17/08/2025
Luc 12, 49-53
49 Je suis venu apporter un feu
sur la terre, et comme je voudrais qu’il soit déjà allumé !
50 Je dois recevoir un baptême,
et quelle angoisse est la mienne jusqu’à ce qu’il soit accompli !
Dans les deux premiers versets de
l’Evangile de ce dimanche Jésus partage à ses disciples un désir et une
nécessité qui habitent son cœur. Son désir profond est de voir allumé le feu
qu’il est venu apporter sur la terre. Il est impatient de le voir allumé. Dans
les Evangiles l’image du feu est généralement négative : il s’agit du feu
de la Géhenne. Certaines interprétations de ce verset ont voulu y voir un feu
matériel, une espèce de catastrophe cosmique ou encore la bombe atomique qui
détruirait la terre par le feu comme autrefois l’eau du déluge avait submergé
la terre. Rien n’est plus inexact que cette interprétation. Il suffit pour s’en
convaincre de se référer à deux autres passages du Nouveau Testament. Le
premier au chapitre 9 du même Evangile : Souvenez-vous de cet épisode au
cours duquel Jacques et Jean ont l’intention de faire tomber le feu du ciel sur
un village de Samaritains qui ne veut pas accueillir Jésus (Luc 9, 54) … Le
Maître refuse catégoriquement cette vengeance punitive consistant à réduire en
cendres ce village par un feu matériel et destructeur. Au chapitre 13 de
l’Apocalypse nous avons la vision des deux bêtes, créatures sataniques et
remplies de blasphèmes. Voici ce qui est dit de la deuxième bête :
Puis, j’ai vu monter de la terre
une autre Bête ; elle avait deux cornes comme un agneau, et elle parlait comme
un dragon. Elle exerce tout le pouvoir de la première Bête en sa présence,
amenant la terre et tous ceux qui l’habitent à se prosterner devant la première
Bête, dont la plaie mortelle a été guérie. Elle produit de grands signes, jusqu’à
faire descendre le feu du ciel sur la terre aux yeux des hommes : elle
égare les habitants de la terre par les signes qu’il lui a été donné de
produire en présence de la Bête…
Le feu dont parle Jésus est tout
le contraire d’un feu matériel destructeur ou d’un feu matériel de type prodige
visant à impressionner les humains. C’est en mettant ce feu de Jésus en lien
avec le feu de la Pentecôte que nous comprenons qu’il s’agit bien d’une image, comparable
à celle des langues de feu quand l’Esprit Saint descendit sur la première
Eglise : feu de l’amour du cœur du Christ, feu du Saint-Esprit. Le désir
de Jésus signifie ceci : l’amour de Dieu nous a été donné, encore faut-il
qu’il soit accueilli sur notre terre, allumé dans nos cœurs. Le désir de Jésus
signifie qu’il attend avec impatience de notre part une réponse d’amour à son
amour. Notre lenteur à nous convertir, notre tiédeur dans l’amour de Dieu et du
prochain, notre ingratitude sont autant d’obstacles que nous opposons à ce que
le feu de l’amour divin soit déjà allumé en nous. Ce désir de Jésus n’a qu’un
but : réveiller notre ferveur et notre zèle. Si son cœur est brulant
d’amour et que le nôtre s’est refroidi, alors son feu risque de ne pas porter
de fruits en nous …
Après ce désir Jésus exprime une
nécessité qui s’impose à lui : Je dois recevoir un baptême, et quelle
angoisse est la mienne jusqu’à ce qu’il soit accompli ! Cela nous rappelle
le verset du même Evangile que le pape François a choisi pour sa lettre
apostolique consacrée à la formation liturgique du peuple de Dieu : J’ai
désiré d’un grand désir manger cette Pâque avec vous avant de souffrir ! Car je
vous le déclare : jamais plus je ne la mangerai jusqu’à ce qu’elle soit
pleinement accomplie dans le royaume de Dieu. Le Seigneur Jésus sait qu’il
doit monter à Jérusalem pour y souffrir sa Passion et la mort de la Croix. Au
commencement de sa mission il a demandé à Jean le baptême de l’eau. Au terme de
sa mission il sera plongé dans le baptême de sang de sa Passion. Dans cet
intervalle de temps le cœur de Jésus est rempli d’angoisse ou, selon d’autres
traductions : Et combien je suis oppressé jusqu’à ce que cette
immersion soit accomplie ! Comme si Jésus avait hâte d’arriver au
terme de sa vie terrestre, comme s’il avait hâte de pouvoir prononcer sur la
croix la parole de l’accomplissement : Tout est accompli ! Dans
le chapitre suivant de l’Evangile selon saint Luc Jésus nous donne un éclairage
supplémentaire sur cette angoisse qui habite son cœur jusqu’au temps de
l’accomplissement : À ce moment-là, quelques pharisiens s’approchèrent
de Jésus pour lui dire : « Pars, va-t’en d’ici : Hérode veut te tuer. » Il leur
répliqua : « Allez dire à ce renard : voici que j’expulse les démons et je
fais des guérisons aujourd’hui et demain, et, le troisième jour, j’arrive au
terme. Mais il me faut continuer ma route aujourd’hui, demain et le jour
suivant, car il ne convient pas qu’un prophète périsse en dehors de Jérusalem.
Nous comprenons le lien entre le
verset du désir et celui de la nécessité. Sans le baptême de la Passion qui
doit s’accomplir à Jérusalem, pas de don de l’Esprit Saint au jour de la
Pentecôte. C’est dans son baptême de sang que Jésus apportera pour toujours le
feu de son amour divin sur notre terre et c’est l’Esprit Saint qui allumera ce
feu dans nos cœurs si nous répondons généreusement au don de cet amour dans
l’action de grâce.