13ème dimanche du TO/C
27/06/2010
Luc 9, 51-62 (p. 18)
En cette fin d’année scolaire la liturgie nous fait entendre la finale du chapitre 9 de l’Evangile selon saint Luc. Le contexte est ici important. Cet Evangile se situe entre l’envoi en mission des Douze et l’envoi en mission des 72 disciples. C’est donc bien dans un sens missionnaire que nous avons à recevoir ces paroles. Le moment est en outre décisif : « Comme le temps approchait où Jésus allait être enlevé de ce monde, il prit avec courage la route de Jérusalem ». Nous sommes à un tournant de l’Evangile. Le Seigneur se dirige vers la ville sainte avec ses apôtres pour y souffrir sa Passion et y mourir sur le bois de la croix. Et cela nous dit aussi quelque chose des moyens de la mission. C’est par la faiblesse de la Croix que Jésus sauvera notre humanité. C’est par l’offrande de sa personne et de sa vie par amour qu’il nous attirera vers le Père. La seule puissance dont Dieu dispose est précisément celle de son amour infini.
Je commencerai par méditer rapidement la deuxième partie de notre Evangile. Nous avons trois exemples d’hommes, anonymes, auxquels le Seigneur rappelle les exigences de la mission à sa suite. Pour annoncer le Règne de Dieu il faut avoir en soi certaines dispositions. Ce qui est commun à ces trois exemples c’est la nécessité du détachement pour celui qui veut suivre Jésus. Détachement vis-à-vis d’un certain confort de vie, détachement aussi par rapport aux liens humains et familiaux. Nul ne peut commencer à vivre ces exigences s’il ne met pas d’abord toute sa confiance en Dieu. C’est bien une question de foi totale. C’est par la force de cette foi que le disciple peut répondre à Jésus par un « oui » sans conditions ni retard. Le détachement est la condition nécessaire à la liberté du disciple. Celui qui suit Jésus doit devenir un homme libre qui se laisse conduire par l’Esprit. Etre libre ici ne signifie pas faire sa propre volonté, mais, comme Jésus, rechercher et accepter la volonté du Père. Ceci nous amène à méditer maintenant la première partie de notre Evangile.
Les Samaritains et les Juifs ne s’aimaient pas. Ils avaient même leur propre temple. De la Galilée à la Judée, Jésus doit traverser ce territoire de la Samarie. Et voilà qu’un village refuse de l’accueillir lui et ses disciples. Saint Luc nous en donne la raison : « parce qu’il se dirigeait vers Jérusalem ». Notons ici l’étroitesse d’esprit des samaritains, signe d’une humanité divisée par le péché. Ne croyons pas avoir affaire à une vieille histoire du passé. En tant que curé j’ai connu la mesquinerie de l’esprit de clocher entre certains catholiques… qui refusaient d’aller à la messe dans le village d’à côté parce que c’étaient un peu des « ennemis »… Et voilà que Jacques et Jean, deux apôtres, proposent au Seigneur de punir de manière forte ces samaritains peu accueillants : « Veux-tu que nous ordonnions que le feu tombe du ciel pour les détruire ? » Souvenons-nous du contexte : Jésus monte à Jérusalem pour y souffrir sa Passion et mourir crucifié… Nos apôtres en sont restés à l’Ancien Testament, aux bonnes vieilles méthodes… Ici s’exprime la tentation du fanatisme religieux. Ce fanatisme est une caricature honteuse de la vraie foi et de la religion authentique. Il s’agit finalement d’imposer la vérité par la force. Il s’agit de s’imposer par tous les moyens possibles en bafouant la conscience et la liberté de ceux qui ne partagent pas nos convictions. Beaucoup de pages sombres de l’histoire de notre Eglise relèvent de ce fanatisme religieux. Et si en Occident il y a tant de personnes qui sont athées et refusent la religion, c’est en grande partie à cause de cela. C’est à cause de ce contre-témoignage que le pape Jean-Paul II a publiquement demandé pardon à Dieu lors du Jubilé de l’an 2000. Maurice Zundel écrivait en 1966 : « On peut dire que l’immense majorité des peuples n’ont pas choisi leur religion. Elle leur a été imposée. Or, une religion imposée ne peut pas être une religion mystique : ce ne peut être qu’une religion-objet, une religion prise du dehors ». Et nos évêques affirmaient dans leur lettre aux catholiques de France : « Entre Dieu et l’homme il ne s’agit jamais d’un rapport de forces, mais d’un rapport de liberté et, en dernière instance, d’une relation de confiance et d’amour ». Jésus, nous le voyons, ne rentre pas dans le projet punitif de ses apôtres. Au contraire il les interpelle vivement, il les réprimande et les remet ainsi dans l’axe de leur mission. La mission des apôtres n’est pas de punir au nom de Dieu. Ils doivent manifester au contraire la miséricorde et l’amour du Seigneur pour tous, en particulier pour les pécheurs et les ignorants. Quelques chapitres plus loin dans le même Evangile, le Seigneur Jésus parle lui aussi d’un feu. Non pas un feu vengeur qui tue les hommes, mais le feu issu de son cœur aimant par lequel il veut les attirer au Père. Non pas la force qui punit et contraint, mais la faiblesse d’un Dieu crucifié, désarmé, qui nous sauve et nous relève avec une patience infinie :
Je suis venu apporter un feu sur la terre, et comme je voudrais qu'il soit déjà allumé !
Je dois recevoir un baptême, et comme il m'en coûte d'attendre qu'il soit accompli !
1 commentaire:
Je suis à 100% en accord avec ce que j'ai lu ici.
L'intégrisme religieux est une dangereuse déviance qu'il faut savoir dénoncer.
Bravo à l'auteur de cette homélie.
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