Marc 1,
12-15
22/02/15
Avant de commencer sa prédication
en Galilée, Jésus, poussé par l’Esprit, se rend au désert. Vrai homme, il
accepte l’épreuve de la tentation pendant quarante jours, comme autrefois les
hébreux furent tentés pendant quarante ans dans le désert. Le Carême est un
temps de pénitence, de purification et de renouvellement de notre vie
chrétienne. C’est la raison pour laquelle, chaque année, nous commençons ce
temps de préparation à Pâques en contemplant Jésus mis à l’épreuve par Satan
dans le désert. Il se préparait ainsi à l’accomplissement de sa mission :
annoncer la Bonne Nouvelle du Royaume de Dieu. Si Matthieu et Luc nous donnent
le contenu des tentations du Seigneur, saint Marc, lui, se contente de signaler
la tentation. Mais dans sa brièveté habituelle, il nous donne un détail que
nous ne trouvons pas chez les autres évangélistes : « Il vivait parmi
les bêtes sauvages, et les anges le servaient ». D’où le choix de la
première lecture qui nous rappelle l’alliance de Dieu avec Noé et tous les
êtres vivants, « les oiseaux, les animaux domestiques, toutes les bêtes
sauvages ». En fait la présentation faite par saint Marc des tentations au
désert nous renvoie plutôt aux deux premiers chapitres de la Genèse, les récits
de la création, au commencement. Jésus est victorieux dans l’épreuve de la
tentation contrairement à Adam et Eve. Il nous est présenté comme le roi de la
création nouvelle. Roi ne signifie pas dictateur ou tyran. Le fait d’être roi
n’implique pas l’oppression et la destruction. Après le péché des origines,
l’homme et la femme qui avaient été constitués rois de la création ont exercé
cette royauté d’une manière perverse. Ils se sont transformés en dictateurs et
ont soumis toute la création à leur joug égoïste. Nous nous trouvons toujours
dans cette situation de nos jours pour ce qui concerne l’organisation globale
de nos sociétés et particulièrement l’économie qui justifie tout au nom du
profit et de la concurrence. La preuve nous en est fournie par l’extrême
difficulté que nous avons à prendre au sérieux la crise écologique et à revoir
notre relation avec les autres créatures vivantes. De sommets en sommets, nos
dirigeants politiques et les responsables économiques avec eux se comportent en
irresponsables, remettant toujours à demain ce qui aurait dû être décidé depuis
des années déjà. Nous vivons clairement de ce point de vue-là dans une
structure de péché. Le tableau que Marc nous donne nous renvoie, lui, au
paradis terrestre. Les bêtes sauvages représentent la création visible et les
anges la création invisible. Jésus, nouvel Adam, réalise en sa personne libérée
du péché l’unité de toute la création. Deux textes magnifiques de saint Paul
nous permettent de comprendre en profondeur ce qui commence dans le désert
alors que Jésus est vainqueur de Satan. Dans le premier, la lettre aux
Ephésiens, l’apôtre décrit ainsi le projet de Dieu : « Saisir
l’univers entier, ce qui est au ciel et ce qui est sur la terre, en réunissant
tout sous un seul chef, le Christ ». Dans le second, la lettre aux
Colossiens, saint Paul nous montre que le Christ, roi de la création nouvelle,
apporte la paix de Dieu à toute la création et à toutes les créatures :
« Dieu a voulu que dans le Christ toute chose ait son accomplissement
total. Il a voulu tout réconcilier par lui et pour lui, sur la terre et dans
les cieux, en faisant la paix par le sang de sa croix ». Depuis le péché
des origines l’homme est déchu de sa royauté sur la création. C’est le Christ
qui est le roi de la création. C’est donc dans la mesure où nous vivons selon
l’Evangile de Jésus et que nous cherchons à l’imiter dans notre vie que nous
retrouverons notre royauté sur la création. Royauté pour Jésus signifie, nous
le savons, service et don de soi, libération, reconnaissance de la primauté du
Créateur, source et origine de toute vie et de toute grâce. Et si ce temps de
Carême nous était donné pour redécouvrir notre véritable royauté au sein de la
création ? Alors que le pape François prépare une encyclique sur l’écologie,
quelle joie ce serait pour nous de pouvoir nous émerveiller en présence de la
création et de toutes les créatures ? De pouvoir dire merci à Dieu notre
Père pour la beauté de sa création, le miracle de toute vie et lui demander
pardon pour l’oppression que nous lui faisons subir de bien des manières. Le
Créateur attend de nous que nous soyons les libérateurs de sa création. Il est
grand temps que non seulement nous respections la dignité de toute personne
humaine mais aussi la vie des animaux avec lesquels Dieu a aussi fait alliance
et notre planète terre sans laquelle nous ne pourrions même pas exister. Écoutons un passage de l’hymne de l’univers dans le livre de Daniel :
Que la terre bénisse le Seigneur : À lui, haute
gloire, louange éternelle !
Et vous, montagnes et collines, bénissez le Seigneur,
et vous, les plantes de la terre, bénissez le
Seigneur,
et vous, sources et fontaines, bénissez le
Seigneur !
Et vous, océans et rivières, bénissez le Seigneur,
baleines et bêtes de la mer, bénissez le Seigneur,
vous tous, les oiseaux dans le ciel, bénissez le
Seigneur,
vous tous, fauves et troupeaux, bénissez le Seigneur À
lui, haute gloire, louange éternelle !
Et vous, les enfants des hommes, bénissez le
Seigneur : À lui, haute gloire, louange éternelle !
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