Marc 14,
12-16.22-26
Dimanche
dernier nous avons célébré la Sainte Trinité. Nous avons fait mémoire du Dieu
trois fois saint qui est amour. La liturgie dans sa cohérence nous fait
célébrer en ce dimanche le plus grand don de l’amour de Dieu, le saint
sacrement du corps et du sang du Seigneur. L’Evangile nous montre bien que
c’est dans le cadre de la célébration de la Pâque juive que Jésus nous a fait
don du sacrement de l’eucharistie. Au lieu de prendre dans ses mains l’agneau
pascal pour en faire le sacrement de son corps offert en sacrifice, il choisit
le pain et le vin, se situant ainsi dans la lignée du sacerdoce de
Melchisédech. Ce mystérieux personnage du livre de la Genèse est appelé prêtre
du Dieu très haut. Lors de sa rencontre avec Abram, il apporte du pain et du
vin. Le psaume 109, psaume messianique que l’Eglise prie lors des vêpres du
dimanche, annonce le Christ roi et prêtre selon l’ordre de Melchisédech. Lors
de l’institution de l’eucharistie, Jésus accomplit cette prophétie. Il ne prend
pas la suite des prêtres juifs qui desservaient le temple, issus de la tribu de
Lévi et chargés d’offrir les sacrifices d’animaux. Le soir du jeudi saint,
Jésus abolit tous les sacrifices de l’ancienne alliance, ce qui sera manifesté
de manière symbolique le lendemain lorsque le rideau du sanctuaire se déchirera
en deux, du haut en bas, au moment même de la mort de Jésus en croix (Mc 15, 38).
La
structure essentielle du sacrement de l’eucharistie est toujours demeurée la
même malgré les changements extérieurs de rites et de langues. L’apologiste et
martyr saint Justin nous en donne un témoignage datant du 2ème
siècle. Dès l’antiquité chrétienne l’eucharistie se célèbre selon une structure
en deux parties : tout d’abord la liturgie de la Parole et ensuite la
liturgie du sacrifice eucharistique. Il est très intéressant de replacer dans
son contexte historique juif cette structure du sacrement chrétien. Pour ce
faire il faut rappeler la destruction du temple de Jérusalem en 70 et la fin du
sacerdoce lévitique ainsi que des sacrifices d’animaux et se souvenir de la
liturgie pratiquée en dehors du temple dans les synagogues. Au chapitre 4 de
saint Luc nous voyons Jésus participer au culte du sabbat dans la synagogue de
Nazareth. Ce culte synagogal était une liturgie de la Parole dans laquelle on
proclamait les écrits de la Torah et des Prophètes qui étaient ensuite
commentés. Dans la synagogue aucun sacrifice d’animaux puisque ceux-ci ne
pouvaient être réalisés que dans le cadre de l’unique temple de Jérusalem. La
première partie de notre messe est donc une reprise chrétienne du culte de la
synagogue, reprise qui nous fait comprendre que Jésus accomplit les Ecritures
de l’ancienne alliance dans sa personne comme il le dit lui-même lorsqu’il commente
un passage d’Isaïe dans la synagogue de la ville où il avait grandi : Aujourd’hui s’accomplit ce passage de
l’Écriture que vous venez d’entendre.
La
deuxième partie de la messe consiste à célébrer le sacrifice d’action de grâce
en refaisant ce que Jésus fit le soir du jeudi saint. Eucharistie signifie
précisément la prière d’action de grâce, d’où le choix du psaume 115 : je t’offrirai le sacrifice d’action de
grâce. Ce sacrifice correspond aux sacrifices d’animaux qui se pratiquaient
dans le temple. Nous voyons comment la première partie de notre messe reprend
le culte de la synagogue et la seconde celui du temple. Aux sacrifices
d’animaux le Seigneur substitue le sacrifice de sa personne qui nous est rendu
présent en vue de la communion sous les espèces du pain et du vin. En
abolissant les sacrifices, rendus impossible par la destruction du temple en
70, Jésus les mène à leur accomplissement. En témoigne l’une des sept dernières
paroles qu’il prononça avant de mourir sur le bois de la croix : tout est accompli.
Le saint
sacrement, sacrement de la nouvelle alliance, témoigne donc dans sa structure
même d’un double accomplissement de la part de Jésus. Accomplissement
signifiant non seulement réalisation des prophéties mais le fait de porter à
leur perfection spirituelle des réalités du culte juif qui n’étaient que
l’annonce imparfaite du culte en esprit et en vérité. Le sacrement institué par
Jésus synthétise en lui le culte de la synagogue et celui du temple. Il est
accomplissement des Ecritures dans la liturgie de la Parole et accomplissement
des sacrifices dans la liturgie eucharistique. Enfin le sacrement de
l’eucharistie offre le fruit de la nouvelle alliance non plus aux seules 12
tribus du peuple d’Israël mais à la multitude des hommes et des peuples.
Célébrons
donc ce sacrement avec foi, amour, respect et reconnaissance.
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