18/05/2025
En ce 5ème dimanche de
Pâques nous continuons la méditation de la première partie de l’encyclique du
pape François consacrée à l’amour humain et divin du Cœur de Jésus-Christ. Les
réflexions du pape sont d’une grande beauté et profondeur et il m’est difficile
de les synthétiser. Dans la partie intitulée le cœur qui assemble les
fragments (17-23) nous pouvons retenir trois enseignements précieux sur
notre propre cœur. Il est tout d’abord capacité relationnelle. Je cite le
n°18 :
18.
Nous voyons ainsi que, dans le cœur de chaque personne, il existe ce lien
paradoxal entre la valorisation de soi et l’ouverture à l’autre, entre la
rencontre très personnelle avec soi-même et le don de soi à l’autre. Je ne
deviens moi-même que lorsque j’acquiers la capacité de reconnaître l’autre, et
que je rencontre l’autre qui peut reconnaître et accepter mon identité.
Si le cœur me constitue comme personne unique
dans ma relation avec les autres, c’est aussi lui qui me permet de relier entre
eux les fragments de ma vie et de leur donner un sens. Au n°19 le pape cite
l’attitude de Marie :
19.
Le cœur est également capable d’unifier et d’harmoniser l’histoire personnelle,
qui semble fragmentée en mille morceaux mais où tout peut avoir un sens. C’est
ce que l’Évangile exprime avec Marie qui regardait avec le cœur. Elle savait
dialoguer avec les expériences conservées en y réfléchissant dans son cœur, en
leur donnant du temps, les méditant et les conservant intérieurement pour se
souvenir.
Enfin le cœur comme capacité d’amour est ce qui
réalise au plus intime de chacun de nous l’unité de l’âme et du corps, le noyau
intime qui rend possible l’animal spirituel que nous sommes :
21.
Le noyau de tout être humain, son centre le plus intime, n’est pas le noyau de
l’âme mais de toute la personne dans son identité unique qui est à la fois âme
et corps. Tout s’unifie dans le cœur qui peut être le siège de l’amour avec la
totalité de ses composantes spirituelles, émotionnelles et même physiques. En
définitive, si l’amour y règne, la personne réalise son identité de manière
pleine et lumineuse, car tout être humain a été créé avant tout pour l’amour,
il est fait dans ses fibres les plus profondes pour aimer et être aimé.
Dans les numéros 24 à 31 de la première partie le
pape nous fait percevoir les conséquences à la fois spirituelles et sociales de
la vision du cœur qu’il vient d’exposer. Dans le domaine de la spiritualité il
évoque l’expérience des Exercices spirituels de saint Ignace de Loyola dans
lesquels les « motions » laissent la place à « l’inconnu du
cœur », dans l’ouverture à l’inattendu de la volonté de Dieu ; il
cite ensuite saint Bonaventure qui incitait les fidèles à demander « non
pas la lumière mais le feu », et enfin saint John Henry Newman, grand
penseur, qui mettait en avant l’expérience de la prière personnelle et de
l’Eucharistie :
Le
lieu de la rencontre la plus profonde, avec lui-même et avec le Seigneur,
n’était pas la lecture ou la réflexion, mais le dialogue priant, cœur à cœur
avec le Christ vivant et présent. C’est pourquoi Newman a trouvé dans
l’Eucharistie le Cœur de Jésus-Christ vivant, capable de libérer, de donner un
sens à chaque instant et de répandre en l’homme une paix véritable.
Toutes ces réflexions contribuent à revivifier la
théologie chrétienne qui a pu bien des fois être présentée de façon desséchante
de par son formalisme rationnel pour nous inviter à faire de « la
théologie à genoux », expression par laquelle le pape François rend
hommage à la pensée de son prédécesseur Benoît XVI. On pourrait à nouveau citer
Blaise Pascal mais aussi plus proche de nous Maurice Zundel qui ont fortement
contribué à la synthèse vivante entre théologie et spiritualité. Enfin
« prendre le cœur au sérieux a des conséquences sociales ». Dans la
pensée du pape François, fidèle en cela à l’Evangile, il n’y a pas d’un côté la
spiritualité et de l’autre l’engagement pour la promotion de la doctrine
sociale de l’Eglise. L’anthropologie du cœur unit ces dimensions de notre être
chrétien que nous aurions tendance à séparer. Je cite le pape au n°28 :
28.
Ce n’est qu’à partir du cœur que nos communautés parviendront à unir leurs
intelligences et leurs volontés, et à les pacifier pour que l’Esprit nous guide
en tant que réseau de frères ; car la pacification est aussi une tâche du cœur.
Le Cœur du Christ est extase, il est sortie, il est don, il est rencontre. En
Lui, nous devenons capables de relations saines et heureuses les uns avec les
autres et de construire le Royaume de l’amour et de la justice dans ce monde.
Notre cœur uni à celui du Christ est capable de ce miracle social.
C’est par une prière que s’achève la première
partie de l’encyclique :
Devant
le Cœur du Christ, je demande au Seigneur d’avoir à nouveau compassion pour
cette terre blessée qu’Il a voulu habiter comme l’un de nous. Qu’Il répande les
trésors de sa lumière et de son amour, afin que notre monde, qui survit au
milieu des guerres, des déséquilibres socioéconomiques, du consumérisme et de
l’utilisation antihumaine de la technologie, puisse retrouver ce qui est le
plus important et le plus nécessaire : le cœur.
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