32ème dimanche du TO / C
11 novembre 07
Luc 20, 27-38 (page 941)
La discussion byzantine que les Sadducéens ont avec Jésus dans l’Evangile de ce dimanche est pour nous l’occasion de méditer un article fondamental de notre foi chrétienne : « J’attends la résurrection des morts » ou bien dans le symbole des apôtres : « Je crois à la résurrection de la chair ».
Cette discussion qui nous semble ridicule ne peut se comprendre que si nous la replaçons dans le contexte religieux du judaïsme à l’époque de Jésus. En effet les Juifs étaient divisés entre eux quant à la résurrection des morts. Les Pharisiens y croyaient alors que les Sadducéens rejetaient cette croyance. Dans l’Ancien testament il y a comme une progression vers cette foi en la vie éternelle. Les textes les plus anciens n’y font pas allusion de manière claire alors que les plus récents, ceux qui ont été écrits peu de temps avant la venue du Christ, témoignent de la foi en la vie éternelle. Et ce sont justement ces écrits récents que les Sadducéens refusent de reconnaître…
La réponse de notre Seigneur se présente en deux parties. Dans la première partie, il semblerait que Jésus remette en question la valeur du mariage : « Les enfants de ce monde se marient. Mais ceux qui ont été jugés dignes d’avoir part au monde à venir et à la résurrection d’entre les morts ne se marient pas, car ils ne peuvent plus mourir. » Avant d’aborder le problème du statut du mariage dans cette affirmation, relevons tout d’abord un fait intéressant. Le mariage est perçu comme une institution permettant, par le moyen de la procréation, une certaine continuité entre les générations. Les parents survivent en quelque sorte dans leurs enfants. S’il n’y pas de vie éternelle personnelle, cela peut correspondre à une consolation de savoir qu’après le néant de la mort, nos enfants nous survivront. Ce serait donc un désir d’immortalité qui pousserait les parents à donner naissance à des enfants. Dans sa réponse, le Seigneur semble dire que les élus, ceux qui sont appelés à la résurrection, ne se marient pas. Ce qui ruinerait bien sûr le sacrement de mariage et qui obligerait tous les chrétiens au célibat en vue du Royaume des Cieux. Il est toujours intéressant lorsque nous rencontrons un problème d’interprétation d’un texte biblique d’aller voir les passages parallèles. Ce faisant nous remarquerons que seul Luc emploie cette formule ambiguë. Je me contenterai de citer ici la version de Matthieu : « Vous êtes dans l’erreur, vous ne connaissez pas les Ecritures et pas davantage la puissance de Dieu. A la résurrection on ne prend plus de femme ou de mari : tous sont comme des anges de Dieu dans le ciel. » Le Seigneur Jésus n’interdit donc pas le mariage, mais il le relativise. Le mariage est une réalité valable pour la vie humaine ici-bas. Donc une réalité transitoire qui disparaitra au moment de notre entrée dans la vie éternelle et au jour de notre résurrection. Les Mormons sont ainsi dans l’erreur lorsqu’ils parlent du mariage comme d’une réalité éternelle. La réponse de Jésus nous permet de comprendre ce que veut dire saint Paul lorsqu’il écrit aux Corinthiens : « Ceux qui ont pris femme doivent vivre comme s’ils n’en avaient pas. […] Car les situations de ce monde sont en train de passer. » Rien ici-bas n’est éternel, pas plus le mariage qu’autre chose. Le même Paul nous apprend que seule la charité subsistera dans la vie de gloire avec le Seigneur. L’erreur des Sadducéens consiste à avoir transposé une loi de Moïse, celle du lévirat, faite pour la vie humaine ici-bas, dans la vie éternelle. Ce débat nous permet aussi de mieux comprendre le sens du célibat ecclésiastique ainsi que de la vie religieuse consacrée. Si les moines, les moniales et les prêtres ne se marient pas, c’est justement pour témoigner de manière concrète de la foi de l’Eglise en la résurrection des morts. Leur célibat consacré est un signe qui anticipe la vie du Royaume des Cieux dans laquelle nous serons semblables aux anges.
La deuxième partie de la réponse du Seigneur se réfère à un passage du livre de l’Exode, livre reconnu par les Sadducéens : « Quant à dire que les morts doivent ressusciter, Moïse lui-même le fait comprendre dans le récit du buisson ardent, quand il appelle le Seigneur : le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac, le Dieu de Jacob. Il n’est pas le Dieu des morts mais des vivants ; tous vivent en effet pour lui. » Jésus qui s’est présenté à Marthe comme la résurrection et la vie fait ici une magnifique interprétation du récit du buisson ardent. Il nous montre que de manière implicite l’Ecriture affirme la vie éternelle. C’est une question de logique. Si Dieu, le Vivant, se présente à Moïse, comme le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, cela signifie que ces derniers ne sont pas seulement des personnages illustres du passé, mais qu’ils sont des vivants en Dieu. L’amour de notre Dieu est fidèle, il est plus puissant que notre mort même. Ne cherchons donc pas à survivre dans nos enfants, cherchons plutôt à vivre pour Dieu notre Père. C’est ainsi que nous serons jugés dignes d’avoir part à la résurrection d’entre les morts. Amen.
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