lundi 12 novembre 2012

Messe de Requiem pour les victimes des guerres


Messe de Requiem pour les défunts des deux guerres mondiales

St. Ansgar, 12 novembre 2012

Nous voici rassemblés dans la prière en cette cathédrale saint Ansgar pour faire mémoire de toutes les victimes militaires et civiles des deux guerres mondiales qui ont ensanglanté le siècle dernier. Nous le faisons en célébrant la messe qui est le mémorial du don que Jésus a fait de sa propre vie pour nous réconcilier avec Dieu notre Père et entre nous. Pour un chrétien les guerres sont la conséquence du péché originel et de nos péchés personnels. L’orgueil et la cupidité sont à l’origine de la plupart de nos conflits. En cette année au cours de laquelle l’Eglise catholique célèbre le 50ème anniversaire du concile Vatican II comment ne pas rappeler l’enseignement de ce concile sur la sauvegarde de la paix et la construction de la communauté des nations ? Déjà en 1963 le bienheureux pape Jean XXIII s’était adressé à tous les hommes de bonne volonté dans son encyclique Pacem in terris afin de promouvoir en pleine guerre froide la paix véritable. Dans la constitution sur l’Eglise dans le monde de ce temps le concile aborde cette partie de la doctrine sociale de l’Eglise qui sera sans cesse reprise ultérieurement, en particulier dans le compendium de la doctrine sociale de l’Eglise publié en 2005. Je relèverai deux points de cet enseignement. Le premier concerne la condamnation sévère de la guerre totale :

Tout acte de guerre qui tend indistinctement à la destruction de villes entières ou de vastes régions avec leurs habitants est un crime contre Dieu et contre l’homme lui-même, qui doit être condamné fermement et sans hésitation. Le risque particulier de la guerre moderne consiste en ce qu’elle fournit pour ainsi dire l’occasion à ceux qui possèdent des armes scientifiques plus récentes de commettre de tels crimes ; et, par un enchaînement en quelque sorte inexorable, elle peut pousser la volonté humaine aux plus atroces décisions. Pour que jamais plus ceci ne se produise, les évêques du monde entier, rassemblés et ne faisant qu’un, adjurent tous les hommes, tout particulièrement les chefs d’État et les autorités militaires, de peser à tout instant une responsabilité aussi immense devant Dieu et devant toute l’humanité.

Le second concerne le scandale moral de la course aux armements :

Quoi qu’il en soit de ce procédé de dissuasion, on doit néanmoins se convaincre que la course aux armements, à laquelle d’assez nombreuses nations s’en remettent, ne constitue pas une voie sûre pour le ferme maintien de la paix et que le soi-disant équilibre qui en résulte n’est ni une paix stable, ni une paix véritable. Bien loin d’éliminer ainsi les causes de guerre, on risque au contraire de les aggraver peu à peu. Tandis qu’on dépense des richesses fabuleuses dans la préparation d’armes toujours nouvelles, il devient impossible de porter suffisamment remède à tant de misères présentes de l’univers. Au lieu d’apaiser véritablement et radicalement les conflits entre nations, on en répand plutôt la contagion à d’autres parties du monde. Il faudra choisir des voies nouvelles en partant de la réforme des esprits pour en finir avec ce scandale et pour pouvoir ainsi libérer le monde de l’anxiété qui l’opprime et lui rendre une paix véritable. C’est pourquoi il faut derechef déclarer : la course aux armements est une plaie extrêmement grave de l’humanité et lèse les pauvres d’une manière intolérable. Et il est bien à craindre que, si elle persiste, elle n’enfante un jour les désastres mortels dont elle préparer déjà les moyens.

Comment ne pas évoquer aussi la visite du pape Paul VI le 4 octobre 1965 au siège des Nations Unies à New-York et le discours qu’il fit en français devant les représentants des Nations ? Le cri du pape est resté dans les mémoires : « jamais plus la guerre, jamais plus la guerre ! » Paul VI a alors réaffirmé l’importance d’un organisme comme l’Organisation des Nations Unies en vue de l’affermissement de la paix et de la coopération entre les Nations. En terminant son allocution il affirmé avec force l’importance de la conscience morale de chaque homme : « Oui, le moment est venu de la conversion, de la transformation personnelle, du renouvellement intérieur… Le vrai péril se tient dans l’homme, qui dispose d’instruments toujours plus puissants, aptes aussi bien à la ruine qu’aux plus hautes conquêtes ». Je terminerai en citant un philosophe, Fabrice Hadjadj, né dans le Judaïsme et converti à la foi catholique. Sa réflexion nous appelle à tirer des leçons pour aujourd’hui de la barbarie des deux guerres mondiales : « Le 20ème siècle, qui crut si peu au diable, les plus mécréants confessent son diabolisme aigu, mais ils ne parviennent pas à faire le rapprochement, et ils en restent à une vision grossière qui leur blanchit les mains. Parce qu’il y eut Hitler et Staline, bien sûr. Mais il y eut aussi les Alliés, et cette date merveilleuse qui conviendrait parfaitement à une journée mondiale du Démon : le 8 août 1945. C’est le jour où le tribunal militaire de Nuremberg a juridiquement codifié la notion de crime contre l’humanité. Le surlendemain d’Hiroshima. La veille de Nagasaki. En sorte que ceux-là qui dénonçaient le grand crime étaient aussi ceux qui, ayant sous les yeux les effets de la première, larguaient la deuxième bombe… ». Ce à quoi il faut ajouter, scandale suprême, qu’un aumônier militaire américain, le père George Zabelka, a béni l’équipage qui allait lancer sur Hiroshima la première bombe atomique de notre histoire.

 

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