dimanche 26 avril 2009

Troisième dimanche de Pâques

3ème dimanche de Pâques / B
26/04/09
Luc 24, 35-48 (p. 537)
Par sa Passion, sa mort et sa résurrection, Jésus-Christ accomplit toutes les Ecritures. C’est ainsi que nous pourrions résumer le message théologique de l’Evangile et de la première lecture.
Au chapitre 24 de son Evangile, saint Luc nous présente à deux reprises Jésus comme l’exégète des Ecritures de l’Ancienne Alliance, c’est-à-dire comme Celui qui en donne la juste et véritable interprétation. Avant le passage évangélique de ce dimanche, nous avons le récit des disciples d’Emmaüs, comme nous le rappelle l’introduction de ce même passage. Souvenons-nous de ce que le Ressuscité avait dit, chemin faisant, aux deux disciples déçus et découragés : « Hommes sans intelligence, cœurs lents à croire ce qu’ont dit les prophètes ! Le Messie ne devait-il pas souffrir pour entrer dans sa gloire ? Et il leur fit l’interprétation de ce qui le concernait dans toutes les Ecritures, en commençant par Moïse et ensuite tous les prophètes. » Et c’est exactement la même leçon que le Ressuscité donne aux Apôtres dans notre Evangile : « Il fallait que s’accomplisse tout ce qui a été écrit de moi dans la loi de Moïse, les prophètes et les psaumes. Alors il leur ouvrit l’esprit à l’intelligence des Ecritures. Il conclut : c’est bien ce qui était annoncé par l’Ecriture… » Le message du Ressuscité nous aide, nous aussi, à mieux entrer dans le mystère de la Bible comme révélation progressive de Dieu et de son amour envers nous. Tout ce que nous nommons l’Ancien Testament n’a de sens qu’à la lumière du mystère de Pâques. Ou pour le dire autrement les Ecritures témoignent de l’attente du Messie. Elles sont orientées vers le Christ. Et c’est lui, et lui seul, qui leur donne leur portée et leur valeur définitive. C’est cela « accomplir les Ecritures », les mener à leur terme et leur perfection. Et nous savons que la perfection de la Loi, c’est l’amour. Le Ressuscité montre dans son enseignement que sa Passion, sa mort et sa résurrection étaient du point de vue des Ecritures une nécessité : Il fallait que… Ce n’est pas seulement le hasard des circonstances qui a conduit Jésus à mourir comme un criminel sur le bois de la Croix, mais bien un dessein de salut et de révélation de la part de Dieu. Dans l’Ancien Testament, nous le savons si nous l’avons un peu fréquenté, des pages sublimes côtoient des passages barbares, des événements et des enseignements qui nous semblent indignes de Dieu et de l’homme, sans parler de certaines incohérences ou contradictions. Seule la notion d’accomplissement par le Christ nous permet de comprendre qu’il s’agit en fait d’une pédagogie divine. Je laisse sur ce point la parole à Maurice Zundel qui a beaucoup réfléchi à l’articulation entre les Ecritures de l’Ancienne et de la Nouvelle Alliance : « C’est dans cette lumière christique qu’il est absolument nécessaire de relire la Bible. D’ailleurs, la Bible est un sacrement. Ce n’est pas un livre, c’est quelqu’un. Et l’Imitation le dit d’une manière admirable lorsqu’elle parle du banquet eucharistique et du banquet des Ecritures car, dans l’un et l’autre, on reçoit le Verbe de Dieu qui est Jésus. Le véritable sens des Ecritures, c’est Jésus. Et ce livre est une personne, et il faut le lire comme la confidence d’une mère qui raconte comment elle s’est adaptée à des barbares, à des sauvages, à des primitifs, comment elle s’est adaptée à des progressants, puis qui allait plus loin, à des êtres qui commençaient à aimer, qui allait plus loin encore, jusqu’à ce qu’enfin éclate la pleine lumière, le plein midi de la vérité dans l’humanité de Notre Seigneur. »
Je conclurai avec la première lecture qui est un enseignement de Pierre dans les Actes des Apôtres. Remarquez comment Pierre reprend l’enseignement du Ressuscité sur l’accomplissement des Ecritures : « Dieu qui, par la bouche de tous les prophètes, avait annoncé que son Messie souffrirait, accomplissait ainsi sa Parole. » Si le chef des Apôtres est sévère envers ses auditeurs (vous l’avez livré, rejeté, tué), il leur trouve aussi des circonstances atténuantes : « Je sais bien que vous avez agi dans l’ignorance. » Et Paul dira la même chose aux Corinthiens : « S’ils avaient connu la Sagesse, ils n’auraient pas crucifié le Seigneur de la gloire. » Pierre, à la suite de Jésus, fait donc un bilan de la dramatique histoire du salut et de son accomplissement dans la Pâque du Seigneur. Même si nous avons du mal à le comprendre avec notre raison, tout cela devait arriver. C’est bien la folie de la Croix dont il s’agit ici. L’apôtre Pierre, constitué témoin par son Maître, n’en reste pas là. Il tire de tous ces événements une conclusion, la même que celle que nous trouvons dans la bouche du Ressuscité lui-même : « Convertissez-vous donc et revenez à Dieu pour que vos péchés soient effacés. » Cette longue, progressive, et dramatique histoire de l’Alliance entre Dieu et les hommes, ne nous condamne pas. Elle nous ouvre au contraire à l’espérance chrétienne. Il n’est pas de cœur aussi endurci soit-il qui n’ait la possibilité réelle de changer. Alors ne désespérons jamais de nous-mêmes, car, avec la grâce de l’Esprit, nous pouvons toujours progresser dans la sainteté !

jeudi 23 avril 2009

Deuxième dimanche de Pâques

2ème dimanche de Pâques / B (de la divine miséricorde)
19/04/09
Jean 20, 19-31 (p. 487)
En nous proposant ce passage du chapitre 20 de saint Jean, l’Eglise veut nous faire revivre la semaine pascale avec les Apôtres. Ce dimanche marque en effet la fin de l’octave de Pâques et c’est huit jours après Pâques que Jésus ressuscité se manifeste à Thomas. Avec la deuxième lecture, l’Evangile de cette messe nous invite à une réflexion sur notre foi chrétienne. Et la première conclusion que Jean donne à son Evangile est très claire : ces signes « y ont été mis afin que vous croyiez que Jésus est le Messie, le Fils de Dieu, et afin que, par votre foi, vous ayez la vie en son nom. » Si Jean écrit son Evangile, c’est bien pour amener le lecteur à la foi en Jésus Seigneur, et lui permettre ainsi d’obtenir la vie éternelle.
Voyons dans un premier temps comment les 11 apôtres ont vécu la semaine qui a suivi Pâques. Le soir de la résurrection, la situation spirituelle de ces hommes n’est guère brillante… Ils « avaient verrouillé les portes du lieu où ils étaient, car ils avaient peur des Juifs. » Pourtant Pierre et Jean avaient vu le tombeau vide, les apôtres avaient reçu le témoignage de Marie-Madeleine… Les disciples ont donc vécu la semaine pascale dans la peur, enfermés chez eux. Certes en voyant le Seigneur ressuscité qui se manifeste à eux ils sont remplis de joie. Mais cette joie ne fait pas encore disparaître la peur de leur cœur… La preuve en est que 8 jours plus tard ils semblent se trouver dans la même situation, les portes demeurant verrouillées… Le soir de Pâques ces hommes vont vivre grâce à Jésus ce que l’on pourrait appeler « une Pentecôte privée » ou anticipée. Puisque Jésus le Vivant, en soufflant sur eux, va leur communiquer l’Esprit Saint en vue de leur mission. Si l’Esprit de Jésus leur donne le pouvoir de pardonner les péchés au nom de Dieu, s’Il fait d’eux des serviteurs de la miséricorde divine, il n’enlève pas encore la peur de leur cœur. Certainement parce qu’ils ne sont pas prêts, parce qu’ils manquent de foi, et qu’ils opposent bien des résistances au don de Dieu. Il leur faudra encore vivre l’Ascension et la Pentecôte de la première Eglise pour être enfin délivrés de cette peur et entrer pleinement dans la joie de Pâques !
C’est en méditant sur cette peur des apôtres pendant la semaine pascale que nous sommes ramenés à l’importance de la foi et à la deuxième lecture. Le même saint Jean dit aux chrétiens que les commandements de Dieu « ne sont pas un fardeau. » Et il en donne la raison. Le baptisé passe du régime de l’Ancienne Alliance à la Loi de la grâce et de la miséricorde. Jésus n’avait pas hésité à critiquer durement les maîtres de la Loi et les pharisiens, les hommes religieux de son temps. Pourquoi ? Parce qu’ils « préparent de lourdes charges (des fardeaux), et ils vous les mettent sur les épaules ; mais eux-mêmes ne bougeraient pas un doigt pour les remuer. » La miséricorde de Jésus s’oppose clairement à la dureté et à l’hypocrisie de ces hommes religieux. Lui, n’est pas venu pour nous accabler avec le fardeau des commandements. Il nous lance au contraire un appel débordant d’amour et de compréhension vis-à-vis de notre humaine faiblesse : « Venez à moi, vous tous qui peinez, qui êtes surchargés, et je vous donnerai le repos… Mon joug est aisé et ma charge légère. » Oui, les commandements ne sont plus pour nous un fardeau car nous avons en Jésus un Maître au cœur doux et humble. Et parce que nous sommes vainqueurs du monde en tant que baptisés. Ce qui dans le langage de Jean signifie vainqueurs du mal et de tout ce qui avilit et défigure l’homme en tant que créature de Dieu appelée à entrer dans la gloire. Mais comment avons-nous donc vaincu le mal ? Par notre foi en Jésus Fils de Dieu, répond Jean. En ce temps de Pâques reprenons conscience de la force que représente notre attachement au Christ Ressuscité par la foi. C’est bien cette foi en Jésus Sauveur qui nous délivre de la peur et de la paralysie qu’elle engendre, c’est bien cette foi qui nous permet d’accueillir en plénitude la joie et la paix du Ressuscité. Enfin c’est encore par cette même foi pascale que les commandements ne sont plus pour nous un fardeau mais bien un chemin de vie, d’accomplissement et d’espérance.
Dans une très belle méditation intitulée « la seconde naissance ou la victoire sur la mort », Maurice Zundel affirme : « La question n’est pas de savoir si l’on est vivant après la mort, mais si l’on est vivant avant la mort ». Et il explique : « La vraie question c’est d’être un vivant avant la mort. Il est bien vrai qu’on n’entre pas dans le Ciel comme s’il s’agissait d’aller quelque part. Il faut devenir le Ciel, il faut le devenir. Il faut devenir la Vie éternelle, il faut la devenir dans tout son être… Le chrétien est quelqu’un qui sait que sa vocation est de vaincre la mort, aujourd’hui et tous les jours de sa vie, jusqu’à ce qu’enfin il fasse de sa mort elle-même un acte de vie ! »
Dans une foi renouvelée demandons à l’Esprit de Jésus de faire de chacun de nous un Vivant, un vainqueur du mal, en mettant nos pas dans ceux du Vivant !