5ème dimanche de Pâques / C
6 mai 2007
Jean 13, 34.35 (page 641)
« Je vous donne un commandement nouveau : c’est de vous aimer les uns les autres. » L’évangéliste Jean nous présente le commandement de l’amour fraternel d’une manière originale par rapport aux autres évangélistes. Il situe la parole de Jésus sur ce commandement lors de la dernière cène, le soir du jeudi saint, après le geste significatif du lavement des pieds. Ce qui donne à ce commandement une valeur de testament. En outre Jean ne mentionne ici que l’amour envers le prochain.
Regardons rapidement les évangiles synoptiques pour mieux saisir l’originalité du quatrième évangile sur ce point. Les autres évangélistes situent la parole sur le commandement de l’amour pendant la vie publique du Seigneur. Chez eux elle va toujours de pair avec le commandement de l’amour envers Dieu. Enfin la parole sur le commandement de l’amour est une réponse à une question. Chez Matthieu c’est un pharisien qui veut mettre Jésus à l’épreuve en lui posant la question suivante : « Maître, quel est le grand commandement de la Loi ? » Chez Marc c’est un maître de la Loi qui pose la question au Seigneur : « Quel est le premier de tous les commandements ? » Quant à Luc il présente la question d’une manière différente et la met dans la bouche d’un maître de la Loi qui veut embarrasser Jésus : « Maître, que dois-je faire pour recevoir la vie éternelle ? »
Nous comprenons à quel point Jean est l’évangéliste du commandement nouveau. Toute la première lettre de Jean est un développement sur ce même commandement. Et c’est dans cette lettre que le rapport entre amour de Dieu et amour du prochain est mis en lumière. Jean redit à sa manière l’enseignement des autres évangélistes : l’amour de Dieu et l’amour du prochain sont deux réalités interdépendantes. Ces deux commandements n’en font qu’un un peu à la manière des deux faces d’une médaille : « Quand nous aimons Dieu et faisons ce qu’il nous demande, nous savons que nous aimons aussi les enfants de Dieu » Pour le disciple bien-aimé on ne peut pas séparer la connaissance de Jésus de l’amour donc de la mise en pratique de ses commandements : « Et voilà comment nous saurons que nous le connaissons : si nous gardons ses commandements. Celui qui prétend le connaître et ne garde pas ses commandements est un menteur : la vérité n’est pas chez lui. Mais si quelqu’un garde sa parole, c’est chez lui que l’amour de Dieu est vraiment achevé. » L’amour du prochain est donc le test infaillible de l’authenticité de notre foi chrétienne.
« Comme je vous ai aimés, vous aussi, aimez-vous les uns les autres. » L’amour chrétien comme l’amour du chrétien est toujours une imitation du Christ. C’est un amour à la manière du Christ. Et quelle est donc cette manière ? Jean nous le dit dans sa première lettre : « Lui, il a donné sa vie pour nous, et c’est là que nous avons connu l’amour. Aussi nous-mêmes, nous devons donner notre vie pour nos frères. » Le mouvement de l’amour chrétien est tout entier dans le don. Il est inconciliable avec l’égoïsme et l’égocentrisme. Et Jean nous met bien en garde contre une vision théorique de ce que doit être notre amour du prochain : « Mes enfants, n’aimons pas seulement en paroles, avec nos lèvres, mais en vérité, avec des œuvres. » Si nous sommes avares de notre temps, de notre argent et de nos biens, alors nous ne sommes pas dans le réalisme de l’amour. Si nous sommes refermés sur nous-mêmes, calfeutrés dans notre confort et nos habitudes, alors nous risquons bien de fermer notre cœur à la relation avec notre prochain. Sans ouverture du cœur et des mains, nous ne pouvons pas suivre le Christ.
« Ce qui montrera à tous les hommes que vous êtes mes disciples, c’est l’amour que vous aurez les uns pour les autres. » Pour Jésus nous ne pouvons pas donner de plus grand témoignage de notre foi que celui de l’amour fraternel. Le plus grand obstacle à l’évangélisation se trouve dans les mesquineries, les jalousies, les querelles et les divisions qui peuvent saper la vie de nos communautés chrétiennes. Pourquoi l’amour fraternel est-il le témoignage suprême ? Tout simplement parce que « personne n’a jamais contemplé Dieu, mais si nous nous aimons les uns les autres, Dieu demeure en nous et son amour s’épanouit au milieu de nous. »
L’Evangile de ce 5ème dimanche de Pâques est vraiment pascal. Parce que l’amour fraternel est source de vie. Il est le signe que grâce au Christ et avec Lui nous sommes déjà vainqueurs du péché et de la mort : « Nous voyons que nous sommes passés de la mort à la vie parce que nous aimons nos frères ; celui qui n’aime pas reste en état de mort » Le commandement que Jésus nous donne avant sa Passion est nouveau. Jean nous explique pourquoi : « Il est vraiment neuf en Jésus et chez nous, et déjà les ténèbres reculent cependant que luit la vraie lumière . » L’événement de Pâques fait mentir l’Ecclésiaste selon lequel il n’y a rien de nouveau sous le soleil : « Voici que je fais toutes choses nouvelles. »
Amen
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