14ème dimanche du TO / A
6 juillet 08
Matthieu 11, 25-30 (p.56)
La première partie de ce magnifique passage évangélique, la prière de louange que Jésus adresse à son Père, se retrouve aussi chez saint Luc. Mais seul saint Matthieu nous rapporte cet appel si touchant de Notre Seigneur : « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi, je vous procurerai le repos. »
La prière de louange de Jésus, le début de l’Evangile de ce dimanche, nous révèle l’union étroite qui existe entre le Fils dans sa condition humaine et le Père. C’est donc une prière trinitaire même si l’Esprit Saint n’est pas mentionné. Dieu notre Père en envoyant son Fils bien aimé parmi nous lui confie tout : Il lui donne tout ce qui est nécessaire pour l’accomplissement de sa mission de salut. Jésus ressuscité le rappellera à ses apôtres avant leur ultime envoi en mission et avant la séparation physique de l’Ascension : « Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre. » Dans sa prière Jésus souligne que la connaissance parfaite entre le Père et le Fils est le privilège de la vie trinitaire. Nous ne pouvons connaître le Fils que par révélation. Souvenez-vous du commentaire que Jésus donne à la profession de foi de Pierre : « Ce n’est pas la chair et le sang qui te l’ont révélé, mais mon Père qui est dans les cieux. » Et de la même manière nous ne pouvons pas connaître Dieu notre Père sans passer par son Fils. C’est dire à quel point notre foi chrétienne qui a pour objet principal la connaissance du mystère de Dieu Trinité est un don, une grâce, une révélation de l’Esprit Saint… Et c’est alors que la parole de Jésus prend encore plus de relief. Car elle nous dit ce qui attire la grâce de Dieu et au contraire ce qui peut l’éloigner de nous : « Ce que tu as caché aux sages et aux savants, tu l’as révélé aux tout petits. » Nous pourrions avoir une mauvaise interprétation de ces propos merveilleux : Jésus nous encouragerait à avoir la foi du charbonnier, à être des chrétiens fidéistes, excluant leur intelligence et leur raison de l’acte de croire… Par « sages et savants » nous devons comprendre ceux qui à cause de leur grande science sont tombés dans la tentation de l’orgueil et de la superbe. Oui, Dieu demeure un Dieu caché pour les orgueilleux et les suffisants. Si nous voulons vraiment accueillir en nous la révélation du mystère trinitaire, nous devons faire partie de ces tout petits, c’est-à-dire cultiver sans cesse la vertu d’humilité et la considérer comme la vertu reine dans notre chemin de foi et dans notre union à Dieu. C’est l’occasion de rappeler ici que le vrai savant, le vrai intellectuel est humble, car il a fait l’expérience décrite par Pascal dans ses Pensées :
« Les sciences ont deux extrémités qui se touchent, la première est la pure ignorance naturelle où se trouvent tous les hommes en naissant, l’autre extrémité est celle où arrivent les grandes âmes qui, ayant parcouru tout ce que les hommes peuvent savoir, trouvent qu’ils ne savent rien et se rencontrent en cette même ignorance d’où ils étaient partis, mais c’est une ignorance savante qui se connaît. » (81 / 299)
Nous pourrions méditer longuement la seconde partie de notre Evangile, propre à Matthieu. Jésus s’identifie pleinement aux tout petits dont nous venons de parler car il vit lui-même son humanité dans la douceur et l’humilité. Jésus a un cœur compatissant, et à ce titre il donne en priorité son amour à ceux qui peinent sous le poids du fardeau. Son attitude est opposée à celle des spécialistes de la religion juive, les sages et les savants. Notre Seigneur en parlera avec clairvoyance dans le même Evangile : Les maîtres de la Loi et les Pharisiens « préparent de lourdes charges, et ils vous les mettent sur les épaules ; mais eux-mêmes ne bougeraient pas un doigt pour les remuer. » Jésus, lui, a pris librement sur ses épaules le fardeau de la Croix, et ce jusqu’à la mort. Il l’a pris non pas pour nous accabler, pour nous rendre la vie plus dure ou difficile. Non, son joug est facile à porter et son fardeau léger. Que signifie tout cela pour nous ? Jésus ne vient pas supprimer notre fardeau. Nous savons bien qu’ici-bas nous ne vivons pas au Paradis, et même si notre terre n’est pas toujours une vallée de larmes, elle est pour nous le lieu de bien des combats, de bien des difficultés… Bref les fardeaux ne manquent pas au cours d’une existence terrestre. Jésus vient les porter avec nous. Il est avec nous jusqu’à la fin des temps. Ce sont sa présence et son amour qui peuvent rendre nos fardeaux plus légers, plus supportables. Le Seigneur seul peut nous donner la force surnaturelle de son Esprit dans les épreuves. Les martyres en sont l’illustration la plus évidente. Alors comment pouvons-nous répondre à l’appel si doux de notre Maître ? « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau… » Comment pouvons-nous recevoir ce repos promis par le Seigneur au milieu même de nos épreuves ? Je vois deux moyens essentiels. Le premier est la prière. Quelle chance avons-nous de pouvoir parler à Dieu « comme un ami parle à un ami ou un serviteur à son seigneur » ! (saint Ignace de Loyola). Il y a des réalités de notre vie que nous ne pouvons parfois confier qu’au Seigneur dans la prière. Le deuxième moyen est le sacrement du pardon. Le poids de la culpabilité peut être énorme. Quelle merveille que ce sacrement par lequel le Christ Vivant vient alléger notre fardeau en nous réconciliant avec le Père ! Ce sacrement est vraiment avec la prière l’un des grands privilèges des enfants de Dieu, une consolation certaine pour tout ceux qui peinent sous le poids du fardeau.
Amen
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