samedi 16 décembre 2006

Troisième dimanche de l'Avent

Troisième dimanche de l’Avent (Gaudete) / C
17 décembre 06
Luc 3, 10-18 (page 115)

« Tu le vois, Seigneur, ton peuple se prépare à célébrer la naissance de ton Fils ; dirige notre joie vers la joie d’un si grand mystère pour que nous fêtions notre salut avec un cœur vraiment nouveau. »
La prière ou collecte de cette messe nous donne bien la tonalité propre au troisième dimanche de l’Avent : ce dimanche est celui de la joie chrétienne, le dimanche de Gaudete, d’après le premier mot latin de l’antienne d’ouverture qui est en fait une citation de la deuxième lecture : « Soyez dans la joie du Seigneur. »
La liturgie de la Parole nous parle d’une double joie : celle qui doit être la notre en tant que chrétiens, et cela tout particulièrement à l’approche de Noël, et la joie même de Dieu.
C’est la première lecture qui nous révèle cette joie de Dieu, et cela d’une manière très surprenante : Le Seigneur ton Dieu « aura en toi sa joie et son allégresse, il te renouvellera par son amour ; il dansera pour toi avec des cris de joie, comme aux jours de fête. » L’Ancien Testament, particulièrement dans le livre des Psaumes, nous avait habitué à la situation inverse : c’est le peuple d’Israël qui danse de joie pour son Dieu. Souvenez-vous de la danse du roi David pour célébrer l’entrée de l’Arche d’Alliance dans Jérusalem[1]. Chez le prophète Sophonie, c’est le Seigneur qui danse pour son peuple personnifié par la fille de Sion, c’est-à-dire Jérusalem. Le catéchisme nous apprend que Dieu est bienheureux et qu’il n’a pas besoin des créatures pour connaître la joie. Dieu jouit en lui-même d’une joie parfaite dans les relations trinitaires : entre le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Dans le mystère de la Trinité, la joie est associée à la personne du Saint-Esprit, lumière bienheureuse qui donne la joie éternelle.[2] La joie que Dieu veut mettre dans son peuple n’est donc pas de l’ordre de la nécessité mais de la gratuité. Dieu n’a pas besoin de nous pour être parfaitement dans la joie, mais il veut se réjouir en nous et à cause de nous, parce qu’il nous aime ! Quand Sophonie nous montre Dieu qui « dansera » pour son peuple « avec des cris de joie », nous pouvons bien sûr penser à un anthropomorphisme, à une manière humaine de parler de Dieu. Mais en ce temps de l’Avent, nous pouvons déceler dans cette prophétie une annonce de l’Incarnation. Les Evangiles, certes, ne nous montrent pas Jésus en train de danser… Il n’en reste pas moins vrai que Jésus a vécu profondément la joie en accomplissant sa mission de Sauveur pour le peuple : « pour que ma joie soit tout entière en eux.[3] » Dieu veut donc trouver sa joie dans son peuple et dans chacun d’entre nous, et cela, une fois encore, par pur amour.
Si nous comprenons cela, alors nous comprenons notre vocation de chrétiens : nous devons vivre de telle sorte que nous puissions réjouir le cœur de Dieu. Etre pour Dieu des sujets de joie et d’allégresse, telle est la grandeur de notre vocation. Comment pouvons-nous avoir ce pouvoir exorbitant, celui de réjouir le cœur de Dieu ?
Tout d’abord en vivant nous-mêmes, à la suite du Seigneur Jésus, la joie spirituelle. C’est tout le sens de la deuxième lecture. Nous n’avons pas de plus belle manière de dire à Dieu et à Jésus notre reconnaissance, notre action de grâce que de lui offrir joyeusement toute notre personne et notre vie. Le témoignage de la joie chrétienne est le plus efficace de tous les témoignages. Si nous mettons vraiment notre joie en Dieu, alors nous rayonnons la présence du Seigneur autour de nous, nous sommes des foyers de joie divine. Ce qui nous empêche de rayonner la joie chrétienne, c’est essentiellement la faiblesse de notre vie spirituelle et notre péché. Une vie sans prière ne peut être joyeuse de la joie même de Dieu. Quant au péché, s’il peut être source de plaisir et de satisfaction égoïste, il nous conduit toujours à la tristesse. Et c’est là que les paroles de Jean prennent tout leur sens.
Il s’en suit que pour réjouir le coeur de Dieu, nous avons à nous convertir. Non pas à faire des choses extraordinaires ! Ecoutons à nouveau les exhortations de Jean :
« Celui qui a deux vêtements, qu’il partage avec celui qui n’en a pas etc. »
« N’exigez rien de plus que ce qui vous est fixé. »
« Ne faites ni violence ni tort à personne ; et contentez-vous de votre solde. »
Voilà comment nous pouvons être dans la joie et réjouir notre Dieu ! C’est si simple : partager avec les pauvres, se contenter de ce que l’on a, être doux et juste. Il n’y a rien d’extraordinaire dans tout cela. La joie jaillit toujours des réalités les plus simples et les plus essentielles. Le plus difficile est probablement de commencer ce travail de conversion de manière concrète, de ne pas toujours le remettre à demain. Car demain sera le jour du jugement, celui du tri entre le grain et la paille. Les experts qui étudient l’environnement nous préviennent : n’attendons pas qu’il soit trop tard pour changer nos mauvaises habitudes. L’écologie ne peut pas être une option en politique. Eh bien, l’écologie spirituelle dont nous parle Jean n’est pas non plus une option dans la vie chrétienne, c’est bien une question de mort ou de vie. Sous des apparences austères et ascétiques Jean est bien le prophète de la joie.
Il nous propose un test tout simple. Par exemple : lorsque nous aurons plus de joie à partager avec les autres qu’à accumuler des richesses pour nous, alors ce sera le signe que nous sommes sur le bon chemin. De la même manière lorsque nous trouverons notre joie davantage dans ce que nous avons et ce que nous sommes, que dans ce que nous désirons ou rêvons d’être. C’est alors que la paix de Dieu gardera notre coeur et notre intelligence dans le Christ Jésus. Amen

[1] 2 Samuel 6, 14s
[2] Cf. la séquence de Pentecôte
[3] Jean 17, 13

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