Nous sommes dans la dernière
partie du ministère public de Jésus, dans les jours qui précèdent sa Passion. A
Jérusalem le Seigneur observe ses contemporains. Saint Marc nous invite à faire
un lien entre son jugement sévère sur les scribes et son admiration émue pour
la pauvre veuve. Le Seigneur s’intéresse à la vérité de nos attitudes.
L’Evangile de ce dimanche nous parle d’authenticité. La mise en garde de Jésus
envers les scribes vient du fait qu’ils vivent dans le monde des apparences.
Des siècles plus tard le Tartuffe de
Molière actualisera cette critique du faux dévot. Les scribes jouent en fait
une comédie religieuse. Mais s’ils peuvent tromper les hommes, ils ne peuvent
pas tromper le Fils de Dieu. Dans leur comédie l’apparence tient une grande
place avec le goût de se montrer en public habillés « en robes
solennelles ». Pascal avait déjà analysé en son temps le détournement de
l’habit pour couvrir le manque d’autorité morale ou de compétence et s’attirer
ainsi le respect des masses : « Nos magistrats ont bien
connu ce mystère. Leurs robes rouges, leurs hermines dont ils s’emmaillotent en
chats-fourrés, les palais où ils jugent, les fleurs de lys, tout cet appareil
auguste était fort nécessaire ; et si les médecins n’avaient des soutanes
et des mules, et que les docteurs n’eussent des bonnets carrés et des robes
trop amples de quatre parties, jamais ils n’auraient dupé le monde qui ne peut
résister à cette montre si authentique. S’ils avaient la véritable justice et
si les médecins avaient le vrai art de guérir, ils n’auraient que faire de
bonnets carrés : la majesté de ces sciences serait assez vénérable
d’elle-même, mais n’ayant que des sciences imaginaires, il faut qu’ils prennent
ces vains instruments qui frappent l’imagination à laquelle ils ont à faire et
par là en effet ils s’attirent le respect ». Parmi
certains membres de la hiérarchie de l’Eglise la tentation des pompes
extérieures et donc le manque de simplicité dans l’habillement ont été fréquents.
Le concile Vatican II et le pape Paul VI ont voulu, en fidélité avec
l’Evangile, plus de simplicité. Nous savons bien, par exemple, que l’autorité
du pape ne vient pas de sa soutane blanche, soutane qui remonte au pape saint
Pie V au 16ème siècle ! Donc si un pape décidait d’abandonner
cet habit il n’en serait pas moins pape. Mais comme les Juifs de l’époque de
Jésus nous restons sensibles aux apparences et notre imagination joue souvent
un plus grand rôle que notre raison dans nos jugements. En contraste avec
l’arrogance des scribes profiteurs Jésus nous donne en exemple la pauvre veuve
et son offrande. Jésus voit les cœurs et ne se fie pas aux apparences, il voit
l’intention. Il admire la foi absolue de cette pauvre femme qui donne tout ce
qu’elle a pour vivre. Il faut en effet avoir une confiance totale en la
providence divine pour agir de cette sorte. Je me sens bien incapable d’imiter
pour ma part la pauvre veuve. Avec Jésus je l’admire. La distinction entre le
superflu et le nécessaire peut toutefois nous faire réfléchir. Nous savons bien
que ces notions sont relatives : ce qui relève du nécessaire dans un pays
pauvre ne correspond pas forcément au nécessaire chez nous. L’admiration de
Jésus pour l’offrande de cette femme nous invite certainement à une plus grande
générosité, à un détachement plus grand. Dans les pays développés tout est fait
pour rendre le superflu nécessaire. Du coup nous vivons dans une ambiance de
gaspillage programmé au nom de la croissance. On nous fait croire que si nous
ne changeons pas d’I-Phone chaque fois qu’un nouveau modèle
sort nous serons malheureux. Par rapport à cette situation notre foi chrétienne
exige de nous une ferme résistance. Il est urgent de revoir nos modes de vie et
de nous désencombrer des gadgets technologiques que l’on nous incite à
considérer nécessaires. Oui, l’Evangile nous invite à la sobriété qui est le
nom contemporain de la pauvreté évangélique. Une sobriété librement choisie, en
connaissance de cause, et donc une sobriété joyeuse qui nous ouvre au don et au
partage. Nous pouvons alors faire notre la question suivante trouvée dans un
article de presse :
A quand la
fin des adorations nocturnes devant les Apple Stores à chaque nouvel
accouchement d'un objet mort-né ?
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