dimanche 28 juin 2015

13ème dimanche du temps ordinaire / B

28/06/15

2 Corinthiens 8, 7-15

Dans la deuxième lecture de cette messe l’apôtre Paul parle d’une collecte qu’il a organisée chez les Corinthiens en faveur des chrétiens de l’Eglise de Jérusalem. Lorsque saint Luc décrit la première communauté chrétienne dans les Actes des apôtres, il mentionne l’esprit de solidarité et de partage parmi les disciples : « Tous ceux qui avaient cru se retrouvaient ensemble : ils mettaient tout en commun et vendaient leurs propriétés, leurs biens, partageant avec tous ceux qui étaient dans le besoin ».
Il est intéressant de relever les arguments que Paul donne aux Corinthiens pour les encourager à partager leurs biens avec les frères qui sont dans le besoin. Il ne leur dit pas « puisque vous êtes riches, donnez de votre argent »,  mais « puisque vous avez reçu largement tous les dons : la foi, la Parole et la connaissance de Dieu… ». Paul rappelle donc aux Corinthiens les bénédictions du Seigneur à leur égard, tous les dons spirituels dont ils ont été comblés. Une vie spirituelle authentique doit susciter le désir du partage matériel avec les plus démunis et les plus pauvres : « Que votre geste de générosité soit large ». L’apôtre ajoute une autre motivation pour que la collecte soit une réussite : « Vous connaissez en effet la générosité de notre Seigneur Jésus-Christ ». L’esprit de partage et de solidarité permet donc aux chrétiens d’imiter l’attitude de leur Maître et Seigneur : « lui qui est riche, il est devenu pauvre à cause de vous, pour que vous deveniez riches par sa pauvreté ». Quelle est donc cette richesse du Verbe de Dieu, du Fils bien-aimé du Père ? Certainement pas une richesse matérielle, comme si Dieu avait besoin d’or et d’argent pour manifester son immense gloire. La richesse du Christ, c’est son union parfaite avec le Père, c’est sa divinité elle-même. Pour comprendre ce que veut dire Paul en parlant du Christ, qui de riche est devenu pauvre, nous pouvons nous référer à ce qu’il écrit dans sa lettre aux Philippiens : « Lui qui jouissait de la façon d’être de Dieu, il ne s’est pas attaché à cette égalité avec Dieu, mais il s’est réduit à rien, jusqu’à prendre la condition de serviteur ». Donc si les Corinthiens sont appelés par Paul à aider financièrement leurs frères de Jérusalem, c’est en raison des dons spirituels qu’ils ont reçu et afin d’imiter la générosité du Christ. Dans le chapitre suivant l’apôtre insiste sur la générosité du don à l’occasion de la collecte qu’il organise : « Rappelez-vous le proverbe : “À semer trop peu, on récolte trop peu ; à semer largement, on récolte largement”. Que chacun donne comme il a décidé dans son cœur, sans regret et sans contrainte, car Dieu aime celui qui donne joyeusement. Et Dieu est assez puissant pour vous donner toute grâce en abondance, afin que vous ayez, en toute chose et toujours, tout ce qu’il vous faut, et même que vous ayez en abondance de quoi faire toute sorte de bien ».
Chaque année le Carême nous rappelle d’une manière particulière l’importance du partage et de la solidarité dans notre vie chrétienne. Mais le partage ne doit pas se limiter au seul temps du Carême. Nous devons nous poser la question de manière personnelle et nous demander si nous sommes généreux et ouverts aux besoins de nos frères. En ce moment, nous le savons, les chrétiens d’Orient subissent de nouvelles persécutions en raison de leur foi. Connaissons-nous l’œuvre d’Orient, œuvre de solidarité avec les chrétiens du Proche et du Moyen Orient ? Saint Paul qui appelait les Corinthiens à venir en aide à leurs frères de Jérusalem rappelait aussi aux responsables de l’Eglise les paroles du Christ :


« Il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir ».

dimanche 21 juin 2015

12ème dimanche du temps ordinaire / B

21/06/15

2 Corinthiens 5, 14-17

Dans la deuxième lecture de cette liturgie l’apôtre Paul nous parle de notre vie chrétienne. Etre disciple du Christ a des conséquences sur notre vie humaine. Paul nous donne trois caractéristiques de la vie chrétienne, et cela en utilisant des formules saisissantes :

-      « Le Christ est mort pour tous, afin que les vivants n’aient plus leur vie centrée sur eux-mêmes, mais sur lui, qui est mort et ressuscité pour eux ».
-      « Désormais nous ne connaissons plus personne à la manière humaine ».
-      « Si donc quelqu’un est en Jésus-Christ, il est une créature nouvelle ».

Dans la première de ces affirmations l’apôtre nous enseigne que le Christ nous décentre de nous-mêmes. C’est Jésus, dans son mystère de mort et de résurrection, qui devrait être le centre de la vie de chaque chrétien. La force de l’amour du Christ nous est en effet donnée pour nous arracher à la pesanteur de notre égoïsme. Depuis le péché des origines notre nature humaine est marquée par l’égoïsme qui fait que chacun est le centre de son petit monde. Comment faire de Jésus le centre de notre vie ? En mettant peu à peu en pratique le double commandement de l’amour. L’amour de charité envers Dieu et envers le prochain nous décentre de nous-mêmes. Nous comprenons ainsi que c’est par la prière et les œuvres de charité que nous laissons au Christ la première place dans notre vie. Dans la même lettre saint Paul déclare : « Notre ambition, c’est de plaire au Seigneur ». Et nous savons que pour lui plaire nous devons aimer comme lui-même nous a aimés.
En tant que chrétiens nous ne connaissons plus personne à la manière humaine, c’est la deuxième affirmation de Paul. Cela signifie que notre manière d’entrer en relation les uns avec les autres n’est plus déterminée par des critères simplement humains mais par le regard de la foi, cette foi qui fait défaut aux disciples au milieu de la tempête : « Comment se fait-il que vous n’ayez pas la foi ? » Le regard que nous devrions porter sur les autres est donc surnaturel. Spontanément nous jugeons les autres sur un certain nombre de critères tels que l’apparence, le rang social, la richesse etc. Il est très difficile pour nous de ne pas regarder notre prochain de manière humaine. Un peu avant notre passage, Paul fait allusion à « ceux qui mettent leur fierté dans les apparences, et non dans le cœur ». Et nous pouvons penser à la sévère remontrance que l’apôtre Jacques fait aux chrétiens lorsqu’ils font la différence, dans l’assemblée du dimanche, entre les riches et les pauvres :
Mes frères, dans votre foi en Jésus Christ, notre Seigneur de gloire, n’ayez aucune partialité envers les personnes. Imaginons que, dans votre assemblée, arrivent en même temps un homme au vêtement rutilant, portant une bague en or, et un pauvre au vêtement sale. Vous tournez vos regards vers celui qui porte le vêtement rutilant et vous lui dites : « Assieds-toi ici, en bonne place » ; et vous dites au pauvre : « Toi, reste là debout », ou bien : « Assieds-toi au bas de mon marchepied ». Cela, n’est-ce pas faire des différences entre vous, et juger selon de faux critères ?

Enfin l’apôtre nous fait contempler notre condition de chrétiens en nous rappelant que par la foi et le baptême nous sommes devenus des créatures nouvelles. Nous vivons en ce monde mais à travers nous « un monde nouveau est déjà né », c’est le monde du Royaume de Dieu. Dans ce monde ce qui est important c’est la présence et l’action du Christ en chacun, peu importe ses caractéristiques humaines. Sans la lumière de la foi nous sommes toujours tentés de diviser, d’opposer alors que le regard de foi aspire à l’unité et à la communion. C’est ainsi que Paul comprend le baptême dans un magnifique passage de sa lettre aux Galates :


Tous, dans le Christ Jésus, vous êtes fils de Dieu par la foi. En effet, vous tous que le baptême a unis au Christ, vous avez revêtu le Christ ; il n’y a plus ni juif ni grec, il n’y a plus ni esclave ni homme libre, il n’y a plus l’homme et la femme, car tous, vous ne faites plus qu’un dans le Christ Jésus.

dimanche 14 juin 2015

11ème dimanche du temps ordinaire / B

14/06/15

Marc 4, 26-34

La réalité du règne de Dieu ou du royaume des cieux est au centre du message annoncé par Jésus. Il a commencé sa prédication en disant : « Les délais sont accomplis, le règne de Dieu est là, convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle ». Et dans la prière qu’il nous a transmise, le Seigneur nous fait demander : « Que ton règne vienne ! » De très nombreuses paraboles nous parlent du règne de Dieu. En ce dimanche nous venons d’entendre la parabole du grain jeté dans le champ et celle de la graine de moutarde, toutes deux empruntées à la vie agricole, à une époque où le travail de la terre occupait un très grand nombre de personnes et faisait partie de la vie quotidienne.

« Un homme jette le grain dans son champ ». L’image de l’agriculteur jetant la semence en terre évoque la confiance de celui-ci envers la fertilité de la terre et la puissance de la semence. Pour jeter le grain en terre, il faut en effet croire que la terre lui fera porter tous ses fruits en temps voulu. Pour nous approcher du mystère du règne de Dieu, nous avons besoin de notre foi, nous avons besoin de faire confiance en la puissance et la fertilité de la Parole de Dieu semée dans les cœurs humains. Sans cette confiance fondamentale nous risquons bien de nous décourager et de perdre patience car la croissance du règne de Dieu peut nous sembler bien trop lente ou encore trop peu visible à nos yeux, pas assez éclatante. Quand nous regardons l’histoire de l’humanité et notre propre histoire, les forces contraires à celles du royaume des cieux peuvent nous apparaître tellement puissantes que nous sommes amenés à douter. C’est alors qu’il faut nous souvenir de ce que saint Jacques enseignait aux premiers chrétiens : « Frères, en attendant la venue du Seigneur, prenez patience. Voyez le cultivateur : il attend les fruits précieux de la terre avec patience, jusqu’à ce qu’il ait fait la récolte précoce et la récolte tardive. Prenez patience, vous aussi, et tenez ferme car la venue du Seigneur est proche. » La fine pointe de la parabole se trouve dans le mystérieux pouvoir de vie qui se trouve caché dans le grain : « La semence germe et grandit, il ne sait comment. D’elle-même la terre produit d’abord l’herbe, puis l’épi, enfin du blé plein l’épi ». A notre époque la plus grande partie de l’agriculture est devenue industrielle et il n’y a plus grand-chose de naturel dans les pratiques de l’agriculture intensive. Cette agriculture est dépendante des biotechnologies, de la chimie et du pétrole. Nous la voyons d’abord comme le produit du travail de l’homme et de la recherche scientifique et technologique. La parabole nous ramène au miracle de la vie. Ce miracle est un don de Dieu créateur. L’homme ne sait pas comment la semence germe et grandit… Ce n’est plus vrai aujourd’hui avec le progrès des connaissances scientifiques mais cela n’enlève rien au fait que la nature nous donne dans une simple graine les promesses d’une croissance extraordinaire. Ce n’est pas parce que nous connaissons mieux le processus de la croissance que le miracle de la vie n’existe plus. La parabole nous enseigne donc que le règne de Dieu est d’abord un don, un cadeau que nous devons recevoir avec reconnaissance. Il n’est pas tellement le fruit de notre travail que l’œuvre de l’Esprit Saint au cœur de ce monde. Simplement Dieu n’est pas productiviste. Pour comprendre le développement de son royaume mieux vaut se référer à l’agriculture traditionnelle telle qu’elle existe encore dans beaucoup de pays du sud. Une agriculture qui sait être patiente et qui demeure à taille humaine. Une agriculture qui fait davantage confiance à la richesse de la terre qu’à la chimie. Le règne de Dieu se découvre en effet dans les petites choses, il passe souvent inaperçu en ses commencements comme la minuscule graine de moutarde. Le règne de Dieu se révèle à ceux qui ne sont pas esclaves d’un productivisme et d’une rentabilité à court-terme. Seul celui qui a le regard adapté au long-terme est capable de déchiffrer dans l’histoire de l’humanité et dans son histoire personnelle la croissance mystérieuse de ce règne, et cela chaque fois que l’amour du Christ Ressuscité triomphe des forces destructrices, faisant ainsi reculer l’empire de la mort.