L’Evangile de ce dimanche nous rapporte deux
miracles de Jésus. Comme souvent dans ce genre de situation le Seigneur fait un
lien entre son action et la foi de ceux qui en bénéficient. Le cas de la femme
malade est particulièrement éloquent : « Si je parviens à toucher
seulement son vêtement, je serais sauvée ». Et Jésus qui a guéri cette
femme à son insu reconnaît sa foi : « Ma fille, ta foi t’a sauvée. Va
en paix et sois guérie de ton mal ». Cette femme malade depuis longtemps
nous fait aussi penser à la foi du centurion romain : « Dis un mot
seulement et mon serviteur sera guéri ». C’est ce magnifique acte de foi
que nous reprenons dans la liturgie de la messe juste avant de communier. Et
Jésus ne cache pas son admiration face à tant de foi : « En vérité,
je vous le dis, je n’ai rencontré une telle foi chez personne en Israël ».
Dans le cas de la fille de Jaïre la situation empire alors que le Seigneur se
dirige vers la maison où elle se trouve. On lui fait savoir qu’elle vient de
mourir. C’est alors une invitation à la foi que Jésus fait à Jaïre :
« Ne crains pas, crois seulement ». Tous ces récits de miracle sont
pour nous l’occasion de réfléchir au sens de notre prière de demande. Il est
fréquent que nous demandions au Seigneur la guérison pour telle ou telle
personne. Dans quel esprit devons-nous prier ? D’un côté Jésus nous
recommande la prière de demande : Demandez,
vous obtiendrez ; cherchez, vous trouverez ; frappez, la porte vous sera
ouverte. Celui qui demande reçoit ; celui qui
cherche trouve ; et pour celui qui frappe, la porte s'ouvre. Et il n’hésite pas à nous
inviter à une prière persévérante, une prière qui ne se décourage pas. Deux
petites paraboles illustrent cet enseignement dans les Evangiles : celle
de l’ami importun et celle de la veuve et du juge. C’est la foi et la confiance
en la puissance bienfaisante de Dieu qui nous permettent de prier ainsi. En
même temps Jésus nous demande de nous en remettre à la volonté divine :
Que ta volonté soit faite ! Et l’introduction au « Notre Père »
en saint Matthieu est on ne peut plus claire : Lorsque vous priez, ne rabâchez pas comme les païens :
ils s'imaginent qu'à force de paroles ils seront exaucés. Ne les imitez donc pas, car votre Père sait de quoi vous
avez besoin avant même que vous l'ayez demandé. Ces
enseignements pourraient nous paraître contradictoires. En fait c’est une même
attitude de foi qui motive les deux manières de prier. C’est bien parce que je
crois que Dieu est un Père plein de bonté que je me permets de lui demander
dans ma prière des grâces précises pour moi ou pour les autres. Et c’est aussi
parce que je crois que la providence divine veille sur moi et sur les autres
que je m’en remets à elle. Dieu sait mieux que moi-même ce qui est le meilleur.
En fait il n’y a qu’une attitude dans la prière de demande. Je peux demander
une guérison par exemple mais toujours en ajoutant : « Que ta volonté
soit faite ! » Le fait de demander va de pair avec l’abandon confiant
en la providence divine. Le fait que je ne sois pas exaucé ne signifie pas
forcément que je manque de foi. Souvenons-nous que Jésus n’a pas guéri tous les
malades ni ressuscité tous les morts. Or il aurait pu le faire par une seule
pensée ou une seule parole. Les miracles renvoient à autre chose qu’à
eux-mêmes. Ils nous parlent du mystère de la vie et de la mort. Ils ne sont pas
pour Jésus le moyen de se faire de la publicité facile et d’obtenir le succès
qui serait celui d’un gourou : « Jésus leur recommanda avec insistance
que personne ne le sache ». Le Seigneur demande toujours la discrétion
quand il opère une guérison, même s’il y a des témoins. La manière dont est
décrite le retour à la vie de la fille de Jaïre nous montre le sens du
miracle : « L’enfant n’est pas morte : elle dort… ». Saint
Paul reprendra ce verbe pour parler des chrétiens qui sont morts : ils
dorment. Non pas pour nier la dure réalité de la mort mais pour signifier
l’espérance de la résurrection. « Jeune fille, je te le dis,
lève-toi ». Ce signe éclatant de la puissance de Jésus sur les forces de
la mort annonce le grand signe de sa propre résurrection. Résurrection qui
n’est pas seulement un retour à la vie, mais une entrée dans la gloire et une
victoire définitive sur la mort. Par notre foi et notre baptême nous sommes
déjà ressuscités. Nous sommes les temples de l’Esprit Saint :
Nous le
savons bien, la création tout entière crie sa souffrance, elle passe par les
douleurs d'un enfantement qui dure encore. Et
elle n'est pas seule. Nous aussi, nous crions en nous-mêmes notre souffrance ;
nous avons commencé par recevoir le Saint-Esprit, mais nous attendons notre
adoption et la délivrance de notre corps. Car
nous avons été sauvés, mais c'est en espérance ; voir ce qu'on espère, ce n'est
plus espérer : ce que l'on voit, comment peut-on l'espérer encore ? Mais nous,
qui espérons ce que nous ne voyons pas, nous l'attendons avec persévérance.