dimanche 16 septembre 2018

24ème dimanche du temps ordinaire / B



16/09/18

Marc 8, 27-35

Jésus choisit un moment bien particulier pour annoncer à ses disciples son propre destin : l’accomplissement de son mystère pascal à Jérusalem où il devra beaucoup souffrir de la part de l’élite religieuse du peuple pour être finalement condamné à mort. Il fait cette annonce scandaleuse immédiatement après la profession de foi de Pierre qui reconnaît en lui le Messie. C’est cette réalité du Messie souffrant que Pierre rejette. Celui qui vient de reconnaître en Jésus le Messie se voit traité de Satan, car ses pensées ne sont pas celles de Dieu mais celles des hommes. La scène évangélique de ce dimanche présente donc un paradoxe. D’un côté Pierre proclame la vraie foi, et de l’autre il est incapable d’accepter que son Maître puisse souffrir et être tué. Ce paradoxe rejoint le cœur de notre expérience chrétienne. Nous pouvons confesser la foi catholique en ce qui concerne la personne de Jésus et y adhérer, tout en ayant des difficultés à incarner cette foi dans notre vie. Nous pouvons communier au Christ mort et ressuscité pour nous, et ne pas accepter pour nous-mêmes le mystère de la croix. D’où l’enseignement par lequel se termine notre Evangile : la nécessité pour tout disciple d’accepter dans sa vie le scandale de la croix. Si quelqu’un veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive.

Que signifie donc prendre sa croix à la suite du Seigneur ? Nous ne sommes pas tous appelés à être martyrs, mais tous nous avons à prendre cette croix de Jésus, en sachant que son joug est facile à porter et son fardeau léger dans la mesure où nous recevons sa grâce et son amour. Comme souvent il est très utile de faire appel à d’autres passages bibliques pour mieux saisir ce que signifie prendre sa croix. Tout d’abord un verset des Béatitudes : Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice, car le royaume des Cieux est à eux. La persécution fait partie de la vie du chrétien dans la mesure où le témoignage authentique qu’il donne dérange forcément. Quand nous nous engageons réellement au nom de notre foi pour la vérité, la justice et la paix, nous allons contre l’esprit du monde. Aller à contre-courant n’est jamais confortable et demande une grande force de caractère, une force qui ne peut venir que de la présence et de l’action de l’Esprit Saint en nous. Un passage de l’apôtre Paul aux Romains nous fait bien comprendre ce qu’est la justice chrétienne : Ne prenez pas pour modèle le monde présent, mais transformez-vous en renouvelant votre façon de penser pour discerner quelle est la volonté de Dieu : ce qui est bon, ce qui est capable de lui plaire, ce qui est parfait. Notre foi est en effet une force de contestation par rapport à un monde qui promeut souvent de fausses valeurs et qui s’engage dans bien des impasses tout en se proclamant « civilisé ». S’engager pour la paix, pour la justice sociale, le partage des biens et la solidarité, la sobriété évangélique, l’écologie, la vérité et l’honnêteté, implique de souffrir à la suite de Jésus sans avoir peur du jugement des autres. Ceux qui s’engagent sur ce chemin peuvent même être exclus et connaître la solitude de ceux qui semblent prêcher dans le désert. Mais le chrétien persécuté pour la justice n’est jamais seul, puisqu’il vit de l’intérieur une profonde communion avec le Messie souffrant, lui aussi rejeté à cause de la justice du Royaume des cieux. Le Concile Vatican II, dans la constitution sur l’Eglise dans le monde ce temps, nous livre un commentaire particulièrement beau des paroles de Jésus nous invitant à le suivre sur son chemin de souffrance, de mort et de résurrection :

En acceptant de mourir pour nous tous, pécheurs, Jésus nous apprend, par son exemple, que nous devons aussi porter cette croix que la chair et le monde font peser sur les épaules de ceux qui poursuivent la justice et la paix. Constitué Seigneur par sa résurrection, le Christ à qui tout pouvoir a été donné, au ciel et sur la terre agit désormais dans le cœur des hommes par la puissance de son Esprit ; il anime aussi, purifie et fortifie ces aspirations généreuses qui poussent la famille humaine à améliorer ses conditions de vie et à soumettre à cette fin la terre entière. […] De tous il fait des hommes libres pour que, renonçant à l’amour-propre et rassemblant toutes les énergies terrestres pour la vie humaine, ils s’élancent vers l’avenir, vers ce temps où l’humanité elle-même deviendra une offrande agréable à Dieu (n°38).

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