21/08/2022
Luc 13,
22-30
Seigneur, n’y a-t-il que peu de gens qui
soient sauvés ? Cette question d’un inconnu nous la retrouvons
dans la bouche des disciples en saint Matthieu : Qui donc peut être sauvé ?
C’est la
question du salut éternel liée à la foi en la vie éternelle comme l’indique
l’image du festin dans le Royaume de Dieu. C’est aussi la question du nombre de
ceux qui seront sauvés. Une multitude de pécheurs ou une élite de saints ?
Dans les Evangiles nous trouvons des passages peu « optimistes » sur
ce point… La porte du salut est étroite… la multitude des hommes est appelée,
mais les élus sont peu nombreux etc. Nous y trouvons aussi des passages nous
parlant d’un salut universel et inattendu : Alors on viendra de l’orient et de l’occident, du nord et du midi,
prendre place au festin dans le royaume de Dieu. Oui, il y a des derniers qui
seront premiers, et des premiers qui seront derniers.
La
question du salut ne se pose pas de la même manière aujourd’hui qu’à l’époque
de Jésus, et cela vaut aussi pour les chrétiens. Il serait intéressant de faire
un sondage parmi les catholiques pour savoir quelle place la vie éternelle
occupe dans leur cœur… Le mot de salut lui-même semble incapable de parler au
cœur de beaucoup de nos contemporains à la manière d’un mot usé par des siècles
de tradition. Il nécessite une traduction actuelle pour être accepté et
compris, pour retrouver une signification réelle. Probablement parce que dans
le passé du christianisme ce mot a pu être utilisé pour mépriser la vie
présente. Le Paradis était le but suprême et unique qui faisait de la vie
présente une simple pièce d’attente remplie de douleurs et de frustrations.
Souffrez maintenant sur terre, vous serez heureux plus tard au Paradis ! Or
un salut qui ne concerne que l’au-delà et le futur ne nous enthousiasme pas…
Dans ces conditions à quoi bon vivre ? L’homme contemporain parle du salut
en utilisant la notion de bonheur, de vie belle, bonne et accomplie, rejoignant
par-là les aspirations des philosophes de l’antiquité qui recherchaient la vie
bonne pour aujourd’hui. Si Dieu a voulu la création et l’a maintenue après le
péché, s’il a voulu que nous soyons des créatures sur cette terre, alors il
n’est pas possible de mépriser notre vie terrestre ou de la considérer comme
une simple antichambre de la vie éternelle. Le salut chrétien d’une manière ou
d’une autre doit se manifester aussi ici-bas et porter ses fruits dès
maintenant. C’est ce que Jésus dit à Zachée : Aujourd’hui, le salut est arrivé pour cette maison, car lui aussi est
un fils d’Abraham. Pour que le salut éternel soit bien réel, il faut que
notre vie terrestre ne soit pas seulement une ombre, mais une réalité riche de
sens, le lieu de notre rencontre avec Dieu, le lieu d’un bonheur possible avec
Dieu et avec les autres. La clé de ce bonheur, du point de vue de notre foi,
réside dans la vie spirituelle et dans la vie morale qui sont inséparables. Il
s’agit de désirer le Bien suprême qu’est Dieu et de faire le bien sur cette
terre : Éloignez-vous de moi, vous
tous qui commettez l’injustice… Le sacrement de l’eucharistie témoigne de
ce lien entre ce que nous vivons aujourd’hui et le salut éternel, entre la
création et la rédemption. Pas de corps du Christ sans le pain, fruit de la
terre et du travail des hommes. La création et l’activité des hommes durant
leur vie terrestre ont donc une grande valeur dans le plan de salut de Dieu.
Notre foi n’est pas seulement attente et désir de la vie éternelle, elle est
aussi force de transformation de notre terre par une humanité nouvelle, celle
des enfants de Dieu. Nous comprenons alors pourquoi la justice sociale, le
partage des ressources et des richesses, l’écologie ne sont pas d’abord des
questions politiques mais bien des enjeux spirituels. Le salut que Dieu promet
et nous offre exige de notre part un engagement dans le quotidien de nos vies
terrestres. C’est en vivant intensément notre vie présente, l’aujourd’hui de
Dieu, que nous nous préparons le mieux à la vie éternelle. Il ne nous
appartient pas de connaître le nombre des sauvés. Nous pouvons seulement avec
Hans Urs von Balthasar espérer pour tous.
En effet que signifierait le « bonheur » d’un petit nombre d’élus
au Paradis alors que la masse serait damnée ? Cette espérance d’un salut
universel ne peut que s’appuyer sur la confiance en Dieu. A la question de la
difficulté du salut, Jésus répond en saint Matthieu :
Pour les hommes, c’est impossible, mais pour
Dieu tout est possible.
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