Méditation
pour la solennité de Pâques
9/04/2023
Au terme
de ce Carême nous célébrons à nouveau l’événement de la Pâque, la résurrection
de Jésus. Cette victoire de l’amour sur la haine, de la vie sur la mort est
l’œuvre de Dieu en Jésus-Christ. Toute la vie du Christ pendant le temps de son
incarnation nous enseigne la valeur et la dignité de notre vie humaine, la
valeur de toute vie au sein de la création. Les miracles de guérison, les
enseignements, la miséricorde qui pardonne les péchés, enfin la Passion, la
mort et la résurrection du Seigneur peuvent se comprendre à la lumière de ce
que Jésus affirme dans l’Evangile selon saint Jean : Moi, je suis venu pour que les brebis aient la vie, la vie en
abondance. Moi, je suis le bon pasteur, le vrai berger, qui donne sa vie pour
ses brebis. (Jean 10, 10.11)
A Pâques
nous célébrons cette surabondance de vie. Il s’agit de notre vie humaine,
terrestre, qui est appelée à entrer tout entière dans la joie de Dieu en se
laissant transformer par la vie du Christ ressuscité. Pierre résume ainsi pour
ses auditeurs le mystère de la Pâque : Vous
avez tué le Prince de la vie, lui que Dieu a ressuscité d’entre les morts, nous
en sommes témoins. (Actes 3, 15).
La
formule est saisissante et résume bien en effet le drame de l’histoire de notre
humanité. L’homme pécheur, l’homme mauvais est homicide. Il donne la mort et la
propage. Dieu de son côté répare ce mal que nous commettons en nous proposant
toujours de choisir le chemin de la vie et surtout en ressuscitant son Fils Jésus.
Célébrer Pâque ne signifie pas se voiler la face et ne pas voir tout le mal
dont souffre l’humanité actuellement. Un mal qui n’est jamais une fatalité mais
dont nous sommes à divers niveaux partie prenante. Devant le tombeau vide et
ouvert une espérance nouvelle se lève, celle de la civilisation de la vie qui
est toujours la civilisation de l’amour. Le drame de l’humanité se joue en
chacun de nous au niveau de notre conscience et de notre cœur. C’est celui de
notre coopération ou pas à l’œuvre de Dieu. Remplis de l’amour du Christ et de
la grâce de l’Esprit Saint, nous avons tous la possibilité de répondre oui à
l’appel du Christ en vue d’une civilisation de la vie.
En 2020
Thomas Guénolé a écrit un livre choc intitulé Le livre noir de la mondialisation. A partir d’un sérieux travail
de recherche s’appuyant sur les statistiques disponibles il a calculé le coût
humain de notre organisation économique entre 1992 et 2017, soit en 25
ans : 400 millions de morts parmi lesquels pour ne prendre que quelques
exemples : 11 millions de morts de faim malgré l’abondance de
nourriture ; 56 millions de morts causées par les conditions de travail
dont l’esclavagisme moderne ; 69 millions de morts de la catastrophe
écologique ; 256 millions de morts de maladies pourtant soignables etc. Je
ne vous donne pas ces chiffres pour vous plonger dans le désespoir. Je vous les
donne, car, affirme l’auteur, rien de tout cela n’était une fatalité. Cette
civilisation de la mort est le résultat de choix de société, de choix
politiques et économiques mauvais et immoraux. Par exemple quand des Etats
préfèrent investir des sommes d’argent colossales dans la course à l’armement
et la préparation des guerres plutôt que dans la lutte contre la faim ou
l’accès pour tous à l’éducation, aux soins et aux médicaments. Mais au cœur de
cet énorme massacre silencieux il y a une constante : faire passer
systématiquement le profit maximum au-dessus de toute considération morale et
cela pour l’enrichissement d’une infime minorité. C’est bien la cupidité qui
gouverne cette civilisation de mort. L’amour immodéré de l’argent est non
seulement une folie, il est criminel et tue chaque jour. Saint Paul l’avait
déjà clairement compris en son temps, mais que dirait-il aujourd’hui face à la
multiplication des milliardaires et des profits colossaux ? La racine de tous les maux, c’est l’amour de
l’argent (1 Timothée 6, 10).
L’Eglise
dans sa sagesse nous offre sa doctrine sociale pour incarner dans notre vie, là
où nous vivons, la bonne nouvelle de la résurrection du Seigneur. Aujourd’hui
un chrétien, ou même un homme de bonne volonté comme il en existe tant, qui
prend au sérieux l’enseignement du Christ a toutes les chances d’avoir des
problèmes ou d’être persécuté. Cela ne doit pas nous empêcher de faire vivre le
message des Béatitudes qui est un antidote aux fausses valeurs véhiculées par
ce que l’on pourrait qualifier avec raison de domination universelle du dieu Argent
et de la technique. Chacun de nous a la possibilité de s’engager avec humilité
et résolution pour la dignité du travail humain, pour le respect de la
création, donc pour l’écologie, pour la promotion de la paix et de la justice
entre les nations et dans notre pays, pour l’accès de tous aux biens de la
terre, nourriture et eau par le partage et la solidarité… Le trésor de notre
foi est le meilleur rempart contre la dictature de l’argent qui tue et détruit
lorsqu’il est érigé en idole et critère du succès. Notre foi est l’espérance
d’un monde meilleur, d’un monde profondément converti à la vie, sur cette terre
et pour la vie éternelle. Amen.
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