8/10/2023
Matthieu
21, 33-43
La parabole des vignerons
assassins est le développement du texte d’Isaïe que nous avons entendu en
première lecture. Il y est question du domaine de Dieu dans lequel il plante
une vigne. Ce domaine c’est la création tout entière et la vigne peut être
comprise comme l’image de l’humanité, du peuple d’Israël ou encore de l’Eglise.
Dans cette parabole Jésus résume le drame des relations entre Dieu et
l’humanité, de l’alliance de la création en passant par celle avec Noé puis
Moïse jusqu’à l’alliance définitive offerte dans le mystère de l’incarnation.
Les vignerons qui nous représentent refusent de vivre dans l’Alliance et
persécutent les envoyés de Dieu, les prophètes. Ils vont même jusqu’à tuer le
fils du maître du domaine. Jésus annonce ainsi sa propre mort sur la croix et
l’interprète par avance à la lumière du psaume 118 (117) :
Jésus leur dit : « N’avez-vous
jamais lu dans les Écritures : La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est
devenue la pierre d’angle : c’est là l’œuvre du Seigneur, la merveille devant
nos yeux !
Les vignerons deviennent dans le
psaume des maçons bâtissant une maison. Image parlante elle aussi car elle nous
montre le projet d’une humanité voulant se construire et se développer en
rejetant la pierre d’angle, c’est-à-dire Jésus. Il y a eu à un moment précis de
l’histoire de l’humanité le meurtre de l’innocent et du saint, le Fils de Dieu.
Il y a aussi à tout moment de l’histoire, celle des peuples comme celle des
personnes, cette tentation de rejeter Jésus hors de nos vies, de refuser
d’écouter sa Parole et d’accueillir son Evangile. En lien avec l’image des
maçons dans le psaume 118 nous pouvons penser à un autre psaume, le psaume 126 :
Si le Seigneur ne bâtit la
maison, les bâtisseurs travaillent en vain.
Les psaumes 118 et 126 nous
mettent en garde contre notre orgueil qui nous pousse à vouloir être totalement
autonomes, détachés de Dieu Père et Créateur. Contrairement à Jésus, nous
refusons parfois d’être fils, c’est-à-dire de reconnaître que nous dépendons de
Dieu qui nous donne de vivre dans son domaine et nous confie sa vigne. Le texte
d’Isaïe précise les mauvais fruits issus de cette séparation volontaire d’avec
le maître du domaine :
Il en attendait le droit, et voici
le crime ; il en attendait la justice, et voici les cris.
C’est bien en raison de la
méchanceté des vignerons que Dieu les abandonne à leur autonomie revendiquée
par et dans le crime :
Le royaume de Dieu vous sera
enlevé pour être donné à une nation qui lui fera produire ses fruits.
Il est facile de voir dans cette
sentence le transfert du Royaume de Dieu vers les peuples païens. Cela ne doit
pas nous empêcher, bien au contraire, de nous l’appliquer à nous-mêmes dans la
situation qui est la nôtre aujourd’hui. Même si l’Eglise ne se confond pas avec
le Royaume de Dieu, elle en est en quelque sorte le signe sur cette terre. Dieu
a promis à l’Eglise par la bouche de son Fils que jamais elle ne serait
détruite par les forces du mal à l’extérieur comme à l’intérieur :
Tu es Pierre, et sur cette pierre
je bâtirai mon Église ; et la puissance de la Mort ne l’emportera pas sur elle.
Cela n’empêche pas Dieu d’opérer
la purification de son Eglise par l’épreuve. Le passage rapide en Occident,
mais remontant dans ses racines au 18ème siècle, d’une Eglise
majoritaire à une Eglise minoritaire, mise en « concurrence » par de
nombreuses églises chrétiennes évangéliques, ne peut que nous pousser à la
réflexion et à un examen de conscience. Ce passage n’est pas forcément
totalement négatif car il purifie l’Eglise institution d’une volonté de
puissance et de domination sur la société civile qui n’avait rien
d’évangélique. Maintenant que nous, les
catholiques français, nous sommes devenus semblables au petit reste d’Israël, le
petit troupeau, il est salutaire de nous laisser interpeller par la
parabole de ce dimanche en nous posant les questions suivantes en tant que
personnes et membres de la communauté croyante :
Dans quelle mesure vivons-nous
quotidiennement en fils et filles de Dieu, donc dans la reconnaissance que nous
dépendons de lui ? Ou bien sommes-nous, nous aussi, dans la logique de
bâtir notre vie, notre maison commune, notre société, en excluant la Parole du
Christ ?
Quel type de foi entretenons-nous
dans notre relation avec Dieu ? Une foi d’habitude sociale, de tradition,
ou bien une foi fervente animée de l’intérieur par un amour authentique de Dieu
et un désir de vivre en communion avec lui dans la nouvelle et éternelle
Alliance scellée par la Pâque de son Fils ? Nous ne pouvons pas être de
bons vignerons par habitude, aujourd’hui il s’agit bien pour chaque membre de
l’Eglise de choisir Dieu dans la conscience qu’Il nous a choisis pour
travailler dans sa vigne et lui faire donner de bons et beaux fruits.
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