30/10/16
Luc 19,
1-10
La belle histoire de Zachée
illustre une conviction très forte de Jésus : le Fils de l’homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu. Zachée
nous est présenté par saint Luc comme un riche notable de la ville de Jéricho,
il est tout de même le chef des collecteurs d’impôts ! Mais sa réputation
auprès des Juifs religieux est mauvaise, on le considère comme un pécheur.
Peut-être parce que, de par son travail, il pouvait être malhonnête et abuser
de sa fonction pour détourner certaines sommes d’argent. Certainement parce
qu’il collaborait avec l’occupant romain. Et voilà que survient un événement
totalement inattendu : ce notable se met à grimper sur un arbre pour voir
Jésus qui passe dans sa ville, au risque de se ridiculiser aux yeux de toute la
population ! Les notables ne font habituellement pas ce genre de geste…
Mais le Seigneur voit au-delà des apparences, il voit le cœur de cet homme et
la motivation profonde qui l’habite. Il ne s’agit pas chez lui d’une simple
curiosité, voir Jésus, mais de l’intuition que ce Jésus pourrait donner une
nouvelle orientation à sa vie. En entendant le Seigneur s’inviter chez lui,
Zachée est rempli de joie. Et voilà qu’au contact de la personne de Jésus,
grâce à sa présence aimante, le riche notable se convertit avec une rapidité
fulgurante. La rencontre avec le Seigneur le bouleverse et le pousse au
détachement et à la générosité : je
fais don aux pauvres de la moitié de mes biens et si j’ai fait du tort à
quelqu’un, je vais lui rendre quatre fois plus. Les fruits de sa conversion
sont magnifiques et admirables. Il comprend que sa richesse est faite pour être
partagée avec ceux qui sont pauvres, il reconnaît son péché : il a
peut-être été malhonnête, et dans un esprit de réparation véritable, il est
prêt à donner quatre fois plus que le tort qu’il a pu causer à autrui. A
l’époque des paradis fiscaux et de la recherche du profit illimité au mépris de
toute référence morale, l’histoire de Zachée nous paraît très actuelle et nous
fait rêver à un monde plus juste et plus fraternel. Etre riche implique une
grande responsabilité morale à l’égard de la société et un sérieux examen de
conscience sur les moyens utilisés pour aboutir à cette richesse. Il y a en
effet des manières de s’enrichir qui sont inacceptables pour un chrétien, et
même pour un homme raisonnable. Par exemple la vente d’armes et de stupéfiants
ne sont pas des activités commerciales neutres, loin de là. Mais on peut penser
au fait que la plus grande partie du commerce international n’est pas équitable
et que beaucoup de richesses se sont accumulées à partir d’une nouvelle forme
d’esclavagisme et de la négation des droits les plus élémentaires des
travailleurs et de leur dignité. Ce n’est pas pour rien qu’un prêtre hollandais,
Frans van der Hoff, a eu l’intuition de fonder en 1988 avec un économiste l’association
Max Havelaar pour promouvoir le commerce équitable.
Aujourd’hui, le salut est arrivé pour cette maison, car lui aussi est un
fils d’Abraham. Le commentaire que le Seigneur fait de la conversion de
Zachée répond à la parole qu’il lui a adressée alors qu’il était encore sur son
arbre : Aujourd’hui, il faut que
j’aille demeurer chez toi. Saint Luc nous donne ainsi une belle définition
du salut chrétien : le salut, c’est accueillir Jésus chez nous, c’est lui
donner la première place dans notre cœur. Et comment savoir si nous accueillons
vraiment le Sauveur dans la maison de notre cœur ? En regardant les fruits
que la foi produit dans notre vie. Si, comme Zachée, nous sommes capables de
détachement et de générosité par rapport à nos propres richesses, si, comme
lui, nous sommes touchés par les injustices dont nous pouvons être l’origine,
alors c’est le signe certain que nous avons accueilli Jésus en nous. Nous
aussi, grâce à Jésus, nous avons la joie d’être de vrais fils d’Abraham !