6ème dimanche de Pâques / A
27 avril 2008
Jean 14, 15-21 (page 673)
Les Evangiles du temps pascal, issus du discours de la dernière Cène en saint Jean, sont d’une rare densité de contenu.
A deux reprises dans ce passage du chapitre 14, le Seigneur Jésus met en rapport étroit l’amour que nous avons pour lui et la fidélité à ses commandements : « Si vous m’aimez, vous resterez fidèles à mes commandements. » « Celui qui a reçu mes commandements et y reste fidèle, c’est celui-là qui m’aime. » Ces deux enseignements du Seigneur parlent de réalités identiques mais dans un ordre différent, et c’est ce qui est intéressant pour nous. Dans le premier enseignement la fidélité aux commandements est la conséquence logique de notre amour pour le Christ. Dans le second la fidélité aux commandements est le signe, la preuve en quelque sorte, de notre amour pour le Christ. Nous avons ici le lien essentiel entre vie morale (les commandements) et vie spirituelle ou mystique (l’amour du Christ). Dans le christianisme la morale n’est jamais première. Et si elle est importante c’est uniquement dans le contexte de notre rapport vivant avec le Christ Ressuscité. En même temps notre vie spirituelle ne peut être désincarnée, d’où la juste place de la morale qui va nous permettre de faire passer dans nos actes et dans nos choix cette relation vivante que nous entretenons avec le Seigneur. Quels sont donc ces commandements ? Eh bien la morale chrétienne est simple comme Dieu lui-même est simple. Jésus a tout résumé dans le double commandement de l’amour envers Dieu et de l’amour envers le prochain. On pourrait dire que notre amour pour Dieu passe inévitablement par l’amour du prochain.
Un deuxième point d’attention dans cet Evangile concerne la promesse de l’Esprit de vérité : le Don de l’Amour du Père et du Fils. Les catéchismes issus de Vatican II ont insisté pour dire que notre vie morale est d’abord une vie dans l’Esprit et selon l’Esprit, donc une vie spirituelle. Sans l’Esprit Saint nous ne pouvons pas vivre les commandements de Jésus. Nous pouvons certes avoir une vie honnête, respecter quelques bonnes règles de conduites… Mais seul l’Esprit nous apprend à aimer comme Jésus, c’est-à-dire divinement. La vie morale du chrétien va bien au-delà de la vie selon la conscience morale. La charité exige davantage que la simple loi naturelle issue des dix commandements transmis par Moïse. Jésus promet donc à ses apôtres et à travers eux à toute l’Eglise le Don de l’Esprit de vérité. Il sera pour toujours avec nous, auprès de nous et en nous. Notons bien la progression du discours. Le Don de l’Esprit prolongera jusqu’à la fin des temps la logique de l’incarnation. A partir de l’Ascension le Seigneur sera invisible à nos yeux de chair, sa présence sera vécue sous le mode paradoxal d’une certaine absence… C’est donc l’Esprit qui, en nous, témoignera du Christ Ressuscité et nous fera communier avec lui par l’amour de charité. A Noël, Dieu se rend en quelque sorte intérieur à notre humanité en nous donnant sa Parole. A la Pentecôte, c’est le même Dieu qui se rend intérieur à nous en nous donnant son Souffle, son Esprit Saint. Cet enseignement de l’Evangile doit nous faire comprendre d’une manière nouvelle la transcendance de Dieu. Lorsque nous disons que Dieu est transcendant, nous voulons signifier par là qu’il n’est pas une créature, sa différence radicale d’avec tout ce qui existe dans la Création. Bref seul Dieu est Dieu. Seul Dieu est Saint. En même temps nous savons depuis l’incarnation que Dieu n’est pas un être lointain, un être extérieur, sur un nuage, là haut dans le Ciel, bien au-dessus de nous. Tout en étant radicalement différent de nous, notre Dieu par le Christ et dans l’Esprit se fait intérieur à chacun, à chacune d’entre nous. C’est un peu cela la grâce divine, et particulièrement la grâce sacramentelle. Si le christianisme n’est pas un moralisme nous l’avons vu, il n’est pas davantage une religion de l’extériorité… Dans notre foi chrétienne tout tend à nous ramener vers notre intériorité, lieu de la présence et de l’action des Personnes divines. D’où l’importance encore une fois de la vie spirituelle et par conséquent de la prière.
« En ce jour-là, vous reconnaîtrez que je suis en mon Père, que vous êtes en moi, et moi en vous. » Cette inhabitation réciproque entre nous et la Sainte Trinité est nourrie au plus haut point par la communion eucharistique. Elle n’est possible que par l’exercice constant et inlassable de la vertu de charité : « Celui qui m’aime sera aimé de mon Père… Moi aussi je l’aimerai. » Quel mystère étonnant que celui d’un Dieu dont le cœur est si sensible à l’amour de ses créatures ? En ces jours préparatoires à la Pentecôte, demandons à l’Esprit de Dieu de toucher nos cœurs de pierre et de désensabler en nous les sources vives de l’amour ! Que nous ayons cette joie que nul ne pourra nous ravir, cette joie d’être toujours plus présents à la présence aimante de Dieu en nous !
Amen
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