonnes là où tu n’as pas semé, tu ramasses là où tu n’as pas répandu le
grain. J’ai eu peur, et je suis allé cacher ton talent dans la terre. Le voici.
Tu as ce qui t’appartient.
Combien de chrétiens se font une fausse
représentation de Dieu ? Au lieu de voir en lui un bon maître et un Père
miséricordieux, ils se représentent un juge dur, impitoyable et exigeant. Jésus
est tout sauf un maître dur. La fausse conception de Dieu du troisième
serviteur l’a conduit très logiquement à la peur. Et il est bien connu que la
peur paralyse et empêche d’agir. Ce mauvais serviteur nous rappelle par bien
des aspects Adam dans le jardin d’Eden, Adam qui avec Eve a intériorisé l’image
de Dieu que le serpent avait mise dans le cœur de la première femme : un
Dieu jaloux de ses privilèges qui veut maintenir ses créatures dans
l’ignorance, Dieu sait que, le jour où
vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront, et vous serez comme des dieux,
connaissant le bien et le mal. Ce Dieu terrible fait en effet peur et n’inspire
pas la confiance : J’ai entendu ta
voix dans le jardin, j’ai pris peur parce que je suis nu, et je me suis caché.
Cette parabole nous demande donc de purifier,
d’évangéliser la représentation que nous nous faisons de Dieu et de Jésus afin
d’être vraiment libres et de pouvoir agir selon le bien. Il ne suffit pas en
effet de croire en Dieu, encore faut-il lui faire confiance et nous abandonner
à lui en disant de tout notre cœur : que
ton règne vienne, que ta volonté soit faite. Tant que Dieu nous fera peur
et nous apparaitra comme un mauvais maître nous ne pourrons pas être de bons
serviteurs. Les serviteurs sont le plus souvent à l’image de leur maître. Pour
pouvoir accueillir le Christ lors de sa parousie et travailler selon sa
volonté, nous avons besoin de voir en lui l’homme au cœur humble et doux, nous
avons besoin de l’amour qui seul peut nous unir à lui. Ce qui manquait à ce
serviteur, c’est la conviction libératrice de saint Jean :
Voici
comment l’amour atteint, chez nous, sa perfection : avoir de l’assurance au
jour du jugement ; comme Jésus, en effet, nous ne manquons pas d’assurance en
ce monde. Il n’y a pas de crainte dans l’amour, l’amour parfait bannit la
crainte ; car la crainte implique un châtiment, et celui qui reste dans la
crainte n’a pas atteint la perfection de l’amour.
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