dimanche 15 juin 2025

TRINITE 2025 / DILEXIT NOS 8

 

15 /06/2025

En cette solennité de la Sainte Trinité nous méditons la quatrième partie de l’encyclique du pape François consacrée à l’amour humain et divin du Cœur de Jésus-Christ : « L’amour qui donne à boire ». Dimanche dernier nous avons parlé des saints français du 17ème siècle qui ont contribué à propager la dévotion au Sacré-Cœur. Les numéros 129 à 142 de l’encyclique présentent la contribution de deux autres saints français : Charles de Foucauld et Thérèse de l’Enfant Jésus. Charles de Foucauld se consacra au Sacré-Cœur en 1889 et il fut le premier ermite de l’Eglise « sous le nom du Sacré-Cœur ». Au n°138 le pape François cite longuement un extrait de la lettre 197 de Thérèse à sa sœur Marie, en ajoutant que cette page devrait être lue mille fois pour sa profondeur, sa clarté et sa beauté :

Mes désirs du martyre ne sont rien, ce ne sont pas eux qui me donnent la confiance illimitée que je sens en mon cœur. Ce sont, à vrai dire, les richesses spirituelles qui rendent injuste, lorsqu’on s’y repose avec complaisance et que l’on croit qu’ils sont quelque chose de grand. [...] Ce qui plaît au bon Dieu, c’est de me voir aimer ma petitesse et ma pauvreté, c’est l’espérance aveugle que j’ai en sa miséricorde… Voilà mon seul trésor. [...] Si vous désirez sentir de la joie, avoir de l’attrait pour la souffrance, c’est votre consolation que vous cherchez […]. Comprenez que pour aimer Jésus, être sa victime d’amour, plus on est faible, sans désirs, ni vertus, plus on est propre aux opérations de cet Amour consumant et transformant. [...] Oh ! que je voudrais pouvoir vous faire comprendre ce que je sens !... C’est la confiance et rien que la confiance qui doit nous conduire à l’Amour ». 

A la fin du quatrième chapitre le pape aborde « la dévotion de la consolation » (n°151-163) en s’appuyant sur une lettre encyclique du pape Pie XI publiée en 1928 (Miserentissimus Redemptor). Le pape François distingue « la consolation » de la « réparation » dont il traite dans le dernier chapitre. Ces deux réalités spirituelles nous sont devenues presque étrangères, et elles peuvent aussi nous apparaitre comme des pratiques étranges, venues d’un autre âge. D’où l’importance de comprendre le message du pape qui, avec beaucoup de pédagogie, les propose à nouveau à notre vie spirituelle. Il commence sagement par les fondements de la consolation, fondements qui se trouvent dans l’unité du mystère pascal et dans sa dimension transcendante :

Le cœur du Ressuscité conserve ces signes du don total qui entraîna une intense souffrance pour nous. Il est donc en quelque sorte inévitable que le croyant veuille réagir non seulement à ce grand amour, mais aussi à la douleur que le Christ a accepté d’endurer pour tant d’amour (151). Le Pape Pie XI a voulu justifier cela en nous invitant à reconnaître que le mystère de la Rédemption par la Passion du Christ transcende, par la grâce de Dieu, toutes les distances de temps et d’espace (153).

La pratique de la consolation du cœur du Christ peut se comprendre dans la mesure où nous sommes rendus « mystiquement présents à ce moment rédempteur de la Passion ». Au n°155 le pape énonce l’objection que beaucoup de croyants peuvent faire à cette dévotion particulière : Quoi qu’il en soit, nous nous demandons comment il est possible d’être en relation avec le Christ vivant, ressuscité, pleinement heureux, et en même temps de le consoler dans sa Passion. Si le Christ ressuscité est parfaitement bienheureux dans la vie de la Sainte Trinité, comment est-il possible de le « consoler » ? Pascal répondrait que le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point… Et le pape reconnaît avec franchise qu’il y a là quelque chose de mystérieux qui dépasse notre logique humaine, et que la Passion du Christ n’est pas un simple fait du passé : nous pouvons y participer par la foi… et que nous nous trouvons sur un chemin mystique qui dépasse les tentatives de la raison et exprime ce que la Parole de Dieu elle-même nous suggère…

A la fin du chapitre le pape associe à la consolation du cœur du Christ dans sa Passion la pratique de la componction (158-160), proche de celle de la contrition. Il en donne la définition suivante :

Le désir nécessaire de consoler le Christ, qui naît de la souffrance en contemplant ce qu’Il a enduré pour nous, se nourrit aussi de la reconnaissance sincère de nos servitudes, de nos attachements, de nos manques de joie dans la foi, de nos vaines recherches et, au-delà de nos péchés concrets, de la non correspondance de nos cœurs à son amour et à son projet. 

La componction du cœur n’a rien à voir avec la culpabilité qui abat ou le scrupule qui paralyse :

Il ne s’agit pas de pleurer sur nous-mêmes, comme nous sommes souvent tentés de le faire. [...] Avoir des larmes de componction c’est au contraire nous repentir sérieusement d’avoir attristé Dieu par le péché ; c’est reconnaître que nous sommes toujours en dette et jamais en crédit [...]. Comme la goutte creuse la pierre, les larmes creusent lentement les cœurs endurcis. On assiste ainsi au miracle de la tristesse, de la bonne tristesse, qui conduit à la douceur [...]. La componction n’est pas tant le fruit de notre exercice, mais elle est une grâce et, comme telle, doit être demandée dans la prière. 

En consolant le Christ par amour pour lui et dans la gratitude pour le grand don de sa vie et de sa personne nous recevons à notre tour sa consolation dans nos épreuves et nos difficultés. Et de là nous sommes poussés à exercer la charité fraternelle. C’est de cette manière que le pape opère la transition entre le chapitre IV (l’expérience spirituelle personnelle) et le chapitre V (l’engagement communautaire et missionnaire) :

162. Mais à un moment donné de cette contemplation du cœur croyant, l’appel dramatique du Seigneur doit retentir : « Consolez, consolez mon peuple » (Is 40, 1). Et nous viennent à l’esprit les paroles de saint Paul qui nous rappelle que Dieu nous console « afin que, par la consolation que nous-mêmes recevons de Dieu, nous puissions consoler les autres en quelque tribulation que ce soit » (2 Co 1, 4).

 

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