Ascension du Seigneur / A
2/06/2011
Matthieu 28, 16-20 (p. 704)
A la fin du temps pascal, entre Pâques et la Pentecôte nous célébrons l’Ascension du Seigneur. Beaucoup, même parmi les catholiques, confondent cette fête avec celle de l’Assomption de Marie célébrée le 15 août. L’Ascension c’est pour Jésus et l’Assomption pour Marie ! Mais ces deux fêtes ont un point commun : elles nous montrent la puissance du mystère pascal à l’œuvre dans notre humanité. Jésus et Marie ont connu la mort, cette mort qui est la marque de notre condition humaine après le péché originel, mais leurs corps n’ont pas connu la corruption du tombeau. En Jésus et en Marie notre humanité est transfigurée et glorifiée en Dieu. En Jésus et en Marie notre humanité est parfaitement unie à Dieu, elle participe à la vie même et à l’amour de la Sainte Trinité. L’Assomption de Marie est sa Pâque à elle, dans le chemin ouvert par son Fils, le premier-né d’entre les morts. Ce qui fait le lien entre l’Assomption et l’Ascension, et du coup peut créer la confusion, c’est un même vocabulaire : Marie, comme Jésus, a été élevée au ciel avec son corps. Cette comparaison entre les deux mystères nous indique que cette fête est aussi la notre. Nous aussi, à la suite de Jésus et de Marie, nous sommes appelés à entrer dans la gloire de Dieu après le passage de notre mort. Et notre corps connaitra aussi une résurrection, une transfiguration en passant par l’anéantissement, conséquence de la mort. C’est là la différence entre nous et Marie. Grâce à Jésus, Dieu nous donnera un corps glorieux.
C'est à eux, les apôtres, que Jésus s'était montré vivant après sa Passion : il leur en avait donné bien des preuves, puisque, pendant quarante jours, il leur était apparu, et leur avait parlé du royaume de Dieu.
Pour le dire simplement l’Ascension marque la fin de ce temps privilégié au cours duquel le Ressuscité s’est manifesté à ses disciples pour les confirmer dans la foi et les envoyer en mission. A partir de l’Ascension aucun chrétien ne peut voir sur cette terre le Seigneur Jésus dans sa condition glorieuse. Il devient invisible à nos yeux de chair. Et c’est cela que signifie son entrée dans le ciel où il siège désormais à la droite du Père, partageant sa puissance et priant pour nous et pour son Eglise. Il est vrai que le Christ s’est manifesté à des saints et des saintes à travers une apparition pour leur confier un message. Mais cela reste exceptionnel et rare dans l’histoire de l’Eglise. Et l’on pourrait se poser la question suivante : pourquoi Jésus n’a-t-il pas choisi de continuer à se manifester aux hommes, comme il l’a fait entre sa résurrection et son ascension ? Tout simplement parce que son royaume n’est pas de ce monde. L’ascension nous montre que notre vie terrestre, avec toute sa valeur et son importance, n’est pas le but ultime. Notre horizon dernier c’est la vie éternelle en Dieu, c’est la vie bienheureuse dans la communion de la Sainte Trinité, dans la communion des saints. D’ailleurs les apôtres ne l’ont pas compris : Seigneur, est-ce maintenant que tu vas rétablir la royauté en Israël? L’Ascension nous empêche de vouloir établir sur terre une théocratie. Jésus est Roi mais il n’est pas venu pour mettre en place des systèmes politiques, même si ceux-ci se réclament de lui et prétendent le servir. Nous n’avons pas à confondre le christianisme avec ce qui a été pendant des siècles une forme de son expression historique donc limitée et bien imparfaite, la chrétienté. La chrétienté s’est écroulée mais le christianisme demeure. Avec l’Ascension, Jésus confirme le règne de la foi, de l’espérance et de la charité. Le chrétien vit de ces vertus, de ces puissances divines reçues au baptême, pour reconnaître la présence de son Roi glorieux mais invisible aux yeux de chair. Au jour de l’Ascension, le Ressuscité ne nous a pas abandonné. Tout d’abord parce qu’il nous promet la venue du Saint Esprit. Lui part, d’une certaine manière, mais c’est pour nous donner le Saint Esprit : Moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous: C’est l'Esprit de vérité. Mais aussi pour une autre raison. Ce n’est pas parce que Jésus est désormais invisible qu’il est incapable de se rendre présent à chacun d’entre nous. Bien au contraire. Avant l’Ascension le Seigneur ne pouvait se rendre présent qu’à une infime partie de l’humanité, dans un seul lieu : Israël. Maintenant qu’il est dans la gloire de Dieu avec son humanité, notre humanité, sa présence est catholique, universelle. Non seulement à travers l’Eglise et les sacrements mais aussi d’une manière personnelle auprès de chaque chrétien, particulièrement dans la prière et le témoignage de la foi :
Vous allez recevoir une force, celle du Saint-Esprit, qui viendra sur vous. Alors vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu'aux extrémités de la terre.
Dans cette perspective du mystère de l’Ascension, la dernière parole de Jésus dans l’Evangile selon saint Matthieu a une importance particulière :
Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin du monde.
Matthieu a choisi de terminer son Evangile avec ces paroles du Seigneur avant l’Ascension. La joie du chrétien, celle que nul ne peut lui ravir, c’est de reconnaître dans la foi cette présence du Ressuscité auprès de lui. Cette présence ne se limite pas aux moments de prière et à la messe, elle est coextensive à toute notre vie, même la plus ordinaire. Oui, Jésus, Fils de Dieu, est vraiment notre compagnon de route. Et chaque fois que nous témoignons de lui par nos actes et nos paroles nous pouvons être certains de sa présence en nous, à nos côtés. Dans la force de l’Esprit Saint c’est par nous, les membres de son Corps, qu’il choisit de se rendre présent à tous, même à ceux qui ne le reconnaissent pas encore comme le Seigneur de leur vie.
Il s'agit tout simplement de partager par le biais du web les homélies que je compose et prononce pour les catholiques de mes paroisses chaque dimanche et jour de fête.
jeudi 2 juin 2011
dimanche 22 mai 2011
5ème dimanche de Pâques
5ème dimanche de Pâques / A
22/05/2011
Jean 14, 1-12 (p. 625)
Dans ce temps liturgique entre Pâques et l’Ascension, l’Eglise nous fait entendre un Evangile situé avant l’événement de la résurrection. Nous nous retrouvons avec les apôtres autour de Jésus dans une atmosphère faite d’intimité et de questionnements. Le moment est solennel, le Seigneur sait que le lendemain il devra souffrir sa Passion. Ces paroles appartiennent donc au Testament du Seigneur. Et dans ce Testament il y a une annonce de la résurrection et de la vie que Jésus glorifié veut partager avec chacun d’entre nous: Dans la maison de mon Père, beaucoup peuvent trouver leur demeure ; sinon, est-ce que je vous aurais dit : Je pars vous préparer une place ? Quand je serai allé vous la préparer, je reviendrai vous prendre avec moi ; et là où je suis, vous y serez aussi. Dimanche dernier, Jésus s’est présenté à nous comme le Bon Berger venant en ce monde pour que nous ayons la vie en abondance. Cet Evangile brille déjà des lumières de Pâques. Ce Testament est rempli d’espérance.
Ces paroles, prononcées à l’occasion du dernier repas au cours duquel l’Eucharistie fut instituée, sont à la fois un appel et une révélation.
Avant de donner sa vie pour que nous ayons la vie en abondance le Seigneur Jésus nous lance un appel pressant : Croyez en moi comme vous croyez en Dieu. Au moment du doute et du questionnement, le Maître indique à ses disciples la seule force qu’ils ont à leur disposition, la force de la foi en Lui. Il les supplie : « Faites-moi confiance, car je suis le Fils de Dieu, l’envoyé du Père ». Il s’agit pour ces hommes qui ont tout quitté pour le suivre de le suivre jusqu’au bout. Il s’agit pour eux de remettre leur vie, leur espérance entre ses mains à Lui, entre ces mains qui demain seront clouées sur le bois de la croix, et qui sembleront impuissantes. Ces saintes mains qui n’ont cessé de faire le bien et de bénir. La suite montrera que cet appel à croire n’aura été que très peu entendu… Seul Jean était présent avec les saintes femmes au pied de la Croix. Notre foi en Jésus, Fils de Dieu, est une force qui nous permet de ne pas être paralysés par la peur : Ne soyez donc pas bouleversés. L’originalité de notre foi chrétienne se révèle justement dans la place unique et centrale de cet homme-Dieu nommé Jésus de Nazareth. Le chrétien ne se définit pas d’abord comme celui qui croit en Dieu, mais bien comme celui qui croit en Jésus Sauveur, révélation du Père pour nous. Nous ne sommes pas des déistes qui croient en une vague entité supérieure. Pour nous Dieu a un visage humain, et c’est celui de Jésus-Christ : Celui qui m'a vu a vu le Père. Comment peux-tu dire : 'Montre-nous le Père' ? Tu ne crois donc pas que je suis dans le Père et que le Père est en moi ! Oui, notre Dieu n’est pas abstrait, un être suprême très éloigné de nous, mais il est le Père de Jésus-Christ. Nous le contemplons dans la sainte Face de Jésus, visage tour à tour souriant, rayonnant de beauté intérieure, en pleurs, douloureux, humilié, bafoué, lumineux, glorieux, et resplendissant de la vie divine. Notre Dieu n’est pas d’abord un être transcendant, une généralité sans nom, mais une communion de personnes, c’est le mystère de la Sainte Trinité.
Cet homme unique qui nous sauve d’une vie absurde, sans espérance et privée de sens ultime, se révèle à nous comme le Chemin, la Vérité et la Vie. Au moment même où il va entrer dans la plus grande faiblesse et laisser bafouer en Lui, sans se plaindre ni se défendre, le Dieu vivant et vrai, il ose affirmer : « Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie ».
Oui, Jésus Vivant, toi que nous célébrons en ce temps de Pâques, tu es pour chacun de nous le Chemin. Tu nous fais comprendre peu à peu que croire en Toi c’est un long chemin, avec ses étapes, ses peines et ses joies, jusqu’à la grande épreuve de la mort. Croire en Toi c’est essayer de mettre le chemin de nos vies en accord avec ta parole et tes exemples. Tu es la Vérité, une vérité qui nous rend libres de tout mal, une vérité qui nous fait avancer sans avoir peur, une vérité qui nous donne la joie de vivre. Tu es la plénitude de la vérité sur nous-mêmes et sur Dieu notre Père. Tu nous fais participer à ta vérité dans l’Eglise non pas pour que nous devenions des fanatiques utilisant ta vérité pour condamner et juger les autres. Mais bien pour que nous soyons les serviteurs de ce que tu nous donnes gratuitement, sans aucun mérite de notre part. Ô Jésus, apprends-nous à ne jamais séparer ta vérité de ton amour dans nos paroles, nos actes et nos pensées. Ta vérité a toujours le visage de la bonté, de la miséricorde et du pardon. Ô Jésus, tu es la Vie en surabondance, la vie de la Sainte Trinité communiquée à nos cœurs par le don de l’Esprit et par les sacrements. Donne-nous la force d’être les témoins de la valeur de toute vie humaine et de la beauté de notre vocation de fils de Dieu. Donne-nous le désir de faire grandir en nous ton visage et de révéler à nos frères leur beauté intérieure. Et pardonne-nous nos manques de foi en toi et dans nos frères. Amen
22/05/2011
Jean 14, 1-12 (p. 625)
Dans ce temps liturgique entre Pâques et l’Ascension, l’Eglise nous fait entendre un Evangile situé avant l’événement de la résurrection. Nous nous retrouvons avec les apôtres autour de Jésus dans une atmosphère faite d’intimité et de questionnements. Le moment est solennel, le Seigneur sait que le lendemain il devra souffrir sa Passion. Ces paroles appartiennent donc au Testament du Seigneur. Et dans ce Testament il y a une annonce de la résurrection et de la vie que Jésus glorifié veut partager avec chacun d’entre nous: Dans la maison de mon Père, beaucoup peuvent trouver leur demeure ; sinon, est-ce que je vous aurais dit : Je pars vous préparer une place ? Quand je serai allé vous la préparer, je reviendrai vous prendre avec moi ; et là où je suis, vous y serez aussi. Dimanche dernier, Jésus s’est présenté à nous comme le Bon Berger venant en ce monde pour que nous ayons la vie en abondance. Cet Evangile brille déjà des lumières de Pâques. Ce Testament est rempli d’espérance.
Ces paroles, prononcées à l’occasion du dernier repas au cours duquel l’Eucharistie fut instituée, sont à la fois un appel et une révélation.
Avant de donner sa vie pour que nous ayons la vie en abondance le Seigneur Jésus nous lance un appel pressant : Croyez en moi comme vous croyez en Dieu. Au moment du doute et du questionnement, le Maître indique à ses disciples la seule force qu’ils ont à leur disposition, la force de la foi en Lui. Il les supplie : « Faites-moi confiance, car je suis le Fils de Dieu, l’envoyé du Père ». Il s’agit pour ces hommes qui ont tout quitté pour le suivre de le suivre jusqu’au bout. Il s’agit pour eux de remettre leur vie, leur espérance entre ses mains à Lui, entre ces mains qui demain seront clouées sur le bois de la croix, et qui sembleront impuissantes. Ces saintes mains qui n’ont cessé de faire le bien et de bénir. La suite montrera que cet appel à croire n’aura été que très peu entendu… Seul Jean était présent avec les saintes femmes au pied de la Croix. Notre foi en Jésus, Fils de Dieu, est une force qui nous permet de ne pas être paralysés par la peur : Ne soyez donc pas bouleversés. L’originalité de notre foi chrétienne se révèle justement dans la place unique et centrale de cet homme-Dieu nommé Jésus de Nazareth. Le chrétien ne se définit pas d’abord comme celui qui croit en Dieu, mais bien comme celui qui croit en Jésus Sauveur, révélation du Père pour nous. Nous ne sommes pas des déistes qui croient en une vague entité supérieure. Pour nous Dieu a un visage humain, et c’est celui de Jésus-Christ : Celui qui m'a vu a vu le Père. Comment peux-tu dire : 'Montre-nous le Père' ? Tu ne crois donc pas que je suis dans le Père et que le Père est en moi ! Oui, notre Dieu n’est pas abstrait, un être suprême très éloigné de nous, mais il est le Père de Jésus-Christ. Nous le contemplons dans la sainte Face de Jésus, visage tour à tour souriant, rayonnant de beauté intérieure, en pleurs, douloureux, humilié, bafoué, lumineux, glorieux, et resplendissant de la vie divine. Notre Dieu n’est pas d’abord un être transcendant, une généralité sans nom, mais une communion de personnes, c’est le mystère de la Sainte Trinité.
Cet homme unique qui nous sauve d’une vie absurde, sans espérance et privée de sens ultime, se révèle à nous comme le Chemin, la Vérité et la Vie. Au moment même où il va entrer dans la plus grande faiblesse et laisser bafouer en Lui, sans se plaindre ni se défendre, le Dieu vivant et vrai, il ose affirmer : « Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie ».
Oui, Jésus Vivant, toi que nous célébrons en ce temps de Pâques, tu es pour chacun de nous le Chemin. Tu nous fais comprendre peu à peu que croire en Toi c’est un long chemin, avec ses étapes, ses peines et ses joies, jusqu’à la grande épreuve de la mort. Croire en Toi c’est essayer de mettre le chemin de nos vies en accord avec ta parole et tes exemples. Tu es la Vérité, une vérité qui nous rend libres de tout mal, une vérité qui nous fait avancer sans avoir peur, une vérité qui nous donne la joie de vivre. Tu es la plénitude de la vérité sur nous-mêmes et sur Dieu notre Père. Tu nous fais participer à ta vérité dans l’Eglise non pas pour que nous devenions des fanatiques utilisant ta vérité pour condamner et juger les autres. Mais bien pour que nous soyons les serviteurs de ce que tu nous donnes gratuitement, sans aucun mérite de notre part. Ô Jésus, apprends-nous à ne jamais séparer ta vérité de ton amour dans nos paroles, nos actes et nos pensées. Ta vérité a toujours le visage de la bonté, de la miséricorde et du pardon. Ô Jésus, tu es la Vie en surabondance, la vie de la Sainte Trinité communiquée à nos cœurs par le don de l’Esprit et par les sacrements. Donne-nous la force d’être les témoins de la valeur de toute vie humaine et de la beauté de notre vocation de fils de Dieu. Donne-nous le désir de faire grandir en nous ton visage et de révéler à nos frères leur beauté intérieure. Et pardonne-nous nos manques de foi en toi et dans nos frères. Amen
dimanche 8 mai 2011
3ème dimanche de Pâques
3ème dimanche de Pâques / A
8/05/2011
Luc 24, 13-35 (p. 527)
Parmi les Évangiles de Pâques le récit des disciples d’Emmaüs en saint Luc est unique. Non seulement parce que seul saint Luc en fait le compte-rendu (saint Marc le mentionne en passant), mais en raison des témoins choisis ici par Jésus, trois jours après sa mort. Il s’agit en effet de deux disciples presque anonymes et dont nous ne connaissons l’existence qu’à travers ce récit. C’est une différence de taille avec les manifestations du Ressuscité aux saintes femmes et aux apôtres. Un passage de la première lettre de saint Paul aux Corinthiens nous rappelle cette diversité des témoins du Christ ressuscité :
« Avant tout, je vous ai transmis ceci, que j'ai moi-même reçu : le Christ est mort pour nos péchés conformément aux Écritures, et il a été mis au tombeau ;il est ressuscité le troisième jour conformément aux Écritures, et il est apparu à Pierre, puis aux Douze ; ensuite il est apparu à plus de cinq cents frères à la fois - la plupart sont encore vivants, et quelques-uns sont morts - ensuite il est apparu à Jacques, puis à tous les Apôtres. Et en tout dernier lieu, il est même apparu à l'avorton que je suis. »
Le fait que les disciples d’Emmaüs ne soient pas des disciples connus, le fait qu’ils soient de simples disciples sans faire partie du groupe des apôtres, nous les rend immédiatement très proches. Le seul dont nous connaissons le nom, Cléophas, n’est pas dans le calendrier des saints comme Marie-Madeleine, Pierre, Jean, Thomas ou encore Paul. Cette manifestation du Ressuscité à ces deux hommes peut donner lieu à des interprétations très riches et intéressantes. On peut faire, par exemple, une lecture sacramentelle de ce récit en y reconnaissant les deux parties principales de l’eucharistie : la liturgie de la Parole et la fraction du Pain.
Je voudrais en ce dimanche vous proposer deux points de méditation. Le premier concerne notre espérance chrétienne. Le second aborde la présence du Christ dans nos vies.
Les deux disciples quittent Jérusalem, ville sainte devenue pour eux ville maudite : lieu du supplice et de l’échec de leur Maître. C’est trop peu de dire qu’ils sont tout tristes. Ils sont découragés et désespérés. Le premier message de ce récit est paradoxal. Il est parfois bon pour nous de passer par le découragement et le désespoir. Car malgré tout leur amour pour Jésus, leur espérance était encore trop humaine, trop terre à terre, trop politique en un mot : il avait réduit la mission de Jésus et ne l’avait donc pas comprise. Comme si le Fils de Dieu était venu partager notre humanité, souffrir sa Passion et sa mort pour libérer Israël du pouvoir de l’occupant romain ! Quand nous passons nous-aussi par des moments de doute et de découragement, nous avons peut-être à nous poser la question suivante : Mon image de Dieu, ma représentation de Jésus est-elle vraiment chrétienne ? Est-elle fidèle à ce que la Parole de Dieu m’en révèle ? Mon espérance est-elle vraiment chrétienne ? Je vais donner un seul exemple pour illustrer cela. En Europe les chrétiens pourraient en effet être tentés par le découragement en regardant les statistiques : baisse de la pratique dominicale, baisse des vocations sacerdotales et religieuses, indifférence massive de nos contemporains à l’égard de la religion etc. En 1978 le bienheureux Jean-Paul II nous avait proposé un autre chemin que celui des lamentations, il nous avait dit : « N’ayez pas peur ! » En tant que disciples de Celui qui a accepté de passer par la mort de la Croix pour connaître la gloire de la résurrection il serait étrange que nous mettions notre espérance dans des statistiques. Il serait encore plus étrange que nous refusions une certaine forme de mort d’une manière de vivre le christianisme en Europe. Cela n’est certes pas réjouissant, c’est une épreuve pour nous, croyants. Mais si nous avions assez de foi, nous n’aurions pas peur et nous nous rappellerions la parole du Ressuscité à ses deux disciples :
« Vous n'avez donc pas compris ! Comme votre cœur est lent à croire tout ce qu'ont dit les prophètes ! Ne fallait-il pas que le Messie souffrît tout cela pour entrer dans sa gloire ? »
Ne rêvons plus d’être une majorité influente et puissante. Rêvons seulement d’être de véritables disciples du Christ, si possible toujours plus fidèles à sa Parole et donc toujours plus saints. Pour fonder son Église le Seigneur n’a pas recruté des troupes de propagandistes puissants et riches, mais il a choisi 12 hommes faibles et pauvres. Et c’est à partir de cette minorité apparemment insignifiante que la Parole de Dieu s’est répandue dans le monde entier.
Mon deuxième point de méditation me servira de conclusion et porte sur la présence du Christ dans le récit de Luc et dans nos vies. Mettons en parallèle le début et la fin de cet Évangile. Sur la route tout d’abord : Or, tandis qu'ils parlaient et discutaient, Jésus lui-même s'approcha, et il marchait avec eux. Mais leurs yeux étaient aveuglés, et ils ne le reconnaissaient pas. Dans l’auberge ensuite : Quand il fut à table avec eux, il prit le pain, dit la bénédiction, le rompit et le leur donna. Alors leurs yeux s'ouvrirent, et ils le reconnurent, mais il disparut à leurs regards. Jésus Ressuscité jouerait-il à cache-cache avec nous ? Il se rend présent aux disciples, ils ne le reconnaissent pas. Et quand enfin ils le reconnaissent, il disparaît ! La manière de faire du ressuscité nous rappelle qu’il est le Fils du Dieu caché. Nous ne pouvons pas mettre la main sur Dieu. Il demeure l’insaisissable. Et Jésus l’a fait aussi comprendre à Marie-Madeleine : Cesse de me tenir, je ne suis pas encore monté vers le Père. Va plutôt trouver mes frères pour leur dire que je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu.
Oui, Jésus Vivant est présent à son Église et à chacun de ses disciples, particulièrement dans la célébration de l’eucharistie, dans la prière et l’annonce de l'évangile. Mais nous ne pouvons jamais le posséder ou le retenir entre nos mains. C’est pour cette raison que nous serons toujours des chercheurs de Dieu. Un croyant qui oublierait cela serait dans l’illusion. Si Dieu se révèle et se cache à la fois, c’est pour faire grandir en nous le désir de la communion avec lui, c’est pour nous éviter d’avoir une espérance seulement humaine et réduite. L’absence apparente de celui que nous aimons peut blesser notre cœur du feu de l’amour divin. C’est ainsi que Dieu peu à peu, si nous sommes fidèles, transforme notre cœur de pierre en un cœur brûlant d’amour comme celui des disciples d’Emmaüs. La vie chrétienne est toujours en même temps une grâce et une épreuve car elle consiste à s’unir à celui qui en passant par la mort est devenu le Vivant.
8/05/2011
Luc 24, 13-35 (p. 527)
Parmi les Évangiles de Pâques le récit des disciples d’Emmaüs en saint Luc est unique. Non seulement parce que seul saint Luc en fait le compte-rendu (saint Marc le mentionne en passant), mais en raison des témoins choisis ici par Jésus, trois jours après sa mort. Il s’agit en effet de deux disciples presque anonymes et dont nous ne connaissons l’existence qu’à travers ce récit. C’est une différence de taille avec les manifestations du Ressuscité aux saintes femmes et aux apôtres. Un passage de la première lettre de saint Paul aux Corinthiens nous rappelle cette diversité des témoins du Christ ressuscité :
« Avant tout, je vous ai transmis ceci, que j'ai moi-même reçu : le Christ est mort pour nos péchés conformément aux Écritures, et il a été mis au tombeau ;il est ressuscité le troisième jour conformément aux Écritures, et il est apparu à Pierre, puis aux Douze ; ensuite il est apparu à plus de cinq cents frères à la fois - la plupart sont encore vivants, et quelques-uns sont morts - ensuite il est apparu à Jacques, puis à tous les Apôtres. Et en tout dernier lieu, il est même apparu à l'avorton que je suis. »
Le fait que les disciples d’Emmaüs ne soient pas des disciples connus, le fait qu’ils soient de simples disciples sans faire partie du groupe des apôtres, nous les rend immédiatement très proches. Le seul dont nous connaissons le nom, Cléophas, n’est pas dans le calendrier des saints comme Marie-Madeleine, Pierre, Jean, Thomas ou encore Paul. Cette manifestation du Ressuscité à ces deux hommes peut donner lieu à des interprétations très riches et intéressantes. On peut faire, par exemple, une lecture sacramentelle de ce récit en y reconnaissant les deux parties principales de l’eucharistie : la liturgie de la Parole et la fraction du Pain.
Je voudrais en ce dimanche vous proposer deux points de méditation. Le premier concerne notre espérance chrétienne. Le second aborde la présence du Christ dans nos vies.
Les deux disciples quittent Jérusalem, ville sainte devenue pour eux ville maudite : lieu du supplice et de l’échec de leur Maître. C’est trop peu de dire qu’ils sont tout tristes. Ils sont découragés et désespérés. Le premier message de ce récit est paradoxal. Il est parfois bon pour nous de passer par le découragement et le désespoir. Car malgré tout leur amour pour Jésus, leur espérance était encore trop humaine, trop terre à terre, trop politique en un mot : il avait réduit la mission de Jésus et ne l’avait donc pas comprise. Comme si le Fils de Dieu était venu partager notre humanité, souffrir sa Passion et sa mort pour libérer Israël du pouvoir de l’occupant romain ! Quand nous passons nous-aussi par des moments de doute et de découragement, nous avons peut-être à nous poser la question suivante : Mon image de Dieu, ma représentation de Jésus est-elle vraiment chrétienne ? Est-elle fidèle à ce que la Parole de Dieu m’en révèle ? Mon espérance est-elle vraiment chrétienne ? Je vais donner un seul exemple pour illustrer cela. En Europe les chrétiens pourraient en effet être tentés par le découragement en regardant les statistiques : baisse de la pratique dominicale, baisse des vocations sacerdotales et religieuses, indifférence massive de nos contemporains à l’égard de la religion etc. En 1978 le bienheureux Jean-Paul II nous avait proposé un autre chemin que celui des lamentations, il nous avait dit : « N’ayez pas peur ! » En tant que disciples de Celui qui a accepté de passer par la mort de la Croix pour connaître la gloire de la résurrection il serait étrange que nous mettions notre espérance dans des statistiques. Il serait encore plus étrange que nous refusions une certaine forme de mort d’une manière de vivre le christianisme en Europe. Cela n’est certes pas réjouissant, c’est une épreuve pour nous, croyants. Mais si nous avions assez de foi, nous n’aurions pas peur et nous nous rappellerions la parole du Ressuscité à ses deux disciples :
« Vous n'avez donc pas compris ! Comme votre cœur est lent à croire tout ce qu'ont dit les prophètes ! Ne fallait-il pas que le Messie souffrît tout cela pour entrer dans sa gloire ? »
Ne rêvons plus d’être une majorité influente et puissante. Rêvons seulement d’être de véritables disciples du Christ, si possible toujours plus fidèles à sa Parole et donc toujours plus saints. Pour fonder son Église le Seigneur n’a pas recruté des troupes de propagandistes puissants et riches, mais il a choisi 12 hommes faibles et pauvres. Et c’est à partir de cette minorité apparemment insignifiante que la Parole de Dieu s’est répandue dans le monde entier.
Mon deuxième point de méditation me servira de conclusion et porte sur la présence du Christ dans le récit de Luc et dans nos vies. Mettons en parallèle le début et la fin de cet Évangile. Sur la route tout d’abord : Or, tandis qu'ils parlaient et discutaient, Jésus lui-même s'approcha, et il marchait avec eux. Mais leurs yeux étaient aveuglés, et ils ne le reconnaissaient pas. Dans l’auberge ensuite : Quand il fut à table avec eux, il prit le pain, dit la bénédiction, le rompit et le leur donna. Alors leurs yeux s'ouvrirent, et ils le reconnurent, mais il disparut à leurs regards. Jésus Ressuscité jouerait-il à cache-cache avec nous ? Il se rend présent aux disciples, ils ne le reconnaissent pas. Et quand enfin ils le reconnaissent, il disparaît ! La manière de faire du ressuscité nous rappelle qu’il est le Fils du Dieu caché. Nous ne pouvons pas mettre la main sur Dieu. Il demeure l’insaisissable. Et Jésus l’a fait aussi comprendre à Marie-Madeleine : Cesse de me tenir, je ne suis pas encore monté vers le Père. Va plutôt trouver mes frères pour leur dire que je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu.
Oui, Jésus Vivant est présent à son Église et à chacun de ses disciples, particulièrement dans la célébration de l’eucharistie, dans la prière et l’annonce de l'évangile. Mais nous ne pouvons jamais le posséder ou le retenir entre nos mains. C’est pour cette raison que nous serons toujours des chercheurs de Dieu. Un croyant qui oublierait cela serait dans l’illusion. Si Dieu se révèle et se cache à la fois, c’est pour faire grandir en nous le désir de la communion avec lui, c’est pour nous éviter d’avoir une espérance seulement humaine et réduite. L’absence apparente de celui que nous aimons peut blesser notre cœur du feu de l’amour divin. C’est ainsi que Dieu peu à peu, si nous sommes fidèles, transforme notre cœur de pierre en un cœur brûlant d’amour comme celui des disciples d’Emmaüs. La vie chrétienne est toujours en même temps une grâce et une épreuve car elle consiste à s’unir à celui qui en passant par la mort est devenu le Vivant.
dimanche 1 mai 2011
2ème dimanche de Pâques
2ème dimanche de Pâques / A
1er mai 2011
Jean 20, 19-31 (p. 478)
En ce dimanche de l’octave de Pâques, l’Evangile nous ramène au soir du jour de la résurrection du Christ. Cette page évangélique comprend deux parties séparées entre elles par 8 jours. Je laisserai de côté l’épisode de l’apparition à Thomas pour me concentrer sur la première partie : la manifestation du Ressuscité à ses disciples. L’expérience qu’ils font du Ressuscité présent au milieu d’eux va les transformer. Ils vont en effet passer de la peur à la joie. J’y reviendrai.
Mais regardons d’abord le message de Pâques que Jésus leur adresse. Ce message est d’abord un don, il est ensuite un envoi en mission. Jésus Vivant se manifeste en effet à eux avec un double cadeau. Vainqueur pour toujours de la mort, il ne revient pas parmi eux les mains vides. Ce double cadeau est l’accomplissement d’une promesse qu’il leur avait faite le soir du jeudi saint. « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix. Je ne vous la donne pas comme le monde la donne. Ne restez pas dans le trouble et dans la crainte ». Dans la pièce où ils s’étaient enfermés par peur des Juifs, les disciples entendent à deux reprises la salutation de leur Maître : « La paix soit avec vous ! » Voilà le premier cadeau de Pâques : la paix dans le Christ, la paix spirituelle. Et ce premier don est en fait inséparable du second : celui de l’Esprit Saint. Lorsque saint Paul mentionne le fruit de l’Esprit dans sa lettre aux Galates il cite d’abord l’amour, la joie et la paix. Et dans sa lettre aux Romains il souligne l’importance de cette paix venant du Christ dans l’Esprit : « Le Royaume de Dieu n’est pas une affaire d’aliments et de boissons, mais de vie droite, de paix et de joie dans l’Esprit Saint ». Voilà ce qui nous caractérise en tant que chrétiens. Au baptême et à la confirmation nous avons, nous aussi, reçu ce grand don de Pâques, le don du Saint Esprit avec la paix du Ressuscité. Le temps de Pâques est le moment privilégié pour reprendre conscience de cette réalité merveilleuse : nous sommes les temples de l’Esprit Saint et nous pouvons accueillir jour après jour la paix du Christ. L’accueillir non pas pour la garder pour nous mais pour la rayonner autour de nous en artisans de paix. Comment savoir que nous accueillons bien cette paix et que nous en vivons ? Dans les moments difficiles et dans les épreuves comme les contradictions inévitables de notre vie ici-bas. Si dans ces moments là nous sommes capables de garder force, sérénité et espérance, c’est le signe évident que nous sommes habités par la paix du Christ. Si, aussi, nous refusons de répondre au mal par le mal, si nous écartons la vengeance, le ressentiment et la rancune. Si nous sommes capables de pardonner, alors oui nous sommes certains que notre cœur est ouvert à ce don merveilleux de la paix pascale.
Et cela m’amène naturellement à parler de l’envoi en mission qui accompagne le double don du Ressuscité : « De même que le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie ». Et nous voyons que dans cette mission des premiers disciples l’acte de pardonner les péchés au nom du Ressuscité est essentiel. La mission de l’Eglise est bien une mission de paix dans le sens d’une réconciliation toujours offerte avec Dieu et entre nous. La vraie paix n’ignore ni les difficultés, ni la terrible réalité du mal, mais elle les assume par la force de la miséricorde divine et du pardon dont nous sommes les témoins et les ambassadeurs. La vraie paix nous fait passer de la fatalité à l’espérance, de la confrontation stérile au dialogue du salut. Dans un monde qui a tendance à remplacer le raisonnement, l’argumentation et le dialogue par les instincts et les sentiments, nous pouvons être menacés par l’impossibilité à communiquer et donc par la violence. La vraie paix, et je reprends ce que je disais au début, nous fait donc passer de la peur à la joie chrétienne. Je laisserai le mot de la fin au Catéchisme pour adultes des évêques de France :
Les défis d'aujourd'hui sont immenses, dans les domaines de la culture, de l'économie, de la politique, des questions nouvelles posées par le progrès accéléré des techniques, de la biologie à l'informatique. Ayant dépassé toute peur, les disciples du Christ mort et ressuscité peuvent retrouver la fierté de leur foi, dans une attitude d'humble confiance en Dieu et d'ouverture aux questions des hommes. Ils sont forts de la conviction d'être porteurs pour le monde d'un message d'espérance qu'ils ont à rendre crédible par leurs paroles et leurs comportements.
1er mai 2011
Jean 20, 19-31 (p. 478)
En ce dimanche de l’octave de Pâques, l’Evangile nous ramène au soir du jour de la résurrection du Christ. Cette page évangélique comprend deux parties séparées entre elles par 8 jours. Je laisserai de côté l’épisode de l’apparition à Thomas pour me concentrer sur la première partie : la manifestation du Ressuscité à ses disciples. L’expérience qu’ils font du Ressuscité présent au milieu d’eux va les transformer. Ils vont en effet passer de la peur à la joie. J’y reviendrai.
Mais regardons d’abord le message de Pâques que Jésus leur adresse. Ce message est d’abord un don, il est ensuite un envoi en mission. Jésus Vivant se manifeste en effet à eux avec un double cadeau. Vainqueur pour toujours de la mort, il ne revient pas parmi eux les mains vides. Ce double cadeau est l’accomplissement d’une promesse qu’il leur avait faite le soir du jeudi saint. « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix. Je ne vous la donne pas comme le monde la donne. Ne restez pas dans le trouble et dans la crainte ». Dans la pièce où ils s’étaient enfermés par peur des Juifs, les disciples entendent à deux reprises la salutation de leur Maître : « La paix soit avec vous ! » Voilà le premier cadeau de Pâques : la paix dans le Christ, la paix spirituelle. Et ce premier don est en fait inséparable du second : celui de l’Esprit Saint. Lorsque saint Paul mentionne le fruit de l’Esprit dans sa lettre aux Galates il cite d’abord l’amour, la joie et la paix. Et dans sa lettre aux Romains il souligne l’importance de cette paix venant du Christ dans l’Esprit : « Le Royaume de Dieu n’est pas une affaire d’aliments et de boissons, mais de vie droite, de paix et de joie dans l’Esprit Saint ». Voilà ce qui nous caractérise en tant que chrétiens. Au baptême et à la confirmation nous avons, nous aussi, reçu ce grand don de Pâques, le don du Saint Esprit avec la paix du Ressuscité. Le temps de Pâques est le moment privilégié pour reprendre conscience de cette réalité merveilleuse : nous sommes les temples de l’Esprit Saint et nous pouvons accueillir jour après jour la paix du Christ. L’accueillir non pas pour la garder pour nous mais pour la rayonner autour de nous en artisans de paix. Comment savoir que nous accueillons bien cette paix et que nous en vivons ? Dans les moments difficiles et dans les épreuves comme les contradictions inévitables de notre vie ici-bas. Si dans ces moments là nous sommes capables de garder force, sérénité et espérance, c’est le signe évident que nous sommes habités par la paix du Christ. Si, aussi, nous refusons de répondre au mal par le mal, si nous écartons la vengeance, le ressentiment et la rancune. Si nous sommes capables de pardonner, alors oui nous sommes certains que notre cœur est ouvert à ce don merveilleux de la paix pascale.
Et cela m’amène naturellement à parler de l’envoi en mission qui accompagne le double don du Ressuscité : « De même que le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie ». Et nous voyons que dans cette mission des premiers disciples l’acte de pardonner les péchés au nom du Ressuscité est essentiel. La mission de l’Eglise est bien une mission de paix dans le sens d’une réconciliation toujours offerte avec Dieu et entre nous. La vraie paix n’ignore ni les difficultés, ni la terrible réalité du mal, mais elle les assume par la force de la miséricorde divine et du pardon dont nous sommes les témoins et les ambassadeurs. La vraie paix nous fait passer de la fatalité à l’espérance, de la confrontation stérile au dialogue du salut. Dans un monde qui a tendance à remplacer le raisonnement, l’argumentation et le dialogue par les instincts et les sentiments, nous pouvons être menacés par l’impossibilité à communiquer et donc par la violence. La vraie paix, et je reprends ce que je disais au début, nous fait donc passer de la peur à la joie chrétienne. Je laisserai le mot de la fin au Catéchisme pour adultes des évêques de France :
Les défis d'aujourd'hui sont immenses, dans les domaines de la culture, de l'économie, de la politique, des questions nouvelles posées par le progrès accéléré des techniques, de la biologie à l'informatique. Ayant dépassé toute peur, les disciples du Christ mort et ressuscité peuvent retrouver la fierté de leur foi, dans une attitude d'humble confiance en Dieu et d'ouverture aux questions des hommes. Ils sont forts de la conviction d'être porteurs pour le monde d'un message d'espérance qu'ils ont à rendre crédible par leurs paroles et leurs comportements.
dimanche 24 avril 2011
DIMANCHE DE PAQUES
Pâques
24/04/11
Jean 20, 1-9 (p. 433)
Nous voici parvenus au sommet de notre année chrétienne. Même si, en France et dans d’autres pays chrétiens, Noël et le dimanche des Rameaux sont des fêtes plus populaires que Pâques, il n’en reste pas moins vrai que l’événement de Pâques est au centre de notre foi chrétienne. Et tout le temps pascal nous est donné par l’Eglise pour faire mémoire de cet événement et en saisir toute la puissance dans nos vies, particulièrement à travers les sacrements. La fête de ce jour est donc inséparable des autres fêtes du temps pascal : l’Ascension du Seigneur et la Pentecôte. D’une certaine manière c’est avec la Pentecôte, le don de l’Esprit Saint, que l’une des dernières paroles du Christ en croix se réalisera : « Tout est accompli ». Oui, avec la venue du Saint Esprit sur la première Eglise le Ressuscité a mené son œuvre de salut, de réconciliation et de sanctification à sa perfection.
Avant de méditer la page d’Evangile qui nous est proposée par la liturgie deux remarques s’imposent. Tout d’abord nous ne trouvons pas dans le Nouveau Testament une description du moment de la résurrection du Christ. L’entrée définitive du Seigneur Jésus dans la vie et la gloire de Dieu échappe à tout regard humain. Sa victoire sur la mort ne se constate pas comme si elle ressemblait à une victoire humaine à l’issue d’une bataille ordinaire. Ensuite l’Eglise, pour ce saint jour de Pâques, a choisi un Evangile du tombeau vide et non pas l’une des manifestations du Ressuscité aux apôtres et aux saintes femmes. Il n’y a donc dans cette page évangélique rien d’extraordinaire, rien qui puisse nous en mettre plein la vue. Elle est le contraire d’une mise en scène grandiose telle que les artistes ont pu parfois l’imaginer. Ici le témoignage est simple et humble pour un événement unique dans l’histoire de toute notre humanité. Cette discrétion et cette retenue dans la manière de présenter le matin de Pâques nous rappellent à quel point la foi en la résurrection a mis bien du temps avant de conquérir le cœur des premiers disciples, eux qui « n’avaient pas vu que, d’après l’Ecriture, il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts ». Ces hommes et ces femmes n’étaient pas d’un tempérament crédule, bien au contraire.
Dès que le repos du Sabbat est terminé Marie Madeleine se lève très tôt pour aller au tombeau. Marie, la pécheresse convertie, se met en route de grand matin non pas parce qu’elle pense voir Jésus Ressuscité mais parce que son amour pour lui est immense. Marie est une femme fidèle à son Maître et elle veut l’honorer une dernière fois et peut-être achever, comme nous le disent les autres Evangiles, la toilette funéraire du crucifié. Et que voit-elle donc ? Le tombeau ouvert ! Sans même pénétrer à l’intérieur de celui-ci elle repart en courant vers la ville pour annoncer cette nouvelle à Pierre et à Jean. Ce n’est pas la Bonne Nouvelle de Pâques qu’elle leur annonce, pour elle il s’agit d’un enlèvement, le cadavre de Jésus aurait été volé, malgré les gardes postés devant le tombeau à la demande des prêtres Juifs. Et voilà Pierre et Jean qui se mettent à courir pour aller vérifier les dires de Marie Madeleine. Jean est le plus rapide, il arrive en premier. Probablement parce que son attachement pour Jésus est plus fort. Il a été le seul homme fidèle dans cette histoire, présent au pied de la croix avec les saintes femmes. Sans entrer dans le tombeau pour laisser à Pierre le rôle de premier témoin il voit le linceul. Pierre de même constate que les linges funéraires sont là mais sans le corps de Jésus. Voilà les premiers signes de Pâques : un tombeau vide, des linges funéraires. Ces signes suffisent à donner à Jean la foi pascale en la résurrection du Seigneur : « Il vit et il crut ».
Cet Evangile de Pâques peut nous amener à deux réflexions pour notre vie chrétienne. L’une sur les signes de Dieu, l’autre sur la puissance de ce mystère. Pendant le temps pascal nous pourrions prier en ayant dans le cœur ces deux interrogations. Dans notre monde, dans ma vie, bien des événements peuvent me ramener au vendredi saint et au sentiment de mon impuissance devant le mal en moi et autour de moi. Je dois demander à l’Esprit Saint, l’Esprit de mon baptême et de ma confirmation, de me faire voir les signes de Dieu. Ils sont souvent humbles et discrets, étouffés par une actualité désespérante. En tant que disciple du Ressuscité je ne suis pas épargné par le mal, encore moins insensible à sa présence. Mais ma foi me donne de le vaincre déjà en reconnaissant les signes de Dieu. Ensuite je sais que cette réalité de Pâques peut changer ma vie. L’Evangile est vraiment puissance de Dieu en ma faveur. Je peux demander à l’Esprit Saint de réveiller ma foi, de la rendre plus forte. Car c’est ma foi en Jésus Ressuscité qui me permettra effectivement de changer, de devenir meilleur jour après jour, et de rayonner autour de moi la bonté et la lumière de Dieu. En tant que disciple de Jésus je ne peux jamais me résigner ou m’avouer vaincu devant les multiples manifestations du mal et de la mort. Ce Jésus Ressuscité, ce Vivant, il n’est pas seulement à la droite du Père, dans la gloire de la Trinité. Il est auprès de moi, avec moi et en moi. Que pourrais-je craindre désormais ? Si ce n’est de ne pas assez l’aimer ou de lui être infidèle ? C’est dans un jardin que la mort a semblé triompher du Fils de Dieu. Ce jardin du tombeau neuf puis du tombeau vide, rappel du jardin d’Eden dans lequel nous avions perdu l’amitié de Dieu. En me donnant part à son Esprit d’amour, le Ressuscité fait de mon cœur son jardin, son nouveau paradis, et jour après jour il est le divin cultivateur, celui qui me renouvelle et me donne un cœur aimant, un cœur de fils, un cœur à son image. Alors si mon cœur se laisse vraiment embraser par le feu de l’amour divin, mes mains s’ouvriront pour prier le Père et pour servir mes frères. Alors mes pieds courront sur les chemins de la réconciliation et de la paix.
Le premier mai Jean-Paul II sera déclaré bienheureux. Ce géant de la foi, signe de Dieu pour notre temps, avait commencé son pontificat par un appel, écho de l’événement de Pâques : « N’ayez pas peur ! » Et il l’a vécu à travers tout son pontificat : géant de la foi, il a été un homme audacieux et courageux dans bien des domaines. Moi aussi je peux être un chrétien bienheureux. Si je laisse le Christ Vivant me libérer de plus en plus de l’esclavage de la peur pour entrer dans la joie des fils de Dieu. Cette joie que nul ne peut nous ravir.
24/04/11
Jean 20, 1-9 (p. 433)
Nous voici parvenus au sommet de notre année chrétienne. Même si, en France et dans d’autres pays chrétiens, Noël et le dimanche des Rameaux sont des fêtes plus populaires que Pâques, il n’en reste pas moins vrai que l’événement de Pâques est au centre de notre foi chrétienne. Et tout le temps pascal nous est donné par l’Eglise pour faire mémoire de cet événement et en saisir toute la puissance dans nos vies, particulièrement à travers les sacrements. La fête de ce jour est donc inséparable des autres fêtes du temps pascal : l’Ascension du Seigneur et la Pentecôte. D’une certaine manière c’est avec la Pentecôte, le don de l’Esprit Saint, que l’une des dernières paroles du Christ en croix se réalisera : « Tout est accompli ». Oui, avec la venue du Saint Esprit sur la première Eglise le Ressuscité a mené son œuvre de salut, de réconciliation et de sanctification à sa perfection.
Avant de méditer la page d’Evangile qui nous est proposée par la liturgie deux remarques s’imposent. Tout d’abord nous ne trouvons pas dans le Nouveau Testament une description du moment de la résurrection du Christ. L’entrée définitive du Seigneur Jésus dans la vie et la gloire de Dieu échappe à tout regard humain. Sa victoire sur la mort ne se constate pas comme si elle ressemblait à une victoire humaine à l’issue d’une bataille ordinaire. Ensuite l’Eglise, pour ce saint jour de Pâques, a choisi un Evangile du tombeau vide et non pas l’une des manifestations du Ressuscité aux apôtres et aux saintes femmes. Il n’y a donc dans cette page évangélique rien d’extraordinaire, rien qui puisse nous en mettre plein la vue. Elle est le contraire d’une mise en scène grandiose telle que les artistes ont pu parfois l’imaginer. Ici le témoignage est simple et humble pour un événement unique dans l’histoire de toute notre humanité. Cette discrétion et cette retenue dans la manière de présenter le matin de Pâques nous rappellent à quel point la foi en la résurrection a mis bien du temps avant de conquérir le cœur des premiers disciples, eux qui « n’avaient pas vu que, d’après l’Ecriture, il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts ». Ces hommes et ces femmes n’étaient pas d’un tempérament crédule, bien au contraire.
Dès que le repos du Sabbat est terminé Marie Madeleine se lève très tôt pour aller au tombeau. Marie, la pécheresse convertie, se met en route de grand matin non pas parce qu’elle pense voir Jésus Ressuscité mais parce que son amour pour lui est immense. Marie est une femme fidèle à son Maître et elle veut l’honorer une dernière fois et peut-être achever, comme nous le disent les autres Evangiles, la toilette funéraire du crucifié. Et que voit-elle donc ? Le tombeau ouvert ! Sans même pénétrer à l’intérieur de celui-ci elle repart en courant vers la ville pour annoncer cette nouvelle à Pierre et à Jean. Ce n’est pas la Bonne Nouvelle de Pâques qu’elle leur annonce, pour elle il s’agit d’un enlèvement, le cadavre de Jésus aurait été volé, malgré les gardes postés devant le tombeau à la demande des prêtres Juifs. Et voilà Pierre et Jean qui se mettent à courir pour aller vérifier les dires de Marie Madeleine. Jean est le plus rapide, il arrive en premier. Probablement parce que son attachement pour Jésus est plus fort. Il a été le seul homme fidèle dans cette histoire, présent au pied de la croix avec les saintes femmes. Sans entrer dans le tombeau pour laisser à Pierre le rôle de premier témoin il voit le linceul. Pierre de même constate que les linges funéraires sont là mais sans le corps de Jésus. Voilà les premiers signes de Pâques : un tombeau vide, des linges funéraires. Ces signes suffisent à donner à Jean la foi pascale en la résurrection du Seigneur : « Il vit et il crut ».
Cet Evangile de Pâques peut nous amener à deux réflexions pour notre vie chrétienne. L’une sur les signes de Dieu, l’autre sur la puissance de ce mystère. Pendant le temps pascal nous pourrions prier en ayant dans le cœur ces deux interrogations. Dans notre monde, dans ma vie, bien des événements peuvent me ramener au vendredi saint et au sentiment de mon impuissance devant le mal en moi et autour de moi. Je dois demander à l’Esprit Saint, l’Esprit de mon baptême et de ma confirmation, de me faire voir les signes de Dieu. Ils sont souvent humbles et discrets, étouffés par une actualité désespérante. En tant que disciple du Ressuscité je ne suis pas épargné par le mal, encore moins insensible à sa présence. Mais ma foi me donne de le vaincre déjà en reconnaissant les signes de Dieu. Ensuite je sais que cette réalité de Pâques peut changer ma vie. L’Evangile est vraiment puissance de Dieu en ma faveur. Je peux demander à l’Esprit Saint de réveiller ma foi, de la rendre plus forte. Car c’est ma foi en Jésus Ressuscité qui me permettra effectivement de changer, de devenir meilleur jour après jour, et de rayonner autour de moi la bonté et la lumière de Dieu. En tant que disciple de Jésus je ne peux jamais me résigner ou m’avouer vaincu devant les multiples manifestations du mal et de la mort. Ce Jésus Ressuscité, ce Vivant, il n’est pas seulement à la droite du Père, dans la gloire de la Trinité. Il est auprès de moi, avec moi et en moi. Que pourrais-je craindre désormais ? Si ce n’est de ne pas assez l’aimer ou de lui être infidèle ? C’est dans un jardin que la mort a semblé triompher du Fils de Dieu. Ce jardin du tombeau neuf puis du tombeau vide, rappel du jardin d’Eden dans lequel nous avions perdu l’amitié de Dieu. En me donnant part à son Esprit d’amour, le Ressuscité fait de mon cœur son jardin, son nouveau paradis, et jour après jour il est le divin cultivateur, celui qui me renouvelle et me donne un cœur aimant, un cœur de fils, un cœur à son image. Alors si mon cœur se laisse vraiment embraser par le feu de l’amour divin, mes mains s’ouvriront pour prier le Père et pour servir mes frères. Alors mes pieds courront sur les chemins de la réconciliation et de la paix.
Le premier mai Jean-Paul II sera déclaré bienheureux. Ce géant de la foi, signe de Dieu pour notre temps, avait commencé son pontificat par un appel, écho de l’événement de Pâques : « N’ayez pas peur ! » Et il l’a vécu à travers tout son pontificat : géant de la foi, il a été un homme audacieux et courageux dans bien des domaines. Moi aussi je peux être un chrétien bienheureux. Si je laisse le Christ Vivant me libérer de plus en plus de l’esclavage de la peur pour entrer dans la joie des fils de Dieu. Cette joie que nul ne peut nous ravir.
dimanche 10 avril 2011
5ème dimanche de Carême
5ème dimanche de Carême / A
10/04/2011
Jean 11, 1-45 (p. 220)
En relatant le récit de la résurrection de Lazare, saint Jean fait le lien avec l’Evangile de dimanche dernier, celui de la guérison de l’aveugle de naissance. Nous pouvons repérer au moins trois points communs entre ces deux récits. Tout d’abord le mal (handicap ou maladie qui conduit à la mort) doit servir à manifester l’action de Dieu en notre faveur ainsi que la puissance et la gloire de Dieu révélées en Jésus-Christ. Ensuite le thème de la lumière est présent : Jésus agit au nom de Dieu alors qu’il fait encore jour et il est lui-même cette lumière. Les jours des ténèbres, ceux de la Passion désormais toute proche, sembleront empêcher l’action de Dieu en tuant Jésus. Enfin Jean donne très peu de place au récit du miracle en lui-même (ici deux versets seulement !). L’évangéliste s’intéresse davantage à la préparation et aux conséquences du miracle, et bien sûr à sa signification.
La résurrection de Lazare est le dernier et le 7ème des miracles accomplis par Jésus dans l’Evangile de Jean. Les spécialistes de cet Evangile appellent les miracles qui y sont consignés des signes, car encore une fois c’est bien leur signification qui est la plus importante, c’est-à-dire ce qu’ils révèlent du plan de Dieu en notre faveur dans le cadre de la Nouvelle Alliance.
A deux reprises le Seigneur affirme qu’il va accomplir ce dernier signe avant sa Passion afin que ses disciples puissent croire en Lui. Et c’est bien la foi qui est au centre de cette page d’Evangile. Et l’objectif de Jésus est atteint puisque de nombreux Juifs crurent en lui. En même temps le dialogue entre le Seigneur et Marthe, l’une des sœurs de Lazare, nous montre que la foi est aussi une condition pour que le signe puisse être donné et reçu : « Crois-tu cela ? », crois-tu vraiment que je suis l’envoyé du Père et qu’en ma personne se trouve la vie divine ? Crois-tu que je suis la résurrection et la vie pour tous ceux qui mettent leur foi en moi ? Et Marthe de répondre en faisant une belle profession de foi : « Oui, tu es le Messie, je le crois ; tu es le Fils de Dieu, celui qui vient dans le monde ». La foi demeure toujours un acte libre de notre part. Les signes nous sont donnés par Dieu pour nous aider à faire ce pas de la confiance en Jésus. Mais aucun signe ne peut nous contraindre à croire. Et pour accueillir les signes de Dieu il faut, à la manière de Marthe, être déjà disposé à la foi. Il ressort de ce récit que l’acte de croire est à la fois une condition et une conséquence du signe. « Si tu crois, tu verras la gloire de Dieu ». Nous ne pouvons bien interpréter le signe divin que si quelque part nous sommes déjà ouverts à la présence et à l’action de Dieu en notre monde.
Nous pourrions peut-être penser : c’est bien beau tout cela, mais en quoi sommes-nous concernés ? Nous n’avons pas vu de résurrection et nous n’en verrons probablement jamais. En tant que chrétiens quels signes de Dieu percevons-nous aujourd’hui ? Voilà la question à laquelle nous conduit ce récit. Avant d’aller plus loin une allusion à l’Evangile de saint Luc me paraît éclairante. C’est la conclusion de la parabole de Lazare (rien à voir avec notre Lazare !) et du mauvais riche qui souffre loin de Dieu et qui prie pour que ses frères vivants encore sur terre puissent se convertir. La réponse d’Abraham est intéressante pour nous : « S’ils n’écoutent pas Moïse et les prophètes, même avec la résurrection d’un mort on ne les convaincrait pas ». Le premier signe de Dieu dans nos vies c’est donc sa Parole reçue en Eglise. Et c’est à la lumière de cette Parole que nous comprenons les signes des temps dont nous parle le Concile Vatican II. Hasard, destin, fatalité ? Non, les événements de notre vie personnelle comme ceux du monde peuvent devenir signes de Dieu si nous savons les accueillir en chrétiens. Tout ce qui est positif nous pousse bien sûr à la louange et au remerciement. Cependant même ce qui porte la marque du mal peut être signe de Dieu pour nous. Les catastrophes naturelles et écologiques, nombreuses ces derniers temps, ne sont pas des punitions de Dieu. Elles sont des signes qui nous invitent à l’humilité et à la sagesse. Quand l’homme se croit tout-puissant, la nature le ramène à la réalité de sa condition de créature faible et limitée. Ces signes nous invitent à revoir nos modes de vie basés sur le gaspillage et la surconsommation. Le spectacle navrant de ces hommes politiques ou chefs d’Etat qui préfèrent mettre leur pays à feu et à sang plutôt que de se retirer et de renoncer au pouvoir est la meilleure des leçons de morale. Dieu nous donne un signe aussi à travers cela : nous devrions être bien avertis des effets terriblement nocifs de la soif de pouvoir et de domination, pas seulement au niveau politique mais aussi au niveau personnel qui est le notre. C’est aussi le signe que lorsque la politique a oublié sa noble raison d’être, le service du bien commun, elle peut déstabiliser des peuples entiers. En France la montée de l’abstention aux élections est un signe. Dieu peut très bien se servir ce de qui est qualifié comme un manque de civisme pour remettre les hommes politiques devant leur responsabilité et la dignité de leur mission. Mais ce signe sera-t-il entendu ? Le malheur de beaucoup d’entre nous semble bien être le suivant : malgré les signes des temps nous refusons de changer, et habituellement nous attendons qu’il soit trop tard (une catastrophe, une crise mondiale ou une révolution) pour nous poser les bonnes questions et retrousser enfin nos manches.
Nous qui avons la grâce de croire en Jésus, nous savons, avec saint Paul, « que pour ceux qui aiment Dieu, ceux qu’il a choisis et appelés, Dieu se sert de tout pour leur bien ».
10/04/2011
Jean 11, 1-45 (p. 220)
En relatant le récit de la résurrection de Lazare, saint Jean fait le lien avec l’Evangile de dimanche dernier, celui de la guérison de l’aveugle de naissance. Nous pouvons repérer au moins trois points communs entre ces deux récits. Tout d’abord le mal (handicap ou maladie qui conduit à la mort) doit servir à manifester l’action de Dieu en notre faveur ainsi que la puissance et la gloire de Dieu révélées en Jésus-Christ. Ensuite le thème de la lumière est présent : Jésus agit au nom de Dieu alors qu’il fait encore jour et il est lui-même cette lumière. Les jours des ténèbres, ceux de la Passion désormais toute proche, sembleront empêcher l’action de Dieu en tuant Jésus. Enfin Jean donne très peu de place au récit du miracle en lui-même (ici deux versets seulement !). L’évangéliste s’intéresse davantage à la préparation et aux conséquences du miracle, et bien sûr à sa signification.
La résurrection de Lazare est le dernier et le 7ème des miracles accomplis par Jésus dans l’Evangile de Jean. Les spécialistes de cet Evangile appellent les miracles qui y sont consignés des signes, car encore une fois c’est bien leur signification qui est la plus importante, c’est-à-dire ce qu’ils révèlent du plan de Dieu en notre faveur dans le cadre de la Nouvelle Alliance.
A deux reprises le Seigneur affirme qu’il va accomplir ce dernier signe avant sa Passion afin que ses disciples puissent croire en Lui. Et c’est bien la foi qui est au centre de cette page d’Evangile. Et l’objectif de Jésus est atteint puisque de nombreux Juifs crurent en lui. En même temps le dialogue entre le Seigneur et Marthe, l’une des sœurs de Lazare, nous montre que la foi est aussi une condition pour que le signe puisse être donné et reçu : « Crois-tu cela ? », crois-tu vraiment que je suis l’envoyé du Père et qu’en ma personne se trouve la vie divine ? Crois-tu que je suis la résurrection et la vie pour tous ceux qui mettent leur foi en moi ? Et Marthe de répondre en faisant une belle profession de foi : « Oui, tu es le Messie, je le crois ; tu es le Fils de Dieu, celui qui vient dans le monde ». La foi demeure toujours un acte libre de notre part. Les signes nous sont donnés par Dieu pour nous aider à faire ce pas de la confiance en Jésus. Mais aucun signe ne peut nous contraindre à croire. Et pour accueillir les signes de Dieu il faut, à la manière de Marthe, être déjà disposé à la foi. Il ressort de ce récit que l’acte de croire est à la fois une condition et une conséquence du signe. « Si tu crois, tu verras la gloire de Dieu ». Nous ne pouvons bien interpréter le signe divin que si quelque part nous sommes déjà ouverts à la présence et à l’action de Dieu en notre monde.
Nous pourrions peut-être penser : c’est bien beau tout cela, mais en quoi sommes-nous concernés ? Nous n’avons pas vu de résurrection et nous n’en verrons probablement jamais. En tant que chrétiens quels signes de Dieu percevons-nous aujourd’hui ? Voilà la question à laquelle nous conduit ce récit. Avant d’aller plus loin une allusion à l’Evangile de saint Luc me paraît éclairante. C’est la conclusion de la parabole de Lazare (rien à voir avec notre Lazare !) et du mauvais riche qui souffre loin de Dieu et qui prie pour que ses frères vivants encore sur terre puissent se convertir. La réponse d’Abraham est intéressante pour nous : « S’ils n’écoutent pas Moïse et les prophètes, même avec la résurrection d’un mort on ne les convaincrait pas ». Le premier signe de Dieu dans nos vies c’est donc sa Parole reçue en Eglise. Et c’est à la lumière de cette Parole que nous comprenons les signes des temps dont nous parle le Concile Vatican II. Hasard, destin, fatalité ? Non, les événements de notre vie personnelle comme ceux du monde peuvent devenir signes de Dieu si nous savons les accueillir en chrétiens. Tout ce qui est positif nous pousse bien sûr à la louange et au remerciement. Cependant même ce qui porte la marque du mal peut être signe de Dieu pour nous. Les catastrophes naturelles et écologiques, nombreuses ces derniers temps, ne sont pas des punitions de Dieu. Elles sont des signes qui nous invitent à l’humilité et à la sagesse. Quand l’homme se croit tout-puissant, la nature le ramène à la réalité de sa condition de créature faible et limitée. Ces signes nous invitent à revoir nos modes de vie basés sur le gaspillage et la surconsommation. Le spectacle navrant de ces hommes politiques ou chefs d’Etat qui préfèrent mettre leur pays à feu et à sang plutôt que de se retirer et de renoncer au pouvoir est la meilleure des leçons de morale. Dieu nous donne un signe aussi à travers cela : nous devrions être bien avertis des effets terriblement nocifs de la soif de pouvoir et de domination, pas seulement au niveau politique mais aussi au niveau personnel qui est le notre. C’est aussi le signe que lorsque la politique a oublié sa noble raison d’être, le service du bien commun, elle peut déstabiliser des peuples entiers. En France la montée de l’abstention aux élections est un signe. Dieu peut très bien se servir ce de qui est qualifié comme un manque de civisme pour remettre les hommes politiques devant leur responsabilité et la dignité de leur mission. Mais ce signe sera-t-il entendu ? Le malheur de beaucoup d’entre nous semble bien être le suivant : malgré les signes des temps nous refusons de changer, et habituellement nous attendons qu’il soit trop tard (une catastrophe, une crise mondiale ou une révolution) pour nous poser les bonnes questions et retrousser enfin nos manches.
Nous qui avons la grâce de croire en Jésus, nous savons, avec saint Paul, « que pour ceux qui aiment Dieu, ceux qu’il a choisis et appelés, Dieu se sert de tout pour leur bien ».
dimanche 3 avril 2011
4ème dimanche de Carême
4ème dimanche de Carême / A
3/04/2011
Jean 9, 1-41 (p. 165)
Pendant le Carême l’année liturgique A nous fait entendre de longs passages de l’Evangile selon saint Jean. Dimanche dernier c’était la rencontre de Jésus avec la femme de Samarie, aujourd’hui c’est la guérison de l’aveugle de naissance et dimanche prochain nous entendrons le récit de la résurrection de Lazare. Dans l'Eglise des premiers siècles ces Évangiles étaient utilisés pour accompagner la marche des catéchumènes vers Pâques et donc vers leur initiation chrétienne. Ces adultes recevaient lors de la nuit pascale les trois sacrements de l’initiation chrétienne : le baptême, la confirmation et la communion au corps du Christ. Cette pratique se poursuit de nos jours pour les adultes qui demandent le baptême. Les Évangiles de Carême, issus de saint Jean, étaient donc compris comme des catéchèses sur la foi et le baptême.
Dans le récit de la guérison de l’aveugle de naissance ce n’est pas la guérison en elle-même qui prend le plus de place mais bien ses conséquences. De cet Évangile nous pouvons retirer plusieurs enseignements.
Le premier concerne l’interprétation religieuse de la maladie ou du handicap. Face à un être humain qui vient au monde avec un handicap physique ou mental nous ne pouvons pas nous empêcher de poser la même question que les disciples : Pourquoi ? Pourquoi lui et pas moi ? Pourquoi lui et pas un autre ? La vie serait-elle une espèce de loterie avec des numéros gagnants et des numéros perdants ? Et que fait Dieu créateur dans tout cela ? A l’époque de Jésus l’explication paraissait simple : le handicap et la maladie étaient compris comme des conséquences du péché, comme une punition de Dieu… D’où la question des disciples : « Est-ce lui qui a péché, ou bien ses parents ? » Le livre de Job avait déjà abordé cette redoutable question du pourquoi de la souffrance sans y apporter de réponse satisfaisante. Mais l’histoire de Job était déjà une sévère critique de la théorie traditionnelle qui expliquait la souffrance des hommes par les péchés qu’ils avaient pu commettre. Job était un homme juste et droit et pourtant il a dû endurer toutes les épreuves possibles et imaginables. Jésus demeure dans la même ligne en refusant d’associer le handicap de cet homme à son péché : « Ni lui, ni ses parents. Mais l’action de Dieu devait se manifester en lui. » Nous le constatons, le Seigneur ne nous explique pas le pourquoi de ce mal, de ce handicap qui a touché cet homme dès sa naissance. Ce qu’il affirme sur l’action de Dieu reste bien mystérieux. Une interprétation révoltante serait de dire que Dieu crée des humains handicapés pour pouvoir ensuite démontrer sa puissance en les guérissant… Une autre interprétation est possible : le mal est sans explication satisfaisante mais Dieu a le pouvoir de tirer du bien de ce mal. Et en effet en guérissant cet aveugle de naissance Jésus va lui faire en même temps le don de la foi. Croire n’est-ce pas d’une certaine manière voir ce que d’autres ne voient pas ? Croire n’est-ce pas reconnaître la présence et l’action de Dieu dans nos vies ?
Le deuxième enseignement de cet Évangile concerne justement la foi à laquelle cet homme guéri accède : « Je crois, Seigneur ». Toute la polémique avec les pharisiens va dans ce sens. Ils sont choqués, comme d’habitude, parce que Jésus a rendu la vue à cet homme le jour du Sabbat, le jour du repos sacré. Dans les Évangiles Jésus ne cesse de dire qu’il est permis de faire le bien le jour du Sabbat, et que le Sabbat est fait pour l’homme et non pas le contraire. C’est à propos de l’identité de Jésus que le miraculé et les pharisiens vont s’opposer avec violence. Le raisonnement de celui qui était forcé de mendier pour survivre est simple : cet homme m’a guéri et m’a fait du bien, c’est donc un homme de Dieu, un prophète. « Si cet homme-là ne venait pas de Dieu, il ne pourrait rien faire ». Pour les pharisiens le fait que Jésus ait fait cette guérison le jour du Sabbat prouve au contraire que c’est un pécheur qui ne respecte pas la Loi de Moïse. D’un côté la guérison amène à la foi et au salut, de l’autre elle révèle l’endurcissement de cœur des pharisiens, leur refus de croire malgré l’évidence. Un miracle ne force donc jamais notre liberté. La foi est toujours un acte libre. Face au témoignage simple et clair de l´homme qui a retrouvé la vue, les pharisiens l’injurient et lui montrent tout le mépris qu’ils ont pour les personnes de sa condition : « Tu es tout entier plongé dans le péché depuis ta naissance, et tu nous fais la leçon ? » La première réalité qui les empêche de croire, de se rendre à l’évidence, c’est bien leur propre péché d’orgueil. La deuxième réalité qui les conduit à la condamnation alors que le salut leur est offert, c’est leur vision erronée de la tradition religieuse. Ils se réfèrent sans cesse à la Loi de Moïse : Dieu a parlé à Moïse. Ce sont des hommes du passé qui oublient que, si Dieu a parlé à Moïse, il continue de se manifester au présent, aujourd'hui. Oui, ces gardiens de la tradition sont aveugles car ils sont incapables de reconnaître les signes de Dieu, son action dans le temps qui est le leur. Ils sont les conservateurs scrupuleux d’une tradition qui ne voient pas que la religion véritable c’est d’abord d’entrer dans une relation vivante avec Dieu aujourd’hui.
D’où la remise en question dont parle le Seigneur à la fin de cette page évangélique : « Je suis venu en ce monde pour une remise en question : pour que ceux qui ne voient pas puissent voir, et que ceux qui voient deviennent aveugles ». Le dernier verset de cet Évangile nous éclaire sur le sens de cette formule énigmatique dans sa deuxième partie : « pour que ceux qui voient deviennent aveugles ». « Si vous étiez des aveugles, vous n’auriez pas de péché ; mais du moment que vous dites : Nous voyons ! votre péché demeure ». Oui, Jésus est bien venu pour donner la foi aux aveugles que nous sommes tous. Sa présence et son action ont aussi eu comme conséquence que ceux qui croyaient voir sont devenus aveugles à cause de leur orgueil et de l’endurcissement de leur cœur. La suite nous la connaissons : ils l’ont condamné à la mort de la croix.
3/04/2011
Jean 9, 1-41 (p. 165)
Pendant le Carême l’année liturgique A nous fait entendre de longs passages de l’Evangile selon saint Jean. Dimanche dernier c’était la rencontre de Jésus avec la femme de Samarie, aujourd’hui c’est la guérison de l’aveugle de naissance et dimanche prochain nous entendrons le récit de la résurrection de Lazare. Dans l'Eglise des premiers siècles ces Évangiles étaient utilisés pour accompagner la marche des catéchumènes vers Pâques et donc vers leur initiation chrétienne. Ces adultes recevaient lors de la nuit pascale les trois sacrements de l’initiation chrétienne : le baptême, la confirmation et la communion au corps du Christ. Cette pratique se poursuit de nos jours pour les adultes qui demandent le baptême. Les Évangiles de Carême, issus de saint Jean, étaient donc compris comme des catéchèses sur la foi et le baptême.
Dans le récit de la guérison de l’aveugle de naissance ce n’est pas la guérison en elle-même qui prend le plus de place mais bien ses conséquences. De cet Évangile nous pouvons retirer plusieurs enseignements.
Le premier concerne l’interprétation religieuse de la maladie ou du handicap. Face à un être humain qui vient au monde avec un handicap physique ou mental nous ne pouvons pas nous empêcher de poser la même question que les disciples : Pourquoi ? Pourquoi lui et pas moi ? Pourquoi lui et pas un autre ? La vie serait-elle une espèce de loterie avec des numéros gagnants et des numéros perdants ? Et que fait Dieu créateur dans tout cela ? A l’époque de Jésus l’explication paraissait simple : le handicap et la maladie étaient compris comme des conséquences du péché, comme une punition de Dieu… D’où la question des disciples : « Est-ce lui qui a péché, ou bien ses parents ? » Le livre de Job avait déjà abordé cette redoutable question du pourquoi de la souffrance sans y apporter de réponse satisfaisante. Mais l’histoire de Job était déjà une sévère critique de la théorie traditionnelle qui expliquait la souffrance des hommes par les péchés qu’ils avaient pu commettre. Job était un homme juste et droit et pourtant il a dû endurer toutes les épreuves possibles et imaginables. Jésus demeure dans la même ligne en refusant d’associer le handicap de cet homme à son péché : « Ni lui, ni ses parents. Mais l’action de Dieu devait se manifester en lui. » Nous le constatons, le Seigneur ne nous explique pas le pourquoi de ce mal, de ce handicap qui a touché cet homme dès sa naissance. Ce qu’il affirme sur l’action de Dieu reste bien mystérieux. Une interprétation révoltante serait de dire que Dieu crée des humains handicapés pour pouvoir ensuite démontrer sa puissance en les guérissant… Une autre interprétation est possible : le mal est sans explication satisfaisante mais Dieu a le pouvoir de tirer du bien de ce mal. Et en effet en guérissant cet aveugle de naissance Jésus va lui faire en même temps le don de la foi. Croire n’est-ce pas d’une certaine manière voir ce que d’autres ne voient pas ? Croire n’est-ce pas reconnaître la présence et l’action de Dieu dans nos vies ?
Le deuxième enseignement de cet Évangile concerne justement la foi à laquelle cet homme guéri accède : « Je crois, Seigneur ». Toute la polémique avec les pharisiens va dans ce sens. Ils sont choqués, comme d’habitude, parce que Jésus a rendu la vue à cet homme le jour du Sabbat, le jour du repos sacré. Dans les Évangiles Jésus ne cesse de dire qu’il est permis de faire le bien le jour du Sabbat, et que le Sabbat est fait pour l’homme et non pas le contraire. C’est à propos de l’identité de Jésus que le miraculé et les pharisiens vont s’opposer avec violence. Le raisonnement de celui qui était forcé de mendier pour survivre est simple : cet homme m’a guéri et m’a fait du bien, c’est donc un homme de Dieu, un prophète. « Si cet homme-là ne venait pas de Dieu, il ne pourrait rien faire ». Pour les pharisiens le fait que Jésus ait fait cette guérison le jour du Sabbat prouve au contraire que c’est un pécheur qui ne respecte pas la Loi de Moïse. D’un côté la guérison amène à la foi et au salut, de l’autre elle révèle l’endurcissement de cœur des pharisiens, leur refus de croire malgré l’évidence. Un miracle ne force donc jamais notre liberté. La foi est toujours un acte libre. Face au témoignage simple et clair de l´homme qui a retrouvé la vue, les pharisiens l’injurient et lui montrent tout le mépris qu’ils ont pour les personnes de sa condition : « Tu es tout entier plongé dans le péché depuis ta naissance, et tu nous fais la leçon ? » La première réalité qui les empêche de croire, de se rendre à l’évidence, c’est bien leur propre péché d’orgueil. La deuxième réalité qui les conduit à la condamnation alors que le salut leur est offert, c’est leur vision erronée de la tradition religieuse. Ils se réfèrent sans cesse à la Loi de Moïse : Dieu a parlé à Moïse. Ce sont des hommes du passé qui oublient que, si Dieu a parlé à Moïse, il continue de se manifester au présent, aujourd'hui. Oui, ces gardiens de la tradition sont aveugles car ils sont incapables de reconnaître les signes de Dieu, son action dans le temps qui est le leur. Ils sont les conservateurs scrupuleux d’une tradition qui ne voient pas que la religion véritable c’est d’abord d’entrer dans une relation vivante avec Dieu aujourd’hui.
D’où la remise en question dont parle le Seigneur à la fin de cette page évangélique : « Je suis venu en ce monde pour une remise en question : pour que ceux qui ne voient pas puissent voir, et que ceux qui voient deviennent aveugles ». Le dernier verset de cet Évangile nous éclaire sur le sens de cette formule énigmatique dans sa deuxième partie : « pour que ceux qui voient deviennent aveugles ». « Si vous étiez des aveugles, vous n’auriez pas de péché ; mais du moment que vous dites : Nous voyons ! votre péché demeure ». Oui, Jésus est bien venu pour donner la foi aux aveugles que nous sommes tous. Sa présence et son action ont aussi eu comme conséquence que ceux qui croyaient voir sont devenus aveugles à cause de leur orgueil et de l’endurcissement de leur cœur. La suite nous la connaissons : ils l’ont condamné à la mort de la croix.
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